Les militants du monde entier se réjouissent de la libération de la célèbre journaliste Azerbaïdjanaise Khadija Ismayilova. Toutefois, la bataille pour la liberté d'expression en Azerbaïdjan continue.
Après 537 jours d’emprisonnement injuste, Khadija Ismayilova est enfin libre.
Le 25 mai 2016, la Cour suprême de Bakou a ordonné la libération conditionnelle de Ismayilova et a transformé son emprisonnement ferme en une peine de prison avec sursis de trois ans et demi, selon Reuters.
La journaliste avait été initialement condamnée à sept ans et demi de prison pour des fausses accusations dont la fraude fiscale et le « détournement de fonds ». Outre la condamnation avec sursis de ce jour, le tribunal l’a également soumise à une interdiction de voyage ainsi qu’à d’autres restrictions.
« Nous sommes plus que soulagés que Khadija Ismayilova a été finalement libérée, mais tenons à souligner qu’elle ne devrait jamais avoir passé un seul jour en prison », a déclaré Gulnara Akhundova, la chef d’équipe de International Media support en Europe de l’est, dans le Caucase et l’Asie centrale (ECCA) dans une déclaration de la coalition Sport pour des Droits. « Nous appelons à l’abandon immédiat de toutes les restrictions lui imposées et à l’annulation de sa condamnation », a-t-elle ajouté.
Ismayilova est mondialement connue pour ses enquêtes rigoureuses qui mettent à nu la corruption au sein de l’élite dirigeante azerbaïdjanaise. Même avant son emprisonnement, Ismayilova a été menacée et harcelée pour son travail. En 2012, IFEX avait présenté son profil lors de sa campagne à la Journée internationale pour mettre fin à l’impunité, dans lequel son dévouement à dénoncer l’injustice – souvent dans des conditions hostiles – a été souligné.
Après l’emprisonnement de Ismayilova en décembre 2014, des journalistes du monde entier ont poursuivi ses enquêtes sur les allégations de corruption – dont un grand nombre ont été par la suite confirmées par les fuites connue sous le nom de Panama Papers. L’engagement tenace de Ismayilova à la libre expression lui a valu de nombreuses récompenses parmi lesquelles le Prix 2016 de la liberté de la presse UNESCO Guillermo Cano.
Les médias sociaux se sont enflammés aujourd’hui lorsque les défenseurs de la liberté de la presse ont eu connaissance de sa libération. Nombre d’entre eux ont posté des messages de soutien, des photos et des vidéos de la journaliste.
L’Institut pour la liberté et la sécurité des journalistes (IRFS) – une organisation membre de l’IFEX basée en Azerbaïdjan – ont célébré la libération de Ismayilova sur Twitter. IRFS a beaucoup plaidé pour la libération de Ismayilova. De même que de nombreux autres défenseurs des droits humains et des journalistes en Azerbaïdjan.
Can’t wait to see you back at work, @Khadija_Ismayil ! #panamapapers #FreeKhadija #F1Baku #F1 #EuroGp #Azerbaijan pic.twitter.com/wVl2t2G0y7
— IRFS Azerbaijan (@IRFS_Azerbaijan) May 25, 2016
D’autres membres de IFEX ont également été ravis d’apprendre la libération de Ismayilova. Cependant, cette joie a été tempérée par la répression continue des journalistes et des critiques du gouvernement azerbaïdjanais.
« Nous sommes ravis pour Khadija et sa famille, et heureux qu’elles puissent enfin être réunies », a déclaré Mark P. Lagon, président de Freedom House. « Beaucoup d’autres prisonniers politiques sont toujours derrière les barreaux, dont le journaliste Seymur Hazi, le blogueur Ilkin Rustamzada, l’activiste politique Ilgar Mammadov. Ils devraient être tous immédiatement libérés, si l’engagement du gouvernement pour les droits de l’homme est authentique ».
Nina Ognianova, coordinatrice pour l’Europe et l’Asie centrale du Comité pour la protection des journalistes, a noté que « la décision d’aujourd’hui ordonnant la libération de Khadija Ismayilova est un motif de célébration, mais ne fait pas disparaître le degré d’injustice de son emprisonnement pendant un an et demi pour des raisons de rétorsion ».
Ce sentiment a été repris par Steven M. Ellis, directeur du plaidoyer et des communications de l’Institut international de la presse. « Même si nous sommes déçus que Mme Ismayilova ne soit libérée que sous condition et ne soit pas entièrement acquittée de toutes les charges, nous sommes heureux de savoir qu’elle va quitter la prison et nous exhortons les autorités à accélérer sa libération », a déclaré Ellis.
D’autres membres de IFEX, dont Reporters sans frontières et la Fédération internationale des journalistes, ont également fait des déclarations saluant la libération de Ismayilova.
Avant les nouvelles de sa libération, la Coalition de Sport pour des Droits a organisé une action mondiale pour marquer son 40e anniversaire le 27 mai 2016, dans 40 villes à travers le monde. Ces rassemblements vont se poursuivre, et les participants vont célébrer la libération de Ismayilova, appelant à son acquittement pur et simple et à la libération des douzaines de prisonniers politiques Azerbaïdjanais restants.
Rebecca Vincent, coordonnatrice de Sport pour des Droits, note qu’ « à l’occasion de sa libération, nous faisons écho de l’appel de Khadija de ne pas nous concentrer uniquement sur son cas, mais d’exiger la libération de tous les prisonniers politiques et des mesures concrètes pour faire face à la corruption endémique et aux abus des droits humains en Azerbaïdjan pour lesquels Khadija s’est tant sacrifiée ».