(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF, daté du 22 octobre 2000 : Affrontements israélo-palestiniens LES JOURNALISTES PRIS ENTRE DEUX FEUX Alors que le 21 octobre 2000, Jacques-Marie Bourget, de l’hebdomadaire français Paris-Match, a été grièvement blessé par balles à Ramallah, Reporters sans frontières (RSF) s’alarme des conditions de sécurité des journalistes à […]
(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF, daté du 22 octobre 2000 :
Affrontements israélo-palestiniens
LES JOURNALISTES PRIS ENTRE DEUX FEUX
Alors que le 21 octobre 2000, Jacques-Marie Bourget, de l’hebdomadaire français Paris-Match, a été grièvement blessé par balles à Ramallah, Reporters sans frontières (RSF) s’alarme des conditions de sécurité des journalistes à Gaza et en Cisjordanie. Depuis le début des affrontements, le 28 septembre 2000, les journalistes font, en effet, chaque jour, davantage l’objet d’attaques, de menaces et intimidations de la part des Israéliens (soldats ou civils) et des Palestiniens (policiers ou civils). RSF demande aux deux parties de mettre un terme à ces pressions et de garantir la sécurité des journalistes afin qu’ils puissent rendre compte librement de la situation. Dans ce conflit, les deux camps ont compris, depuis bien longtemps, que les images sont un enjeu pour s’attirer le soutien de l’opinion publique internationale. Robert Ménard, secrétaire général de RSF, a rappelé que ces violations de la liberté de la presse ne sont pas des pratiques nouvelles pour ces deux protagonistes. Ainsi RSF avait démontré, en octobre 1996, que la plupart des onze journalistes blessés par balles lors des affrontements liés à l’ouverture du tunnel sous l’esplanade des Mosquées, à Jérusalem, avaient été délibérement visés par les soldats israéliens. Et durant les cinq dernières années, plus de soixante-dix reporters ont été agressés par les forces de l’ordre israéliennes. De même, dans les territoires sous Autorité palestinienne, le pouvoir brutalise ou arrête régulièrement les journalistes qui osent critiquer sa politique. Depuis 1995, plus de cinquante reporters ont été interpellés et plus de vingt agressés par les différents services de sécurité palestiniens.
Depuis le 28 septembre 2000, au moins huit journalistes palestiniens ont été blessés par des tirs israéliens. Le 29 septembre, Khaled al-Zeghary, journaliste free-lance, Hazem Bader, cameraman de l’agence de presse AP, Mahfouz Abu-Turk, photographe freelance et Awad Awad, photographe de l’agence de presse AFP, sont blessés par des tirs israéliens à Jérusalem. Le 30 septembre, le cameraman de France 2, Talal Hassan Abu Rahma, filme en direct la mort d’un enfant palestinien, tué par des soldats israéliens. Ses images, qui font le tour du monde, ont un énorme impact sur la communauté internationale. Suite à cette diffusion, Charles Enderlin, le correspondant de France 2 à Jérusalem, reçoit des menaces de mort par téléphone. Selon lui, elles émanent « d’extrémistes juifs ». Le 1er octobre, à Hébron, le cameraman de la chaîne américaine ABC, Amer al-Jabari, touché à la tête par des tirs israéliens, est hospitalisé. Le 2 octobre, toujours à Hébron, des soldats israéliens tirent sur Mazen Da’na et Lu’ay Abu-Haikal, journalistes de l’agence de presse Reuters, et Wael al-Shiokhy, journaliste de la télévision locale Al-Nawras. Le 4 octobre, le photographe palestinien de l’agence israélienne Zoom 77, Atta Oweisat, est pris à partie et frappé à coups de matraque par des policiers israéliens alors qu’il couvre une manifestation de Palestiniens à Jabel Moukaber, près de Jérusalem. Il est conduit à l’hôpital. Le 12 octobre, lors de la riposte de Tsahal au lynchage de deux Israéliens à Ramallah, l’armée tire des roquettes sur l’antenne de la radio officielle palestinienne The Voice of Palestine.
Mais les journalistes doivent également faire face aux constantes pressions et menaces de la part des Palestiniens. Le 12 octobre, de nombreux journalistes se rendent sur les lieux du lynchage des deux Israéliens dans le commissariat de Ramallah. Les équipes de télévision filment la scène depuis l’extérieur. Des images, filmées par un cameraman de la chaîne privée italienne RTI, font, quelques heures plus tard, le tour du monde. Elles permettront, par ailleurs, aux autorités israéliennes d’identifier et d’interpeller des Palestiniens. Plusieurs équipes sont, ce jour-là, prises à partie par des Palestiniens, policiers ou civils, qui les brutalisent pour obtenir leurs cassettes vidéo et parfois même leur caméra. Ainsi, Bertrand Aguirre, correspondant de la chaîne française TF1, a été agressé par des Palestiniens après avoir filmé les lieux du drame. Le 16 octobre, dans une lettre adressée à l’Autorité palestinienne publiée dans un quotidien palestinien, El Hayat el Jadida, un journaliste de la chaîne publique italienne, Rai, Riccardo Christiano, tente de persuader les Palestiniens que ce n’est pas sa chaîne qui est l’auteur des images. Il reconnaît implicitement qu’il respecte les règles de censure de l’Autorité palestinienne : « Nous avons toujours respecté (et continuerons de le faire) les procédures journalistisques prévues par l’Autorité nationale palestinienne pour le travail en Palestine ». Suite aux événements de Ramallah, les policiers palestiniens ont accentué leur contrôle sur les journalistes. Ils leur demandent désormais de leur présenter, en plus de leur carte de presse, leur passeport.