Tous les cinq ans, l'Examen périodique universel passe au peigne fin la situation des droits humains de chaque Etat membre des Nations Unies. Toutefois, il a besoin de l'engagement actif de la société civile pour en tirer le meilleur parti. Lisez ce guide de 5 minutes pour apprendre comment y participer et transformer ses résultats en actions sur le terrain.
Ceci fait partie d'une série de guides de l'IFEX visant à renforcer les capacités de la société civile à s'engager dans des espaces mondiaux pour la défense de la liberté d'expression. Pour visiter la page du hub et voir le tout, cliquez ici.Tous les cinq ans, chacun des 197 États membres des Nations Unies doit passer par exactement le même processus: un Examen périodique universel (EPU) de sa situation en matière de droits humains. L’EPU a été mis en place par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies (CDH) en 2006, lorsque le Conseil lui-même a été créé.
Ces examens sont effectués par le groupe de travail de l’EPU, composé de 47 membres du CDH. Cependant, tout État membre de l’ONU peut contribuer au dialogue lors de l’examen (plus d’informations à ce sujet ci-dessous). Les examens passent en revue 40 à 42 États au cours de trois sessions chaque année. Depuis leur lancement en 2008, ce « cycle » a été complété deux fois pour chaque pays. Les États subissent actuellement un troisième cycle du processus d’examen.
L’EPU permet – et s’appuie en fait – sur un large éventail de contributions des États, des agences des Nations Unies, des ONG et des institutions nationales des droits humains (INDH).
Chaque cycle de cinq ans comporte trois étapes et, pendant chacune d’elles, les contributions de tous ces groupes sont encouragées:
Étape 1: Préparation de l’examen
Étape 2: Examen et adoption
Étape 3: Mise en œuvre des recommandations
Ce guide de l’IFEX examine les trois étapes et décrit comment la société civile peut jouer un rôle important dans chacune d’elles.
Avertissement préalable – c’est un peu plus long que nos guides habituels! Le processus de l’EPU est vaste. Mais nous vous encourageons à lire et à vous engager dans ce processus. En fin de compte, l’objectif de l’EPU est d’améliorer la situation des droits humains sur le terrain – et les expériences antérieures montrent que la participation de la société civile est absolument essentielle pour y parvenir.
Etape 1: Préparation de l’examen
Vous pouvez et devez vous engager avec l’EPU tout au long du cycle d’examen, de manière formelle ou informelle. Si vous considérez cet engagement comme une conversation, le plaidoyer de suivi vous aide à passer du simple fait de parler à celui d’être entendu et compris et, finalement, de voir que vos paroles ont l’impact souhaité.
Mais l’année précédant l’examen d’un pays, c’est quand la plupart des démarches de production de rapports sur lesquels l’examen sera basé sont menées.
Trois rapports officiels sont produits et la société civile peut contribuer à tous les trois.
1. Le Rapport national
2. Compilation des informations des Nations Unies
3. Synthèse des informations des parties prenantes
Ces rapports sont ensuite recueillis et rendus publics sur le site Web du HCDH. Voici comment la société civile peut contribuer à chacun d’eux.
1. Comment contribuer au Rapport national
Le rapport national est soumis par l’État examiné (SuR, en abrégé) et devrait refléter la situation des droits humains dans le pays depuis son dernier examen. Les États membres sont fortement encouragés à compiler ces rapports en consultation avec la société civile.
Pour ce faire, un État pourrait organiser des consultations nationales à grande échelle avec les parties prenantes concernées. La résolution 5/1 du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies suggère cela comme une pratique exemplaire. Cependant, en réalité, de telles consultations ne se produisent pas toujours.
Les ONG peuvent renforcer le processus de consultation et influencer le Rapport national de plusieurs manières:
• Encourager le gouvernement à tenir des consultations en temps utile et à inviter un large éventail de parties prenantes concernées.
• Sensibiliser au processus aussi largement que possible, en particulier auprès des parties prenantes et des groupes souvent discriminés tels que les femmes et les personnes LGBTQI. Cela aidera à assurer un rapport plus précis et plus complet et à alerter plus d’ONG à propos de la prochaine EPU.
• Rencontrer les institutions nationales des droits humains (INDH), qui ont souvent un lien direct avec les principaux responsables gouvernementaux.
• Participer aux consultations et fournir des commentaires sur le projet de rapport, s’il est mis à disposition par le gouvernement.
2. Comment contribuer à la compilation des informations de l’ONU
Cela se fait en collaborant et en contribuant aux rapports, aux déclarations et autres informations fournies par les agences des Nations Unies, telles que les Procédures spéciales, les bureaux pays du HCDH et les organes conventionnels durant la période entre les examens.
Par exemple, si vous contribuez à un rapport du CDH ou soumettez une lettre d’allégation aux procédures spéciales de l’ONU, ces informations pourront ensuite être prises en compte dans le rapport de l’EPU du fait que les informations utiles viennent de ces organes. Vice versa, l’EPU peut être utilisé pour donner suite aux observations finales de l’organe conventionnel ou aux recommandations du passé.
Consultez nos autres guides pour savoir comment contribuer via les procédures spéciales et les organes conventionnels, ainsi que les outils de suivi des Nations Unies, spécifiquement ceux traitant de la sécurité des journalistes et de l’impunité, tels que le rapport biennal de l’UNESCO.
3. Comment contribuer à la synthèse des informations des parties prenantes
Le rapport de la synthèse des informations des parties prenantes concernées est réalisé avec les contributions venant de la société civile, des INDH et d’autres parties prenantes. Il n’inclut pas les contributions de l’État ou de l’ONU.
Les contributions de la société civile peuvent être faites individuellement ou conjointement dans le cadre d’une coalition d’ONG. Elles peuvent concerner un droit internationalement reconnu (tel que le droit à la liberté d’expression et d’information) ou adopter une approche multithématique, en examinant une série de droits et leur respect par le SuR (Pays sous examen).
Pour le guide de style du HCDH et une liste des meilleures pratiques pour ce rapport, visitez ce lien.
IFEX a compilé certaines des meilleures pratiques qui, selon nous, contribueront à faire en sorte que les informations et les recommandations de votre contribution soient présentées par le groupe de travail:
Étape 2: Examen et adoption
L’examen lui-même se déroule en deux phases. Le premier est un dialogue: le SuR (pays sous examen) fait une présentation orale de son rapport national et le Groupe de travail peut répondre en soulevant des questions et en formulant des recommandations sur la base des informations reçues dans les rapports préparatoires, y compris, espérons-le, les vôtres!
Cependant, rédiger une bonne contribution ne suffira peut-être pas à vous assurer que vos opinions sont mentionnées lors de la révision. L’EPU est un examen des pairs par les États membres de l’ONU, ce qui le rend intrinsèquement politique. Notre deuxième série de suggestions se concentre davantage sur la manière de faire pression efficacement sur les États clés et de faire un autre travail de plaidoyer basé sur votre contribution, longtemps avant la révision.
Les groupes de la société civile ne peuvent pas faire une déclaration lors de l’examen, mais ceux qui sont accrédités auprès de l’ECOSOC (Conseil économique et social de l’ONU) peuvent toujours y assister. Et tout le monde peut suivre via le webcast de l’ONU et aider à sensibiliser sur ce qui se passe de diverses manières, y compris:
• Faire connaître la session sur les médias sociaux
• Organiser des parties de visionnage ou briefing de médias
La deuxième phase de l’examen, la session d’adoption, a lieu environ quatre à six mois après le dialogue, lors de la prochaine session ordinaire du CDH. À ce moment, le SuR doit soit noter, soit accepter toutes les recommandations qui lui sont présentées via le projet de rapport du groupe de travail, s’ils ne l’ont pas déjà fait. Bien que l’acceptation d’une recommandation indique un engagement fort, les recommandations « notées » sont des reconnaissances passives. Celles-ci peuvent encore être évoquées lorsqu’on tente d’encourager l’action du gouvernement sur ces questions, car l’État devra également faire rapport sur les recommandations notées.
Avant la session d’adoption, la société civile peut travailler en vue d’influencer le résultat de l’examen. Vous pouvez:
• Faire pression sur les principaux ministres et autres responsables du SuR pour qu’ils acceptent vos recommandations, y compris au ministère des Affaires étrangères et aux commissions parlementaires compétentes.
• Travailler avec les ambassades des États qui mettent en avant vos recommandations pour exercer une pression supplémentaire sur votre gouvernement en encourageant les réunions bilatérales.
• Travailler avec les médias et les autres parties prenantes de la société civile pour sensibiliser aux recommandations, par exemple par des communiqués de presse et des déclarations de plaidoyer publiées ciblant les décideurs clés.
• Commencez à élaborer votre propre plan de mise en œuvre, décrivant comment vous allez surveiller les progrès et travailler avec les principales parties prenantes pour s’assurer que les recommandations sont appliquées. Un tel plan devrait décrire les recommandations spécifiques, la responsabilité ministérielle / départementale et les indicateurs de succès. Reportez-vous au Rapport du groupe de travail pour la liste complète des recommandations reçues par le pays sous examen (SuR en anglais – State Under Review).
Au cours de la session du CDH au cours de laquelle a lieu l’adoption, les ONG accréditées auprès de l’ECOSOC (Conseil économique et social des Nations-unies) peuvent:
• Assister et faire des déclarations orales commentant les résultats de l’examen, soulignant les questions importantes non traitées par le Groupe de travail ou le SuR.
Etape 3 : Mise en œuvre des recommandations
Il s’agit de transformer les engagements du gouvernement en action et c’est ici que la société civile entre réellement en jeu. Contrairement à d’autres mécanismes d’examen tels que les organes conventionnels des Nations Unies, les résultats de l’EPU ne sont pas contraignants. Il est donc encore plus important que la société civile continue à suivre et à rendre compte de ce processus entre les examens. Si vous n’avez pas encore créé un plan de mise en œuvre, il est maintenant temps de le faire. Cela facilitera grandement le suivi des progrès accomplis pour respecter ces engagements. Les recommandations notées et acceptées par le SuR se trouvent dans l’ « Addendum » au Rapport du groupe de travail.
L’une des façons d’y parvenir est de soumettre un rapport à mi-parcours pour suivre et observer de près le rapport du gouvernement ou proposer de travailler avec le gouvernement pour soumettre un rapport conjoint gouvernement / ONG. Bien que les rapports à mi-parcours aient été établis comme une étape importante et une pratique exemplaire par le CDH en 2011, le processus reste entièrement volontaire. La société civile peut jouer un rôle important en encourageant les États à coopérer et à faire connaître les conclusions du rapport. Plus d’informations peuvent être trouvées ici. Mais ce n’est pas tout ce que vous pouvez faire. Ci-dessous, d’autres idées.
Plus de ressources et d’informations
• Examen périodique universel par le HCDH
• Directives techniques pour les contributions des parties prenantes pour le 3ème cycle (2017) par le HCDH
• Le compendium de la société civile : Guide complet pour les organisations de la société civile participant à l’EPU (2017) par Info EPU
• Utiliser l’Examen périodique universel pour les droits humains en ligne (2016) par Global Partners Digital et l’Association for Progressive Communications
• Guide pratique pour la société civile: EPU par HCDH
• Kit de suivi de la société civile (2015) par Info EPU
• Rapport à mi-parcours de l’EPU: Optimisation d’une mise en œuvre durable (2018) par Info EPU
• L’Examen périodique universel et son potentiel de promotion de la liberté d’expression, l’accès à l’information et la sécurité des journalistes: directives à l’intention des équipes de pays des Nations unies (2021) par UNESCO
• L’Examen périodique universel (EPU) et sa capacité à favoriser la liberté d’expression, l’accès à l’information et la sécurité des journalistes – LIGNES DIRECTRICES À L’USAGE DES ORGANISATIONS DE LA SOCIÉTÉ CIVILE (2022) par Amnesty International