L'activiste cambodgienne des droits fonciers et du droit au logement Yorm Bopha est détenue injustement depuis plus de 14 mois. Elle a été reconnue coupable de charges criminelles bidon pour avoir exercé ses droits à la libre expression.
L’activiste Yorm Bopha ne compte plus le nombre de fois qu’elle a été menacée et tabassée par les autorités tandis qu’elle protestait de manière pacifique contre les évictions forcées reliées au litige foncier du lac Boeng Kak, fortement médiatisé, qui fait rage depuis 2007 autour d’enjeux sociaux et environnementaux.
Lorsque treize de ses collègues militantes des droits fonciers (les « 13 de Boeng Kak ») ont été arrêtées de façon violente et arbitraire en mai 2012 pour avoir participé à une manifestation pacifique, Bopha est devenue une voix en faveur de la liberté des femmes. Elle critique publiquement les responsables du gouvernement, ce qui fait d’elle une personnalité que les autorités veulent réduire au silence. Bopha a été menacée verbalement, harcelée et intimidée, elle s’est fait dire à de multiples reprises par la police qu’elle était « sur la liste noire » et qu’elle « aurait bientôt des problèmes ».
Bopha elle-même a été arrêtée en septembre 2012 et impliquée dans une affaire d’agression qui n’était qu’un coup monté. Elle a été condamnée en appel à deux ans de prison.
« Considérant l’absence flagrante de preuves pour reconnaître la culpabilité de Bopha, généralement qu’elle a été ciblée à cause de son activisme et de son franc parler, en particulier pendant la campagne organisée pour obtenir la libération des treize de Boeng Kak », selon ce qu’indique le Centre des droits de la personne du Cambodge (Cambodian Center for Human Rights, CCHR), qui fait campagne pour obtenir sa remise en liberté.
De sa prison, Bopha conserve toute sa détermination à défendre la cause et se montre reconnaissante devant le soutien international, et affirme : « aujourd’hui, je sais que ni moi ni les revendications de mes consœurs qui sont à l’extérieur de la prison, ne sommes oubliées ».
Un grand merci au Centre des droits de la personne du Cambodge, et la campagne « Libérez Yorm Bopha » , et Jenny Holligan, photographe pour avoir contribué à cette action.
LA LETTRE
Président de la Cour suprême, Son Excellence Dith Munty
Boulevard Sothearos,
Sangkat Chaktomuk,
Khan Chamkar Mon,
Phnom Penh, Cambodge
Pétition : La Cour suprême du Cambodge doit rendre justice dans l’affaire d’une militante des droits de la personne incarcérée injustement
Tandis que nous nous apprêtons à souligner la Journée internationale contre l’impunité, le 23 novembre, nous aimerions faire remarquer que l’activiste cambodgienne des droits fonciers et du droit au logement Yorm Bopha est détenue injustement depuis plus de 14 mois. Elle a été reconnue coupable en décembre 2012 de charges criminelles bidon pour avoir exercé ses droits à la libre expression et de réunion. Bopha est âgée de 29 ans et elle est mère d’un enfant. Elle se bat sans relâche depuis des années à défendre les droits fonciers de la communauté Boeung Kak de Phnom Penh. Avant son arrestation le 4 septembre 2012, Bopha a été menacée et passée à tabac par des agents de l’ordre lors de manifestations non violentes. Elle s’est fait dire qu’elle figurait « sur la liste noire ».
Depuis 2007, les membres de la communauté Boeung Kak sont empêtrés dans un litige foncier fortement médiatisé, soit depuis que leurs terres ont été vendues par le gouvernement cambodgien à une société privée appartenant à un sénateur du parti au pouvoir qui les destine à un projet immobilier haut de gamme. Bopha s’est trouvée à prendre la tête d’une campagne pour faire libérer 13 femmes militantes condamnées et emprisonnées en mai 2012. Bopha est devenue une porte-parole de sa communauté, jusqu’à ce qu’elle et son mari, Lous Sakhorn, soient condamnés en septembre 2012 sur la base d’accusations d’agression, fondées sur le témoignage farfelu de deux conducteurs de taxis-motocyclettes. Bopha et son mari ont reçu le même verdict de culpabilité ; toutefois, la peine infligée à Sakhorn a été imposée avec sursis, tandis que Bopha a été incarcérée immédiatement, ce qui démontre qu’il s’agit d’une affaire purement politique. En juin 2013, après avoir interjeté appel, Bopha a vu une année de sa peine de trois ans d’emprisonnement être transformée en une année de sursis.
Bopha est une femme et activiste extrêmement solide. Toutefois, sa détention prolongée et l’éloignement de sa famille l’ont minée. Le fait d’être une militante de la base et que les accusations portées contre elle ne sont pas liées directement à son travail de défense des droits de la personne signifie qu’elle a reçu moins d’appuis que les autres défenseurs des droits de la personne qui sont incarcérés. C’est ce qui fait qu’elle est toujours en prison.
Le verdict de culpabilité rendu contre Bopha constitue une violation grossière de son droit à un procès indépendant et impartial et de son droit à la présomption d’innocence. La détention arbitraire prolongée qu’elle subit dans des conditions exécrables constitue également une violation flagrante de ses droits, alors que son arrestation s’est produite en violation de ses droits à la liberté d’expression et de réunion, droits garantis par loi du Cambodge et le droit international.
À l’audition de l’appel de Yorm Bopha le 22 novembre, nous invitons la Cour suprême du Cambodge à la libérer sans condition si la Cour constate que le procès ne s’est pas déroulé dans des conditions conformes aux normes internationales.