La directrice de l'IFEX , Annie Game, revient sur quatre années de lutte contre l’impunité et présente la nouvelle stratégie de la campagne Non à l’impunité.
L’impunité a toujours constitué une priorité pour les membres de l’IFEX. Ceci est alimenté non seulement par les statistiques macabres des journalistes menacés, attaqués et assassinés chaque année dans l’exercice de leur fonction, mais aussi par le fait que les auteurs de ces crimes ne sont jamais inquiétés par la justice. Beaucoup de temps, de ressources et de bonne volonté sont consacrés à combattre cette tendance alarmante. Les membres de l’IFEX consacrent d’importantes ressources humaines et financières, pour assurer le suivi des affaires concernant l’impunité; effectuer les recherches nécessaires; monter des rapports; mobiliser un soutien juridique et travailler avec les survivants, les familles et les collègues qui sont souvent terrifiés ou endeuillés.
Et ces activités sont un cercle sans fin.
Il y a quatre ans, le 23 novembre 2011, nous avons lancé notre première campagne pour la Journée internationale contre l’impunité à l’aide de lettres, de pétitions, de protestations et des réseaux sociaux. Nous avons cherché à sensibiliser les gouvernements et le public sur les nombreux aspects néfastes de l’impunité. Nous avons établi des liens entre l’impunité pour les crimes contre la liberté d’expression et son coût intrinsèques en matière de dégradation de la qualité de l’information et de l’augmentation de la censure concernant les puissants et les corrompus; de son effet dissuasif qui se propage dans la société puisque beaucoup ont peur de s’exprimer ou préfère s’autocensurer; et de son effet d’entraînement suscité par l’absence de sanctions, qui favorise très largement la recrudescence de la violence.
Nous avons appris énormément au fur et à mesure que la campagne a pris de l’ampleur. Avec la participation d’un nombre toujours plus important de nos membres, nous avons élargi notre vision à toutes les personnes exerçant leur droit à la libre expression.
Ces efforts impressionnants déployés pour une journée d’action en valent la peine, mais nous savons que notre travail pour lutter contre l’impunité doit être intensifié : il doit être aussi implacable que les transgressions contre ceux ciblés pour avoir pris la parole. Nous devons continuer à interpeller les criminels.
Focaliser l’attention sur le 2 novembre, Journée internationale des Nations Unies de la fin de l’impunité pour les crimes commis contre des journalistes, au cours des cinq prochaines années, permettra de constituer un des points de ralliement essentiels de notre prochaine campagne Non à l’impunité.
Dans le cadre de nos efforts, nous utiliserons le rapport de la directrice générale de l’UNESCO pour cibler directement les États membres dans lesquels l’impunité se produit, et nous diffuserons leur réponse le plus largement possible et les obligerons à passer à l’action et à poursuivre ceux qui agissent en toute impunité. Le processus peut être long et compliqué pour les affaires individuelles et il requiert des fonds, une grande détermination et un profond engagement de celles et ceux qui demandent justice. Au cours des cinq prochaines années, nous suivrons ces cas spécifiques, afin de déterminer l’impact humain de l’impunité et le chemin sinueux vers la justice.
Dire Non à l’impunité est une demande simple avec de nombreuses implications, car c’est aussi dire Non à l’amnistie pour les criminels, Non à la corruption de l’appareil judiciaire et Non aux délais injustifiables de la justice. Non à l’impunité, le nouveau nom de notre campagne, marque également le commencement d’une nouvelle histoire, dans laquelle le réseau de l’IFEX conteste les actions des criminels et des catalyseurs de la culture de l’impunité. L’impunité est une forme d’intimidation. Mais chaque victoire, indépendamment de son importance, sera un avertissement et permettra de changer progressivement les règles du jeu et ses conséquences, tant pour les auteurs que les gouvernements, et aidera probablement les victimes à tourner la page.
Nombreux sont ceux qui ont un intérêt à ce que l’impunité persiste. Mais grâce aux efforts et actions de la campagne Non à l’impunité, le nombre de citoyens, d’organisations et de gouvernements qui s’engagent à mettre fin à l’impunité ne cesse de croître.
Que pouvez-vous faire? Soyez des nôtres le 2 novembre. Restez informé en visitant notre site Internet et en reléguant nos actions sur les réseaux sociaux pendant que nous combattrons les commanditaires de ces crimes dans les années à venir. Ensemble, nous pouvons veiller à ce que chaque citoyen et journaliste qui exerce son droit à la liberté d’expression puisse le faire en toute liberté et en sachant que le monde tiendra pour responsable ceux qui cherchent à le faire taire.