L'article 12 du texte souhaite une "liberté d'expression responsable", sans toutefois fournir une définition du terme, laissant une place importante à une interprétation arbitraire.
(RSF/IFEX) – Dans le cadre des réformes annoncées pour juguler la contestation contre le régime, un décret législatif sur la loi des médias a été promulgué, le 28 août 2011, par Bachar Al-Assad.
Le Président syrien souhaite faire de ce texte un symbole de la libéralisation de la presse dans son pays. Ainsi, ce décret s’oppose à « tout monopole dans le secteur des médias », supprime les peines de prison pour délits de presse et érige la « liberté d’expression » en principe fondamental (article 2). Le texte stipule vouloir faciliter l’accès à l’information, obligeant les autorités à ne pas entraver l’accès à certaines données.
Toutefois, l’article 12 interdit toute publication incitant à la violence, aux divisions sectaires et pouvant affecter l’unité nationale et souhaite une « liberté d’expression responsable ». Cet article interdit également la publication de tout article relatif à l’armée et aux forces armées. Le texte ne fournit aucune définition à ces termes, qui restent vagues et imprécis, laissant une place importante à une interprétation arbitraire.
Le décret appelle au « respect des libertés fondamentales présentes dans la déclaration universelle des droits de l’homme et des conventions internationales » alors que la répression fait rage depuis bientôt six mois, que de nombreux défenseurs de la liberté d’expression et professionnels de l’information ont été emprisonnés, que le nombre de citoyens tués ne cesse de croître chaque jour. Les dispositions prévues à l’article 11, qui stipule que « toute attaque contre un professionnel des médias sera assimilé à une attaque à l’encontre d’un fonctionnaire de l’Etat syrien », en sont d’autant plus risibles et schizophréniques, frisant l’absurde.
Ces propositions sont d’ailleurs intervenues alors que les autorités syriennes ont interdit, le même jour, à trois personnalités et figures de l’opposition de se rendre au Liban. Ainsi, alors qu’ils se trouvaient au poste frontière, Michel Kilo, Fayez Sara et Louay Hossein se sont vus empêchés de se rendre à un séminaire organisé par la chaîne Al-Hurra, au prétexte qu’un tel déplacement au Liban était dangereux pour leur sécurité. Un comble : les autorités syriennes qui veulent aujourd’hui protéger des journalistes qu’elles ont pourtant incarcérés pendant des années… Louay Hossein a posté le commentaire suivant sur Facebook : « Il aurait été préférable d’assurer notre sécurité et celles des autres, tels qu’Ali Ferzat, dans le pays, de trouver une solution pour assurer la sécurité de l’ensemble des citoyens syriens, qu’ils soient civils ou militaires, qui sont tués tous les jours à l’intérieur des frontières, et pas à l’étranger. Honnêtement, je ne me sens pas en sécurité ».
Il faut souligner que les autorités syriennes ont, dernièrement, levé les interdictions de voyager qui pesaient sur des milliers de personnes sur décision des services de sécurité.
Par ailleurs, le caricaturiste Ali Ferzat, torturé le 25 août dernier a, quant à lui, été transféré dans une clinique privée, le 26 août dernier, afin d’y être opéré. Il a déclaré avoir reçu des menaces téléphoniques afin qu’il mette un terme à ses commentaires critiques à l’égard du régime. Une manifestation de soutien au caricaturiste a été organisée devant son domicile.
Reporters sans frontières regrette la décision du groupe audiovisuel MBC de rayer de sa grille des programmes l’émission de jeux télévisés « Vous le méritez », en raison des positions ouvertement pro-Bachar al-Assad de Georges Kordahi, présentateur vedette de l’émission.