(RSF/IFEX) – RSF exprime sa profonde déception après la décision de la Cour suprême de justice de la Nation (SCJN) qui a considéré à une courte majorité, le 29 novembre 2007, « qu’il n’y avait pas eu de violation grave des garanties individuelles au préjudice de la journaliste indépendante Lydia Cacho » lors de son arrestation, en […]
(RSF/IFEX) – RSF exprime sa profonde déception après la décision de la Cour suprême de justice de la Nation (SCJN) qui a considéré à une courte majorité, le 29 novembre 2007, « qu’il n’y avait pas eu de violation grave des garanties individuelles au préjudice de la journaliste indépendante Lydia Cacho » lors de son arrestation, en décembre 2005, à la demande du gouverneur de l’État de Puebla (Sud), Mario Marín. La haute juridiction a ainsi invalidé toutes les charges pesant contre le gouverneur.
« Depuis qu’elle a dénoncé, en 2004, l’existence d’un réseau de pédophilie impliquant des personnalités haut placées, Lydia Cacho n’a cessé de subir des menaces, des agressions et des tentatives d’attentat, jusqu’à sa brève détention en 2005. En accordant au gouverneur de Puebla, Mario Marín, le non-lieu sur ce point, malgré des éléments accablants, et en osant dire, contre toute évidence, que les droits constitutionnels de Lydia Cacho n’ont pas été bafoués, la SCJN a octroyé une véritable prime à l’impunité. L’épilogue de cette sombre affaire constitue un précédent inquiétant pour la liberté de la presse et les droits de l’homme au Mexique », a déclaré l’organisation.
Par six voix contre quatre, les magistrats de la SCJN ont estimé, le 29 novembre, que « l’existence d’une violation grave des garanties individuelles, en vertu de l’article 97 de la Constitution, n’avait pas été démontrée » et que la journaliste avait été victime « d’irrégularités mineures », lors de son arrestation et de son transfert de l’État de Quintana Roo (Est), où elle réside, vers l’État de Puebla dont Mario Marín est le gouverneur. Cette brève détention était intervenue à la suite de la publication par la journaliste, en 2004, d’un livre – « Los Demonios del Edén » (Les Démons de l’Eden) – mettant en cause des hommes politiques et des hommes d’affaires dans l’exploitation d’un réseau pédophile. En rendant sa décision, la SCJN a annulé toutes les charges pesant contre Mario Marín.
Des enregistrements de conversations téléphoniques, révélés par le quotidien « La Jornada » et diffusés sur les ondes de la station W Radio, le 14 février 2006 – dont RSF a obtenu la retranscription – entre le gouverneur de Puebla et l’entrepreneur Kamel Nacif, cité dans l’affaire de pédophilie, tendaient à prouver l’implication des deux hommes dans l’arrestation de Cacho. Le gouverneur et le patron d’entreprise auraient suggéré « en plaisantant » de violer la journaliste pendant son transfert. La SCJN a considéré que ces enregistrements n’avaient pas de « valeur probatoire ».
Cette décision contredit le rapport rédigé par le juge Juan Silva Meza et soumis à la Cour, le 26 novembre 2007. Le magistrat a considéré qu’il existait « un accord entre les autorités de Puebla et de Quintana Roo (Est) pour violer les garanties individuelles de la journaliste Lydia Cacho ». Le gouverneur, le procureur général et le président du Tribunal supérieur de Puebla, quatre juges et plusieurs fonctionnaires gouvernementaux étaient mis en cause dans le rapport.
« La décision de la Cour est une défaite pour les journalistes mexicains qui informent et enquêtent sur les cas liés aux réseaux de trafics d’êtres humains. Les juges envoient un message au pays: des cas de ce type ne seront même pas traités par la justice », a déclaré Cacho en apprenant la nouvelle.