La première chose importante à noter est que, bien qu'appelées « procédures », ce sont, en fait, des personnes. La seconde chose importante c'est ce qui les rend spéciales. Ce groupe d'experts indépendants surveille et signale les violations des droits humains et conseille les Nations Unies sur leur protection.
Ceci fait partie d'une série de guides de l'IFEX visant à renforcer les capacités de la société civile à s'engager dans des espaces mondiaux pour la défense de la liberté d'expression. Pour visiter la page du hub et voir le tout, cliquez ici.1. Quelles sont -et qui sont- les procédures spéciales de l’ONU?
Le système des procédures spéciales est un élément central du mécanisme des droits humains de l’ONU. Il comprend des spécialistes indépendants – souvent appelés rapporteurs spéciaux – et des groupes de travail d’experts chargés de surveiller et de signaler les violations des droits humains et de conseiller l’ONU et ses États membres sur la manière de les protéger.
En décembre 2017, il y avait 44 personnes et commissions thématiques de groupes d’experts et 12 pour des pays spécifiques, y compris un Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression.
Nous les désignerons tous ici en tant que titulaires de mandat de l’ONU.
Leur rôle exige qu’ils soient indépendants de l’ONU. Leurs recommandations ne sont pas des déclarations officielles de l’ONU, mais leurs propres points de vue. Ils ne reçoivent pas de salaire de l’ONU, bien qu’ils reçoivent un soutien personnel et logistique du bureau du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) à Genève. Les titulaires de mandat de l’ONU sont guidés par le Manuel des procédures spéciales et le Code de conduite des titulaires de mandat pour des procédures spéciales.
2. Que font-ils?
Les titulaires de mandat de l’ONU disposent d’un certain nombre d’outils en matière de surveillance, de rapportage et de conseil en matière de droits humains.
• Ils écoutent – et demandent de mesures de suivi. Les titulaires de mandat de l’ONU reçoivent des communications de divers acteurs – généralement des groupes de la société civile – sur des allégations de violations des droits humains qui ont déjà eu lieu, sont en cours ou qui présentent un risque élevé de se produire. Le titulaire du mandat envoie une lettre d’allégation à l’État concerné et peut demander des mesures de suivi. Dans ces lettres, les gouvernements peuvent être invités à prendre d’urgence des mesures préventives ou de protection. La décision d’intervenir tient généralement compte de la fiabilité de la source et de la crédibilité des informations reçues, des détails fournis, ainsi que de la question de savoir si cela relève de la sphère du titulaire du mandat.
o Les lignes directrices pour la soumission de communications sont disponibles ici: http://www.ohchr.org/EN/HRBodies/SP/Pages/Communications.aspx
o Les rapports annuels résumant les communications envoyées et les réponses reçues des États peuvent être consultés ici: http://www.ohchr.org/EN/HRBodies/SP/Pages/CommunicationsreportsSP.aspx
• Ils effectuent des visites officielles dans le pays. L’objectif de ces visites est d’évaluer la situation des droits humains au niveau national et local. Ces visites peuvent être effectuées avec d’autres titulaires de mandat de l’ONU et avec des titulaires de mandats régionaux.
o Une demande de visite d’un pays devrait être adressée aux gouvernements et acceptée par eux. Généralement, les experts n’effectuent pas plus de deux visites officielles par an, en partie à cause du manque de moyens.
o La liste des visites officielles depuis 1998, y compris les rapports de mission, la liste des voyages à venir ainsi que les invitations permanentes peuvent être trouvées ici: http://spinternet.ohchr.org/_Layouts/SpecialProceduresInternet/ViewCountryVisits.aspx?Lang=fr
• Ils effectuent également des visites informelles. Celles-ci ont tendance à suivre les invitations d’institutions académiques, d’ONG ou d’autres groupes, pour assister à un événement spécifique. Ces voyages, même s’ils ne sont pas considérés comme officiels, peuvent être l’occasion de rencontrer des personnes et des groupes pertinents, et parfois avec des représentants du gouvernement. Souvent, les informations recueillies au cours de ces voyages informels peuvent être trouvées dans les rapports annuels des titulaires de mandat (voir ci-dessous).
• Ils produisent des rapports. Les rapports annuels sont soumis au Conseil des droits humains (CDH) et, pour la plupart des titulaires de mandat, un autre rapport annuel est présenté à l’Assemblée générale des Nations Unies (AGNU). Ces rapports sont essentiels car ils analysent les défis et les tendances actuels en matière de droits humains; dans de nombreux cas, ils se concentrent sur un domaine d’une thématique spécifique. Ces rapports sont en outre importants car ils font des recommandations à un large éventail d’acteurs divers, tels que les États, les groupes de la société civile et l’ONU elle-même.
o Les rapports annuels peuvent être consultés sur chacune des pages des titulaires des mandats spéciaux:
http://www.ohchr.org/EN/HRBodies/SP/Pages/Introduction.aspx
• Ils sensibilisent le public en publiant des communiqués de presse et des déclarations. Celles-ci sont publiées régulièrement par les titulaires de mandats spéciaux.
o Les communiqués de presse peuvent être consultés ici.
3. Quels sont les titulaires de mandats les plus importants pour le droit à la liberté d’expression?
Il existe notamment un Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression.
• Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression
« Le Rapporteur spécial sur la liberté d’opinion et d’expression est chargé de recueillir des informations pertinentes et de donner des conseils sur les violations du droit à la liberté d’expression, la discrimination, les menaces ou le recours à la violence, le harcèlement, la persécution ou l’intimidation dirigée contre des personnes qui cherchent à exercer ou à promouvoir l’exercice du droit à la liberté d’opinion et d’expression, y compris, en priorité, contre les journalistes ou autres professionnels du domaine de l’information ».
Mais parmi les 56 experts et groupes de travail, il y en a d’autres dont les mandats recoupent ou soutiennent ces droits. Par exemple, le rapport de 2012 du Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits humains a mis particulièrement l’accent sur les journalistes et le rapport de 2012 du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires était centré sur la protection de la vie des journalistes. Le rapport de 2018 du Rapporteur spécial sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences porte sur le harcèlement en ligne contre les femmes.
Voici une liste des titulaires de mandats:
• Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits humains
• Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et d’association
• Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction
• Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée
• Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires
• Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
• Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats
• Rapporteur Spécial chargé de la question de la violence contre les femmes, ses causes et conséquences
• Expert indépendant sur la protection contre la violence et la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre
• Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits humains et des libertés fondamentales dans la lutte contre le terrorisme
• Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels
• Groupe de travail sur les détentions arbitraires
• Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires
4. Comment pouvez-vous collaborer avec eux? 10 conseils:
1. Partager des informations avec eux sur une base régulière.
2. Soumettre des communications et des allégations spécifiques sur les violations des droits de l’homme et leur suivi. Pensez aux 5 questions (qui, quoi, où, quand et pourquoi) et indiquez si vous avez l’accord des victimes pour rendre leur nom public. Vous pouvez envoyer des informations sur un cas à tous les titulaires de mandat concernés.
3. Encourager votre gouvernement à inviter les titulaires de mandats à se rendre dans votre pays ou à accepter une invitation permanente.
4. Leur apporter un soutien lors des visites dans les pays; élaborer des plans d’action et des activités pour assurer le suivi des travaux entrepris lors d’une visite de pays. (Les informations sur les visites à venir sont publiées sur la page Web de chaque titulaire de mandat.)
5. Contribuer aux rapports annuels et thématiques publiés par les titulaires de mandats. (Les appels à contributions sont annoncés sur la page Web de chaque titulaire de mandat.)
6. Aider à diffuser le travail et les résultats inclus dans leurs rapports; aussi les utiliser si vous vous engagez dans d’autres processus de l’ONU, tels que l’Examen périodique universel, le Comité des droits humains et autres.
7. Travailler avec votre gouvernement et d’autres acteurs pour encourager la mise en œuvre des recommandations; monter des campagnes pour plaider en faveur de leur réalisation.
8. Surveiller les mesures que votre gouvernement a prises (ou non) pour donner suite aux recommandations et tenir le titulaire du mandat au courant des progrès de l’État.
9. Assister à la réunion annuelle des titulaires de mandats spéciaux qui a lieu en juin à Genève pour échanger des vues avec les États, les organes conventionnels des droits humains, les ONG et autres acteurs de la société civile et les représentants du Secrétariat de l’ONU.
10. Ne pas hésiter à les contacter! Les détails des contacts peuvent être trouvés sur leurs pages
Web: http://www.ohchr.org/EN/HRBodies/SP/Pages/Welcomepage.aspx
Une dernière chose …
Les organisations régionales ont également des rapporteurs sur la liberté d’expression avec des rôles similaires au niveau régional. Consultez leurs sites Web à la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, à la Commission interaméricaine des droits humains et à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Tous ces rapporteurs présentent des déclarations conjointes annuelles avec les titulaires de mandat de l’ONU sur des sujets de préoccupation concernant le droit à la liberté d’expression.
Ressources
• « Travailler avec le Programme des Nations Unies pour les droits humains: Un manuel pour la société civile. Chapitre IV » (2008). OHCHR
• « Signaler des violations des droits humains aux procédures spéciales des Nations Unies: Guide d’introduction » (2011). CIVICUS
• « Procédures spéciales des droits humains: déterminants de l’influence » (2014). Marc Limon et Ted Piccone. Groupe des droits universels. Brookings Institution
• « Catalyseurs des droits: les contributions uniques des experts indépendants des Nations Unies sur les droits humains » (2010). Ted Piccone. Brookings Institution
• « Engager des procédures spéciales de l’ONU pour faire progresser les droits humains à la maison: un guide des défenseurs américains » (2015). Université de Columbia