(RSF/IFEX) – In France, since January 1998, at least twelve journalists have been questioned in connection with demonstrations of support for “foreigners without proper papers” (“sans-papiers”) and operations to escort such people to the border. Ten of these journalists have been photographers or cameramen. In 1997, three photographers were manhandled and questioned by police officers […]
(RSF/IFEX) – In France, since January 1998, at least twelve journalists have
been questioned in connection with demonstrations of support for “foreigners
without proper papers” (“sans-papiers”) and operations to escort such people
to the border. Ten of these journalists have been photographers or
cameramen. In 1997, three photographers were manhandled and questioned by
police officers in similar circumstances.
**For background information see IFEX alerts of 24 June and 3 April 1998**
Since the events of the summer of 1997 near the Saint-Bernard church, where
numerous “sans-papiers” on a hunger strike were removed by force by police,
the French authorities appear to be afraid of the impact of such images on
public opinion. They are now placing limitations on the work of
photographers during these types of demonstrations. The photographers are
more often questioned or roughed up by police, and their cameras are often
confiscated under various pretexts.
RSF has prepared a report which brings together the testimony of
photographers who have been victims of questioning and seizures of equipment
by the police since the beginning of 1998. See the full text of the report
below (available here only in French).
Depuis les événements de l’été 1997 autour de l’église Saint-Bernard où de
nombreux “sans-papiers” en grève de la faim avaient été expulsés de force
par la police, les autorités françaises semblent craindre l’impact des
images sur l’opinion publique. Ils mettent donc désormais des entraves au
travail des photographes lors de ce type de manifestations. Ces derniers
sont de plus en plus fréquemment interpellés, voire brutalisés, par les
forces de l’ordre. Leur matériel, camera ou appareil photo, est souvent
confisqué sous divers prétextes : “droit à l’image” des fonctionnaires de
police, zone frontière ou de “haute sécurité”, élément de preuve, etc. Les
pellicules saisies ne sont que rarement restituées.
Ce rapport rassemble le témoignage de photographes victimes
d’interpellations et de saisies de matériel par la police depuis le début de
l’année.
Port de Marseille, 25 février 1998
Ãric Colomer et Jean-Baptiste Rivoire, respectivement journaliste et
cameraman de l’agence CAPA, sont arrêtés et empêchés de filmer dans le port
autonome de Marseille. Il leur est dit que le port est “interdit d’accès
tous les mardis à cause du départ du Napoléon vers Alger”. Ces journalistes
risquent une amende pour avoir tourné sans autorisation. Ils sont gardés
deux heures au commissariat, après contrôle de leur carte de presse. Les
policiers exigent de garder la caméra.
Jean-Baptiste Rivoire témoigne : “Les policiers voulaient visionner nos
cassettes prétextant que nous avions filmé le dispositif de sécurité. J’ai
refusé en arguant que ce visionnage était illégal. Ils ont alors déclaré
qu’ils garderaient la caméra, l’affaire étant entre les mains du parquet.
J’ai téléphoné à mon rédacteur en chef, Christophe Barreyre de Canal+, qui a
saisi le directeur du cabinet du préfet des Bouches du Rhône. Il également
prévenu les autorités que si nous n’étions pas relâchés, notre témoignage
serait diffusé par Canal+ dans l’émission “Le vrai journal” de Karl Zéro.
Nous avons été rapidement libérés et avons pu conserver nos cassettes.”
Marseille-Alger sur le Napoléon, 30 mars 1998
Bertrand Houard, journaliste indépendant et Wilfrid Esteve, photographe de
l’association L’âil public, sont menacés et intimidés par des policiers en
civil et des agents de sécurité de la Société nationale Corse Méditerrannée
(SNCM) sur le ferry assurant la liaison Marseille-Alger. Leur cabine est
fouillée et leurs pellicules saisies. Ils sont interpellés à leur descente à
Marseille.
Wilfrid Esteve et Bertrand Houard témoignent : “Pour pouvoir effectuer un
reportage sur les conditions de retour des Algériens, nous avons embarqué
comme simples passagers sur le ferry assurant la liaison Marseille-Alger. Le
bateau, appartenant à une ligne commerciale, sert également pour l’expulsion
de personnes en situation irrégulière et de délinquants frappés de la
“double peine”. Le dispositif de sécurité était impressionnant et
quelque peu disproportionné : nombreux policiers, CRS et militaires pour
escorter six expulsés sur les quelques 150 passagers réguliers. Dès que nous
avons posé le pied sur le ferry, la sécurité du bateau a voulu saisir notre
appareil photo : “Pas de ça ici! Nous vous le rendrons à Alger.”
“Durant la traversée, nous avons pu nous entretenir avec des passagers et
prendre quelques photos. Mais nous avons été repérés par des policiers en
civil et des vigiles de la SNCM. Interrogés par le commandant de bord en
présence de policiers, nous avons décliné notre qualité de journaliste. Cela
a provoqué un vent de panique et les policiers nous ont dit qu’ils devaient
avertir leurs supérieurs. Nous avons alors été confinés dans notre cabine
qui avait été fouillée pendant que nous prenions notre repas. Nous avons été
réveillés en pleine nuit par le commandant de bord qui nous a sommés de lui
remettre nos pellicules prétextant que nous avions pris des clichés sur un
navire de “haute sécurité”. Devant notre refus, les policiers sont revenus à
plusieurs reprises durant la nuit en nous menaçant de poursuites
judiciaires.
A notre retour à Marseille, nous avons été accueillis par le Directeur
général de la Police des airs et des frontières (PAF) et conduits au
commissariat. Il a menacé de nous déferrer immédiatement devant le parquet
si nous ne lui remettions pas les pellicules des photos prises sur le ferry.
Au nom de quoi ? avons-nous demandé. La réponse restait la même :
“navire sous haute sécurité”. Nous lui avons demandé de dresser un
procès-verbal et de nous signifier par écrit le motif de notre
interpellation et le chef exact de l’inculpation. Cela n’a pas été fait car
il n’y avait aucune justification légale à notre interpellation, encore
moins à la saisie de nos pellicules : nous étions sur une ligne commerciale
et n’avions commis aucun “délit”, à part celui de prendre des photos. Nous
avons été de nouveau menacés et intimidés par les policiers. Dès que nous
leur avons remis nos pellicules, nous avons été relâchés. Nous avons exigé
un reçu pour nos pellicules et une trace écrite de notre interpellation –
rien n’a été fait et, à ce jour, nous n’avons toujours pas récupéré nos
pellicules. Le commissaire Legrand, qui nous a interrogés, nous a par contre
discrètement conseillé de ne plus remettre les pieds à Marseille.
De retour en ville, nous croyons avoir été suivis et notre chambre d’hôtel a
été fouillée. Le reportage que nous avons publié dans le quotidien
Libération, le 20 avril, comporte des photographies dont nous avons réussi à
cacher les pellicules.
Aéroport de Roissy, 1er avril 1998
Dans la matinée, Diane Grimonet et Francine Bajande, photographes de presse
travaillant respectivement pour les quotidiens français Libération et
l’Humanité, sont interpellées alors qu’elles couvrent une manifestation
contre des expulsions par avion de personnes en situation irrégulière. Bien
qu’elles aient montré leur carte de presse lors du contrôle d’identité, les
deux reporters sont interpellées avec les manifestants et conduites dans
les locaux de la Direction du contrôle de l’immigration. Les deux
photographes ont été relâchées trois heures plus tard.
Diane Grimonet témoigne : “Je me suis rendue dans la matinée à l’aéroport
Charles de Gaulle afin d’effectuer un reportage photographique pour le
quotidien Libération sur une manifestation d’opposants au renvoi des
“sans-papiers”. Dès mon arrivée sur les lieux, devant le comptoir de départ
du vol Paris-Bamako, j’ai vu des militants qui distribuaient des tracts aux
passagers pour les informer qu’il y avait un ou plusieurs “sans-papiers”
expulsés de France dans le même avion. Très rapidement, les forces de
l’ordre ont encerclé les militants et leur ont demandé de les suivre. Comme
ma cons¦ur Francine Bajande, j’ai tenté de faire des photos de
l’intervention policière et c’est à cet instant que des policiers s’en sont
pris à moi. Bien qu’ayant montré ma carte de presse, les policiers m’ont
donné l’ordre de les suivre. Ils avaient reçu des consignes : Pas de photos!
J’ai demandé à parler à un officier de presse, ce qui m’a été refusé et je
me suis retrouvée, ainsi que Francine Bajande, dans le fourgon de police
avec les militants qui s’opposaient aux expulsions. J’ai essayé de prendre
un cliché de la situation, mais un policier est rentré dans le fourgon et
m’a ordonné violemment de ne plus faire de photos. J’ai dû par la suite
cacher les pellicules par peur de me les faire saisir. Nous avons été
conduites dans les locaux de la Direction du contrôle de l’immigration où
nous avons été retenues pendant plus de trois heures sans être informées des
raisons de notre arrestation.”
Siège de la DICILEC, 12 juin 1998
France Keyser, photographe indépendante, Gilles Picheran, collaborateur du
quotidien Le Parisien, et Jean-Manuel Simoes de l’agence Sipa press ont été
interpellés au siège de la Direction de contrôle de l’immigration et de
lutte contre l’emploi clandestin (DICILEC) au 17, rue de Dunkerque à Paris.
Leur matériel photographique a été saisi. Les photographes ont été retenus
pendant deux heures sur les lieux, puis conduits au Commissariat de Police
de l’arrondissement. Ils ont été relâchés deux heures plus tard. Les trois
photographes couvraient l’action d’un comité contre les expulsions de
personnes en situation irrégulière.
Jean-Manuel Simoes témoigne : “Comme d’habitude, lors du déroulement de ce
type d’opérations, je suis resté à l’écart de façon à pouvoir travailler
sans être gêné. Une quinzaine de minutes après le début de la manifestation,
une intervention des forces de police a eu lieu. Parfaitement démarqués des
militants, nous avions pris position avec mes
collègues sur le haut d’un escalier afin de prendre des photos. Plusieurs
policiers nous ont donné l’ordre d’arrêter. Nous leurs avons signalé que
nous étions tous des photographes professionnels et avons continué à faire
notre travail. Un groupe de policiers s’est alors dirigé vers nous et nous a
encerclé. Notre matériel a été brutalement saisi ; la batterie du flash de
mon collègue, Jérôme Sessini, a été endommagée à coup de matraque et
jetée par terre. On nous a imposé de rester sur les lieux, bien à l’écart
des manifestants. Après le contrôle de notre carte de presse, nous avons été
conduits avec les manifestants à la troisième DPJ à Paris. Nous avons été
fouillés. L’interpellation, qui aura duré plus de quatre heures, s’est
terminée par la récupération des films et du matériel.”
France Keyser confirme les principaux points du témoignage précédent, à
savoir l’intervention violente, la saisie du matériel, le boîtier cassé et
l’interpellation musclée “au même titre que les militants” : “Une fois au
commissariat, nous avons subi une fouille au corps, poursuit-elle. J’ai été
contrainte d’enlever mes vêtements, même mon soutien-gorge. Une pellicule a
été déroulée, ce qui a entraîné la perte définitive des clichés, pendant la
fouille de mon sac.”
Jérôme Sessini, photographe pour l’agence Gamma, également présent sur les
lieux, témoigne de la violence de l’interpellation policière. Son matériel a
été endommagé par des coups de matraque : “Bien que nous ayons montré nos
cartes de presse, les policiers se sont montrés particulièrement brutaux.
Nous avons été matraqués, insultés, notre matériel a été saisi. Mon flash a
été endommagé par des coups de matraque. Tandis que mes collègues étaient
conduits au commissariat, j’ai pu m’éclipser et prévenir mon agence. J’ai
pu récupérer mon matériel vers 22h30.”
Thierry Chiarello, cameraman pour Reuter TV, qui couvrait les heurts entre
les forces de police et les manifestants devant le siège de la DICILEC, a
été sommé par les policiers d’arrêter de filmer et sa caméra a été saisie.
Elle ne sera rendue à son agence que le lendemain.
Thierry Chiarello : “J’ai été violemment sommé d’arrêter de filmer et ma
caméra a été confisquée. Je ven