RSF s'inquiète de la politique adoptée par les autorités irakiennes à l'égard des médias suite aux attentats qui ont frappé Bagdad et la province de Babel.
(RSF/IFEX) – Reporters sans frontières s’inquiète de la politique adoptée à l’égard des médias par les autorités irakiennes dans le cadre de la gestion de la sécurité intérieure suite aux attentats qui ont frappé Bagdad et la province de Babel (sud du pays), les 19 et 20 août 2009.
« On ne peut que s’interroger sur les raisons qui ont poussé les autorités irakiennes à interdire aux journalistes d’approcher les lieux des attentats et d’interviewer les victimes. Leur but est-il de réduire la diffusion d’images choquantes ? De ne pas rendre compte des succès des terroristes ? D’occulter l’inefficacité des responsables de la sécurité intérieure ? Plus de transparence s’impose de la part des autorités irakiennes qui doivent laisser les professionnels de l’information travailler librement », a déclaré l’organisation.
Le 19 août, un camion piégé a explosé devant le ministère des Affaires étrangères dans le quartier de Salhiyeh et un autre devant le ministère des Finances à Bagdad. Ces événements mettent à mal le nouveau plan de sécurité intérieure, élaboré par Nouri Al-Maliki, Premier ministre et chef des forces de sécurité, après le retrait des forces américaines.
Alors qu’ils tentaient de couvrir les événements, plusieurs journalistes ont été physiquement pris à partie. Le 20 août, trois journalistes ont été empêchés de photographier et de filmer les funérailles de victimes des attentats, près de l’hôpital Al-Tab Al-‘Adli à Bagdad. Malgré le fait que l’équipe ait présenté aux forces de sécurité une autorisation écrite provenant du Commandement des opérations de Bagdad et du ministère de la Santé, ils ont été physiquement agressés par un officier du ministère de l’Intérieur, accompagné d’agents de la police civile. Par ailleurs, Tha’ir Al-Sudani, photographe de l’agence Reuters, le cameraman Haydar Kadhim Noor, ainsi que Shehab Ahmed, photographe de l’Agence Européenne, ont été détenus pendant quelques heures par les forces de sécurité de l’hôpital.
Ce même jour, la province de Babel a également été le théâtre d’une série d’attentats causant la mort de plus de 65 personnes. Les équipes de presse écrite, radio et audiovisuelle, notamment celles des correspondants des chaînes satellitaires Al-Hurra, Al-Sumariya, Al-Rasheed et celui de Radio Sawa, se sont vu interdire l’entrée de l’hôpital d’Al-Hilla, capitale de la province. Les forces de sécurité les ont également empêchées de s’approcher des victimes hospitalisées et .des témoins, sur ordre de l’administration de l’hôpital qui avait elle-même reçu, selon un des correspondants, cette injonction du ministère de la Santé à Bagdad.
La campagne d’interdiction s’est poursuivie au niveau politique. Le 21 août, alors que seuls 60 parlementaires irakiens sur 440 se réunissaient pour une séance exceptionnelle de l’Assemblée nationale, Khalid Al-Attiyah, premier vice-Président de l’Assemblée, a exigé l’expulsion de tous les journalistes présents et a officiellement interdit à la presse d’évoquer la réunion et son contenu pour des raisons de sécurité. La séance organisée d’urgence avait pour but l’étude et l’organisation de nouvelles mesures secrètes de sécurité à Bagdad, en raison de la négligence des organismes de sécurité face aux récents attentats. Alors que les journalistes étaient expulsés de l’Assemblée, un reporter de la chaîne Al-Ittijah, Mufid Hamid, a été malmené par les forces de sécurité du premier vice-Président. L’expulsion forcée et les violences faites aux journalistes ont été filmées et diffusées sur les chaînes locales.
Plusieurs parlementaires comme Maha al-Dawri, Fawzi Akram, Hassan Al-Rabi’i, ainsi que des organismes de presse comme le Syndicat des journalistes irakiens, ont condamné cette décision injustifiée du vice-premier ministre d’interdire une séance publique, d’empêcher les journalistes d’informer le public sur les attentats et ses conséquences, tout comme sur les politiques prévues pour lutter contre le terrorisme.