Mouldi Zouabi est accusé de "violences aggravées et injures publiques".
(OLPEC/IFEX) – Tunis, le 6 juillet 2010 – Alors qu’il s’attendait à être convoqué en tant que plaignant dans l’affaire où il avait été agressé par un membre de la milice du parti au pouvoir, Mouldi Zouabi, grand reporter à Radio Kalima et membre fondateur du Pen Club Tunisie, vient de recevoir une citation à comparaitre devant le tribunal cantonal de Jendouba le 14 juillet prochain, pour répondre de l’accusation de « violences aggravées et injures publiques » contre son agresseur, le dénommé Khalil Maaroufi.
Les faits remontent au 1er avril 2010, jour où le journaliste a été agressé par Maaroufi, homme de main connu pour être proche de la police et gérant d’un café situé en face du palais de justice à Jendouba (Nord ouest du pays).
L’agression avait eu lieu à hauteur du poste de police central du district de Jendouba; l’individu était sorti d’une voiture au vitres teintés (en Tunisie seuls les agents de police et les membres du gouvernement ont le droit de circuler dans des voitures aux vitres teintées), lui a demandé s’il s’appelait bien Mouldi Zouabi et dès que ce dernier avait répondu positivement, il s’est jeté sur lui en le frappant avec ses brodequins, le rouant de coups et brisant ses lunettes de vue; Le barbouze a proféré des menaces contre lui en l’insultant vulgairement, le traitant de « traitre à la patrie » qui « salit l’image du pays » et qui « va payer cher sa trahison ». Alors qu’il était à terre, il lui a arraché ses papiers d’identité, sa carte bancaire, son permis de conduire, sa carte de presse de la FIJ, son enregistreuse ainsi que d’autres documents personnels.
Mouldi Zouabi avait déposé le jour même une plainte au parquet de Jendouba après avoir été examiné par un médecin qui lui a délivré un certificat médical attestant des blessures provoquées par l’agression. Les avocats de la Ligue des droits de l’homme de la section de Jendouba l’avaient accompagné au tribunal et constaté l’état dans lequel il se trouvait.
Il vient d’apprendre maintenant que la plainte qu’il avait déposée a été classée pour « insuffisance de preuves » et que son agresseur le poursuit pour les faits dont lui même avait été victime!
RAPPEL DES FAITS :
Mouldi Zouabi est célèbre pour les reportages sociaux qu’il effectue dans la région défavorisée du Nord-ouest et qui mettent à nu la propagande trompeuse du régime sur les réalisations économiques et l’éradication de la pauvreté.
Il subit pour cette raison une répression constante depuis plus d’une année. Son domicile est sous une surveillance permanente de policiers en civil qui harcèlent sa famille. Sa connexion Internet continue d’être arbitrairement coupée depuis le début du mois de février 2010 malgré un recours en justice qu’il a introduit; Les Publinets proches de son domicile à Bousalem qu’il fréquentait ont été tous fermés; ce qui l’oblige à recourir aux Publinet du chef lieu du gouvernorat à Jendouba pour accomplir son travail.
Il avait été arrêté le 28 janvier 2010 au commissariat de Montplaisir à Tunis et détenu durant plus de huit heures, alors qu’il s’apprêtait à faire une interview avec Mohamed Bouebdelli, directeur de l’Université Libre de Tunis.
L’OLPEC
• Constate que cette nouvelle poursuite contre un journaliste se produit dans le contexte de la promulgation d’une nouvelle loi appelée « la loi des traitres » qui criminalise toute forme de critique à l’égard de la politique du gouvernement. Et que Mouldi Zouabi est aussi accusé d’être un traitre qui “porte atteinte à l’image du pays”;
• Dénonce ce harcèlement judiciaire et le déni d’accès à la justice dont est victime Mouldi Zouabi, comme nombre de défenseurs de droits humains; un déni qui coincide avec une prétendue « réforme de la justice » conduite avec des fonds de l’Union européenne.
• Appelle à un large soutien avec le journaliste qui comparait le 14 juillet prochain devant une chambre estivale qui examine d’habitude les flagrants délits et les affaires urgentes, ce qui présage d’une justice expéditive; Mouldi Zouabi risque 3 ans de prison ferme.