(RSF/IFEX) – Le 5 août 2002, la Colombie devenait le 77e État à ratifier le Statut de Rome, le traité portant création de la Cour pénale internationale (CPI). Moins d’un mois après cet engagement, la Colombie décide de se prévaloir de l’article 124 du statut de la CPI. Ce dernier, adopté à l’initiative de la […]
(RSF/IFEX) – Le 5 août 2002, la Colombie devenait le 77e État à ratifier le Statut de Rome, le traité portant création de la Cour pénale internationale (CPI). Moins d’un mois après cet engagement, la Colombie décide de se prévaloir de l’article 124 du statut de la CPI. Ce dernier, adopté à l’initiative de la France, exclut la compétence de la Cour, pour les sept prochaines années, à l’égard des crimes de guerre.
Le réseau Damoclès, organisation de lutte contre l’impunité, et RSF déplorent la décision de la Colombie, au moment où le conflit se durcit dans ce pays, le plus dangereux du continent pour les professionnels de l’information avec une quarantaine de journalistes tués au cours des dix dernières années.
« Alors que les assassinats de journalistes sont encouragés par l’incapacité de la justice colombienne à en punir les auteurs, cette mesure prive la presse d’un recours international précieux », ont souligné Robert Ménard, secrétaire général de RSF, et Jean-Pierre Getti, vice-président du réseau Damoclès. Les deux organisations demandent au président Alvaro Uribe Vélez de revenir sur cette décision.
Dans son édition du 1er septembre, le quotidien colombien « El Tiempo » a révélé que le gouvernement de l’ancien président Andrés Pastrana, en concertation avec son successeur, l’actuel président Uribe, s’était prévalu de l’article 124 de la CPI à l’occasion de la ratification du Statut de Rome le 5 août dernier. Cet article permet à tout État partie de déclarer la Cour incompétente pour les crimes de guerre commis sur son territoire ou par un de ses ressortissants, pour une période de sept ans après l’entrée en vigueur de la CPI.
Le réseau Damoclès et RSF rappellent que cet article a été introduit dans le texte du Statut de Rome à l’initiative de la France qui jugeait certaines dispositions du Statut trop peu protectrices de ses ressortissants.
Adoptée par la Colombie, cette décision a de graves conséquences sur la lutte contre l’impunité dont bénéficient les assassins de journalistes. Seront notamment exclus de la compétence de la CPI les prises d’otages ainsi que les attaques contre la population civile, à laquelle les journalistes sont assimilés.
Une quarantaine de professionnels de la presse ont été tués en Colombie au cours des dix dernières années, dont une quinzaine alors qu’ils couvraient le conflit entre l’armée et les groupes extrémistes, paramilitaires d’extrême droite et guérillas communistes. Au total, les crimes de guerre représentent plus de la moitié des crimes commis dans ce pays.
La CPI, établie par le traité de Rome, est le premier tribunal international permanent chargé d’enquêter et de juger les violations massives du droit international humanitaire et des droits de l’homme. Elle est compétente pour examiner les crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale : le crime de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre. La CPI est entrée en vigueur le 1er juillet.