Au Zimbabwe, la précarité de la situation de la liberté de la presse est apparue dans toute son étendue à lâoccasion dâun certain nombre dâincidents survenus dans les derniers jours qui ont précédé les élections parlementaires des 24 et 25 juin, rapportent lâInstitut des médias dâAfrique australe (MISA) et le Comité pour la protection des […]
Au Zimbabwe, la précarité de la situation de la liberté de la presse est apparue dans toute son étendue à lâoccasion dâun certain nombre dâincidents survenus dans les derniers jours qui ont précédé les élections parlementaires des 24 et 25 juin, rapportent lâInstitut des médias dâAfrique australe (MISA) et le Comité pour la protection des journalistes (CPJ). Les dépêches indiquent que les élections ont donné au Zimbabwe African National Union-Patriotic Front (Union nationale africaine-Front patriotique du Zimbabwe, ZANU-PF) du président Robert Mugabe une mince majorité parlementaire.
Dâaprès le MISA, le journal âThe Standardâ rapporte que le gouvernement a ordonné aux journalistes du âHeraldâ et à la Zimbabwe Broadcasting Corporation (ZBC) en poste à Harare dâassurer la couverture de la campagne électorale du parti au pouvoir à Bulawayo et dans la province du Matebeleland. Le gouvernement se serait plaint du âmanque de patriotisme de la part des journalistes de âZimpapersâ et du bureau local de la ZBC à Bulawayoâ. Il aurait accusé deux journaux de Bulawayo de donner une couverture étendue aux rassemblements du Mouvement pour le changement démocratique (MDC), dâopposition, et attaqué les bureaux locaux de la ZBC et de lâagence de nouvelles âZimbabwe Inter-Africa News Agencyâ (ZIANA) en raison de la couverture incorrecte quâils auraient offerte des activités du parti au pouvoir. Le gouvernement a donc, selon le âStandardâ, assigné aux journalistes de lâÃtat de Harare la tâche de couvrir les rassemblements politiques du parti dans le Matebeleland. Le ministre de lâInformation, Chen Chimutengwende, a qualifié les allégations du âStandardâ de âcomplètement faussesâ. Le bureau de la ZIANA à Bulawayo a cependant déclaré au MISA que le reportage du âStandardâ était véridique.
Le MISA rapporte par ailleurs que, le 21 juin, âquelque vingt agresseurs sâen sont pris, dans une ferme du sud du pays, à une voiture transportant quatre représentants de la presse étrangère sous les yeux mêmes des observateurs du Commonwealth venus suivre le déroulement des électionsâ. Les représentants de la presse étrangère nâont pas été blessés, mais on a fracassé les vitres de la voiture quâils avaient louée. Les attaquants, portant des vêtements orange, lâun dâeux ayant même un T-shirt du ZANU-PF au pouvoir, ont attaqué la voiture après quâune équipe de militants du Mouvement pour le changement démocratique eut distribué des feuilles volantes à la ferme.
Le MISA rapporte également que Sibusiso Ndlovu, photographe dâexpérience au quotidien âThe Chronicleâ de Bulawayo, qui appartient à lâÃtat, a été agressé par des gens que lâon soupçonne dâêtre des vétérans de la guerre dâindépendance et des partisans du ZANU-PF quand il a tenté de prendre des photos du groupe au moment où ils affrontaient des membres du ZAPU, un parti dâopposition.
Le CPJ rapporte que Chenjerai Hunzvi, qui mène actuellement une campagne en vue dâoccuper des fermes privées à titre de président de lâassociation des vétérans de la guerre de libération nationale, a averti le 6 juin le quotidien privé âDaily Newsâ de ârenoncer à publier des articles susceptibles de ternir son image et celle de son organisation, proche du parti au pouvoirâ. Hunzvi a également menacé de poursuivre le âDaily Newsâ, quâil accuse de profiter de la couverture soi-disant malveillante de ses activités. Le CPJ rapporte que trois jours plus tard, les vétérans de la ville de Kwekwe ont tenté de bloquer la distribution gratuite de publications indépendantes en agressant les camelots des journaux locaux. Ils ont saisi des exemplaires des journaux âThe Independentâ et âThe Daily Newsâ et les ont brûlés, sous prétexte quâils âinformaient mal les gensâ. Les agresseurs ont exigé que seul le quotidien âThe Heraldâ, qui appartient à lâÃtat, soit vendu dans les kiosques à journaux.
Le CPJ tient aussi à exprimer son inquiétude devant âle parti pris grossier en faveur du gouvernementâ affiché par la Zimbabwe Broadcasting Corporation (ZBC), propriété gouvernementale, qui détient le monopole de la radiodiffusion. Ces dernières semaines, le parti pris en faveur du ZANU-PF dans les médias dâÃtat a conduit la Cour suprême à émettre une ordonnance temporaire pour obliger la ZBC à couvrir lâactualité âde manière impartiale et sans discrimination en fonction de lâopinion politique, et sans empêcher les gens dâexercer leur droit de transmettre et de recevoir des idées et des informationsâ.
Entre-temps, le ministre de lâInformation, Chen Chimutengwende, a déclaré dans une entrevue accordée le 17 juin au cours de la principale émission dâaffaires publiques de ZBC que la libéralisation des ondes serait la première priorité du nouveau parlement. Dâaprès le MISA, le ministre a dit quâune fois quâon aurait adopté une nouvelle loi de libéralisation des ondes, on délivrerait des permis limités de diffusion, parce quâil ne serait pas possible dâémettre des permis sans restrictions. Le MISA rapporte quâau cours de cette entrevue, âle ministre sâen est pris à la nouvelle station de radio âCapital Radioâ, qui a commencé le 13 juin à diffuser vers le Zimbabwe à partir des Pays-Bas, disant quâelle cherchait à déstabiliser le paysâ. Il aurait aussi attaqué vivement le service des nouvelles internationales de la BBC et dâautres radiodiffuseurs internationaux, les accusant de âtenter de maintenir le Zimbabwe et le reste de lâAfrique australe dans leur sphère dâinfluenceâ.