Tania Bruguera est une artiste-plasticienne internationalement reconnue dont le travail remet en cause les autorités cubaines. Elle est souvent étiquetée 'contre-révolutionnaire', elle a également été arrêtée et harcelée à maintes reprises.
Dans une interview avec la bloggeuse cubaine Yoani Sánchez, Tania décrit son travail : Je crée des œuvres qui s’approprient les outils des politiques pour essayer de créer des instants politiques, des œuvres à travers lesquelles chacun peut parler directement au pouvoir et ceci dans son propre langage.
Tania Bruguera est une artiste internationalement reconnue dont le travail remet en cause les autorités à Cuba en utilisant un mélange unique entre manifestation publique et performance artistique. Pour ses œuvres, elle a souvent été qualifiée de contre-révolutionnaire, arrêtée et harcelée à maintes reprises.
Tania Bruguera, qui vit à la fois à Cuba et aux États-Unis, est décrite par le Guardian comme « l’une des plus célèbres artistes plasticiennes du monde [ayant] construit une carrière sur des œuvres souvent controversées qui examinent le pouvoir et le contrôle, confrontant les mécanismes politiques et l’histoire de Cuba ». Son œuvre la plus célèbre est une performance réalisée à la Biennale de la Havane en 2009 intitulée « Le soupir de Tatlin n°6 » (en référence à l’artiste d’avant-garde Vladimir Tatlin). Pour cette performance, elle avait installé une scène où des orateurs, d’autres artistes et activistes, disposaient « d’une minute libre de toute censure ». Au cours de l’évènement, flanqué par des personnages en uniforme, les orateurs ont pris place sur scène l’un après l’autre lisant à haute voix leurs déclarations, souvent acclamés par l’auditoire. Une colombe blanche était libérée après chaque discours. Étrangement, malgré la force des opinions exprimées pendant les 40 minutes de l’évènement, aucun incident n’a été déclaré.
En décembre 2014, de retour à la Havane et suite à l’annonce de la reprise des relations entre Cuba et les États-Unis, elle annonce qu’elle souhaite recréer sur scène Le soupir de Tatlin n°6 sous le nom #YoTambienExijo (#J’exigeaussi) sur la Place de la Révolution de la Havane le 31 décembre. Comme pour la performance précédente, des gens seraient invités à monter avec un microphone sur une simple scène et réagiraient en toute liberté à l’annonce de la nouvelle. Cependant, la nuit précédant l’évènement, la police arrive à son domicile, l’arrête et la met en garde contre la tenue de l’évènement. Par la suite, elle est brièvement mise en détention à deux reprises au moins et son passeport est confisqué. Elle est informée qu’il ne lui serait rendu que si elle promet de ne jamais revenir à Cuba.
Accusée d’incitation au trouble de l’ordre public, Tania Bruguera continue de mettre en scène des manifestations et travaille sur de nouvelles œuvres. En mai 2015 elle est rapidement arrêtée après la mise en scène ; à son domicile, d’une lecture de 100 heures [des] Origines du Totalitarisme de la philosophe Hannah Arendt. Informée par la police qu’elle ne recevra pas d’autorisation pour réaliser son œuvre dans la rue, elle les met au pied du mur en obtenant un permis en tant que professeur, l’autorisant à donner des lectures en intérieur. Elle joue en lisant les fenêtres ouvertes et en utilisant un haut-parleur pour être entendue depuis l’extérieur.
Témoin de l’évènement, le critique d’art cubain Gerardo Mosquera, a écrit pour le site internet Walker Art, la façon dont, de manière presque comique, un groupe d’ouvriers est arrivé à l’extérieur de son domicile pour réaliser des travaux soi-disant non programmés, couvrant ainsi la lecture. En juin 2015 Bruguera a raconté sur sa page Facebook #YoTambienExijo comment elle a été arrêtée et menottée par la police alors qu’elle et d’autres personnes sont évacuées de force d’une manifestation ‘Ladies in White’, manifestations organisées chaque dimanche à la Havane par les familles des prisonniers politiques. Elle déclare qu’elle y participait dans le cadre d’un projet de recherche sur la liberté d’expression dans les espaces publiques.
En juillet 2015, alors que la date de reprise des relations entre Cuba et les Etats-Unis approchait, le passeport de Tania Bruguera lui est rendu. En août, les charges qui étaient retenues contre elles sont abandonnées et on lui assure qu’elle sera autorisée à revenir à Cuba. Bruguera part ensuite pour New York pour assurer une résidence inhabituelle auprès du Bureau de l’immigration de la Mairie, où elle aidera au recrutement d’immigrés sans papier pour le nouveau système municipal de carte d’identification ; IDNYC, un projet qui amène les points de vue des artistes dans les processus de décision de la ville.