Nous rendons hommage à la bravoure des journalistes qui affrontent les obstacles avec détermination et à leur ingéniosité à les contourner. Mais les journalistes ne peuvent pas et ne doivent pas être la seule ligne de défense de la liberté.
Voyez toute la couverture de l’IFEX sur la Journée mondiale de la liberté de la presse 2015
Un documentaire récent sur le circuit des festivals de films rend hommage à la culture vibrante de récupération et de préservation qui prospère à Madagascar depuis la crise économique mondiale. Le film, Ady Gasy, tire son nom d’une expression populaire malgache signifiant « Trouver un moyen » en référence à l’esprit de débrouillardise et à l’ingéniosité qui sont au cœur même de cette culture de l’autosuffisance.
Dans un climat d’insécurité croissante, à la fois physique et financière, les journalistes, aussi, sont devenus très habiles à trouver un moyen. Trouver un moyen de réduire leur vulnérabilité. Trouver un moyen de contourner les censeurs afin de publier des documents sensibles. Trouver un moyen de publier des reportages lorsque les gouvernements contrôlent l’accès au papier, aux imprimeries ou aux réseaux de distribution. Trouver un moyen de contourner les pare-feu pour accéder à l’information.
Le thème de la Journée mondiale de la liberté de la presse de cette année, « Laissez le journalisme prospérer », nous invite à réfléchir aux éléments nécessaires pour soutenir une presse en bonne santé, libre et indépendante. Une société civile dynamique qui défend et promeut ces libertés est un élément fondamental. Des organisations comme celles qui constituent le réseau de l’IFEX donnent une voix aux travailleurs des médias vulnérables à travers le monde en dénonçant les violations de la libre expression et en ralliant les appels internationaux à la justice.
Toutefois, même avec l’appui de réseaux comme celui-ci, comment une presse libre peut-elle s’épanouir dans un environnement autocratique, corrompu, et économiquement difficile?
Dans un environnement si peu propice, le journalisme doit sa survie notamment à la débrouillardise et l’ingéniosité des journalistes eux-mêmes.
Les journalistes exploitent les failles du système pour garder une longueur d’avance sur ceux qui cherchent à les réduire au silence. Que ce soit pour contourner la censure, les obstacles à l’accès à l’information, ou les lois mises en place pour protéger les corrompus, les personnes qui enquêtent et partagent l’information pour l’intérêt public se doivent de rester aux vigilants. Leur créativité surpasse le simple sens de la formule, et leurs actions les exposent souvent à des risques considérables.
Ces personnes sont admirables, courageuses et parfois véritablement impressionnantes, mais le fondement de la liberté de la presse ne peut pas reposer sur leurs épaules. Elles ne peuvent pas être le substitut de systèmes robustes propices au développement d’une presse libre. Le climat dans lequel une presse libre peut vraiment se développer est un climat où nous tous – les gens ordinaires – pouvons faire notre travail.
Donc, lors de la Journée mondiale de la liberté de presse, honorons le courage, l’ingéniosité et la résistance de ces journalistes qui dans le monde entier continuent de trouver un moyen pour nous apporter des reportages indispensables. Il est important de reconnaître les efforts courageux des défenseurs des droits de la personne et de la liberté de la presse qui les soutiennent. Mais nous devons également offrir au journalisme un environnement dans lequel il peut prospérer sans compter sur des héros et des héroïnes, et sans créer tant de martyrs pour la cause. Nous leur devons bien cela.