Andrey Pachobut se rendait à Minsk pour une vidéoconférence sur la persécution des journalistes.
(RSF/IFEX) – Reporters sans frontières s’indigne de la nouvelle arrestation du correspondant de « Gazeta Wyborcza », Andrey Pachobut, le 6 avril 2011. Les quelques timides signes d’apaisement donnés par le pouvoir bélarusse ces derniers jours n’était donc que poudre aux yeux, dans l’intention d’amadouer la communauté internationale et d’inciter plusieurs pays à reprendre leur aide au Bélarus qui traverse une grave crise économique. Les journalistes ayant couvert les manifestations d’opposition du 19 décembre 2010, et même leurs proches, sont toujours harcelés par les forces de l’ordre et la justice.
Alors qu’il se rendait à Minsk pour une vidéoconférence sur la persécution des journalistes avec des députés du parlement européen, Andrey Pachobut a été une nouvelle fois rattrapé par la dictature. Sa voiture a été stoppée à Hrodna par des officiers de police qui l’ont conduit auprès du procureur de la région. Il a alors été informé de son interdiction de sortie de la ville, motivée par son inculpation pour insulte au Président. Le journaliste a malgré tout tenté de se rendre à Minsk, mais sa voiture a été de nouveau arrêtée, à une trentaine de kilomètres de Hrodna. Il a alors été emmené au centre de détention de la ville, où il est détenu depuis, pour une durée indéterminée.
Le journaliste avait déjà passé 15 jours en prison pour sa participation supposée aux manifestations du 19 décembre 2010 qu’il ne faisait que couvrir. Il est, depuis le 28 mars 2011, inculpé pour « insulte au président Loukachenko » pour différents articles parus dans « Gazeta Wyborcza » et sur Internet. Son appartement a été fouillé quelques jours plus tard par trois agents du KGB et son ordinateur confisqué comme « arme du crime ». Convoqué le 7 avril 2011, le journaliste avait demandé à ce que l’interrogatoire soit reporté. Il risque maintenant jusqu’à deux ans de camp de travail.
Signe du climat de peur régnant dans le pays, Natalia Radzina, journaliste du site http://www.charter97.org , qui encourt 15 ans de prison pour « organisation ou participation à une émeute », s’est quant à elle réfugiée à l’étranger. Après avoir reçu une convocation au KGB de Minsk, elle a quitté le pays, craignant son accusation définitive et son enfermement. La journaliste avait déjà passé plus d’un mois en prison après son arrestation le 19 décembre 2010. Reporters sans frontières est outrée par les pressions subies par les membres de la famille de la journaliste. Depuis sa fuite, certains d’entre eux ont été convoqués par le KGB et son père a reçu à son travail la visite musclée d’agents de sécurité. Le 6 avril 2011, la maison des parents de la journaliste a été fouillé. Les journaux de Natalia Radzina, des lettres de soutien ainsi que son ordinateur ont été confisqués.
Ces derniers jours pourtant, le gouvernement bélarusse avait donné quelques signes d’apaisement à l’égard des journalistes et de l’opposition en général, après la forte répression du 19 décembre 2010. L’un des dirigeants de l’opposition Anatol Lyebedzka a été libéré le 6 avril. Le ministre des Affaires étrangères avait notamment annoncé le 4 avril l’allègement des charges contre une dizaine d’opposants et Irina Khalip, reporter pour « Novaya Gazeta ». Son accusation pour « organisation ou participation à une émeute » a été requalifiée en « organisation et préparation de violations de l’ordre public ». Précédemment menacée de 15 ans de prison, la journaliste, assignée à résidence, n’encourt « plus que » 3 ans de détention si elle est jugée coupable. Une soixantaine d’opposants et personnalités de la société civile sont toujours poursuivis pour leur participation présumée aux manifestations de décembre 2010.