Afin de dissimuler la violence destructrice des manifestations anti-gouvernementales du 12 février 2014, le gouvernement Maduro menace les médias qui osent dévier de la ligne officielle, et en a même retiré au moins un des ondes.
Au lendemain de protestations pacifiques organisées pour demander au gouvernement de permettre aux journaux d’importer du papier-journal, la violence a éclaté, attisée par les manifestations contre le gouvernement du Président Maduro du Venezuela. Ces manifestations, dont les étudiants ont été les initiateurs dans tout le pays, ont pris fin le 12 février après avoir fait trois morts et une soixantaine de blessés chez les manifestants. Selon un dossier de Human Rights Watch, ces manifestations avaient été organisées en réaction à la détention d’étudiants arrêtés lors de marches précédentes.
Le groupe local membre de l’IFEX, Espacio Público, rapporte qu’en plus de la mort de manifestants et de la violence croissante, des manifestants ont aussi été détenus tandis que certains journalistes se sont fait confisquer leur matériel dans les affrontements avec les forces de sécurité. À Caracas, deux personnes ont été tuées dans la foule qui s’était rassemblée près du bureau du Procureur public. Le troisième manifestant a été tué plus tard le même jour à Chacao.
Le gouvernement a par la suite attribué à l’opposition la mort des manifestants et les destructions. Le 12 février, un juge a émis un mandat d’arrestation contre le dirigeant d’opposition Leopoldo López, accusé d’être la « cause de graves blessures, d’intimidation publique, d’incendie d’un édifice public et de dommages à la propriété publique », selon ce que rapporte Human Rights Watch.
Dans son allocution nationale « cadena » du 13 février à la radio et à la télévision nationales, le Président Maduro a déclaré au pays que les manifestations n’avaient qu’un objectif, qui était de « détruire le Venezuela, s’emparer du pays et de ses richesses naturelles, et détruire la belle expérience de révolution socialiste dans la paix et la démocratie ».
Les médias sont pris entre deux feux, littéralement, comme dans le cas du caméraman Jilfredo Alejandro Barrada, qui a reçu une balle dans la jambe à Mérida, et sur le plan judiciaire, les autorités menaçant d’intenter des poursuites contre les médias qui couvrent la violence. L’Instituto Prensa y Sociedad Venezuela (IPYS-Venezuela) rapporte que, le 11 février, la Commission nationale des télécommunications (CONATEL) a mis en garde la presse qu’agir de la sorte contreviendrait à l’Article 27 de la Loi sur la responsabilité sociale à la radio et à la télévision (connue sous le nom de Ley Resorte), qui interdit la radiodiffusion de propos haineux et de violences, ainsi que de troubler l’ordre public.
La CONATEL a invoqué l’Article 27 dans le passé pour pénaliser l’ancienne chaîne de télévision d’opposition Globovisión après la diffusion en janvier 2013 d’un reportage dans lequel on remettait en question l’interprétation des règles concernant la prestation du serment d’office du président-élu. À l’époque, Hugo Chávez recevait à Cuba des traitements contre le cancer auquel il allait finir par succomber en mars 2013.
Les radiodiffuseurs d’État et ceux qui sont alliés au gouvernement n’ont tenu aucun compte des manifestations, et ont plutôt retransmis des émissions de divertissement.
Ne se contentant pas de faire taire les médias du Venezuela, le gouvernement a retiré des ondes NTN24, une station de nouvelles colombienne, après qu’elle eut retransmis la couverture des manifestations anti-gouvernementales. Selon une déclaration du Comité pour la protection des journalistes, la chaîne NTN24 a constaté qu’elle n’était plus diffusée au Venezuela après que CONATEL eut ordonné aux deux câblodistributeurs qui offraient NTN24, DirecTV et Movistar, d’interrompre le service. D’après Espacio Público, Maduro a assumé la responsabilité de cette décision, ajoutant que l’État allait continuer à défendre « le droit à la paix au Venezuela », sans doute en guise d’avertissement aux autres médias qui se montrent critiques à l’égard de son gouvernement.
La tension reste vive, le président ayant appelé ses partisans à marcher le 15 février « pour la paix et contre le fascisme ». Deux jours après les manifestations, les groupes de défense des droits demandent la tenue d’une enquête sur les violences et la fin de la censure par Maduro des médias qui dévient de la ligne officielle.