Le jour de rassemblement de toute une nation, les journalistes emprisonnés, menacés, et poursuivis devant les tribunaux manqueront à l’appel.
(RSF/IFEX) – Le 4 juillet 2012 – A l’occasion du cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie, ce 5 juillet 2012, Reporters sans frontières a souhaité braquer les projecteurs sur la situation de la liberté d’information dans ce pays.
Si l’indépendance du pays a été arrachée en 1962, celle des médias n’est pas encore une réalité cinquante ans plus tard. Le jour de rassemblement de toute une nation, les journalistes emprisonnés, menacés, et poursuivis devant les tribunaux manqueront à l’appel.
Etre journaliste de nos jours : moins dangereux mais plus complexe
Au cours des “années noires” (décennie 1991-2002), près de 100 journalistes ont perdu la vie. Aujourd’hui et ce depuis des années, plus aucun journaliste n’est tué en Algérie du fait de ses activités professionnelles. Les problèmes aujourd’hui ont changé de nature.
Etre un journaliste indépendant aujourd’hui n’est pas chose aisée en Algérie, pays rongé par la corruption et le népotisme, où les militaires et le Département du renseignement et de la sécurité (DRS) se taillent une place de choix. A Alger, leur rédaction les protège. Loin de la capitale, la situation est tout autre, les protections moindres. Les dangers sont réels. la situation ne se compare certes pas à celle de la Tunisie de Ben Ali, mais la dénonciation des pratiques de certains potentats locaux peut exposer le journaliste à d’importantes tracasseries administrativo-judiciaires, voire le priver de sa liberté.
Par ailleurs, les journalistes et les directions de journaux subissent régulièrement des pressions économiques, mais également judiciaires, ou encore physiques et morales. Ils font également face à des difficultés techniques en ce qui concerne la diffusion et l’impression.
Un pluralisme et une indépendance de façade
Si l’on se contente de regarder le nombre de titres dans les kiosques de la rue Didouche à Alger, on pourrait croire à un foisonnement de la presse et donc à une réelle liberté d’expression. Les kiosques de la capitale regorgent de près de 80 titres de quotidiens, principalement arabophones. Mais la situation de la presse, et plus généralement des médias et de la liberté d’expression est loin d’être mesurable à l’aune du nombre de titres dans les points de vente. Nombreuses sont les publications émanant directement d’hommes d’affaires, liés aux intérêts de l’Etat et des services de renseignement. D’après le rapport du Rapporteur des Nations unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, publié le 12 juin 2012, moins de six journaux sont réellement indépendants en Algérie.
La libéralisation du secteur audiovisuel était une des mesures phare de la nouvelle loi sur l’information. Désormais, les quatre chaînes d’Etat peuvent être concurrencées par des chaînes privées. Pour l’instant, la fin du monopole sur l’audiovisuel n’est que théorique, dans la mesure où, selon ce projet de loi, l’ouverture de l’audiovisuel doit être proposée par une convention conclue entre la société algérienne de droit privée et une autorité de régulation. L’autorité de régulation n’ayant pas encore vu le jour, aucune chaîne de droit privé algérien n’a donc pu être validée.