RSF fait part de son inquiétude face à la multiplication de cas d'agressions de journalistes, notamment de la part des forces de l'ordre.
(RSF/IFEX) – Le 26 octobre 2010 – Le procès d’Abdul Ilah Haydar Shae s’ouvre aujourd’hui, 26 octobre 2010, à Sanaa, devant le tribunal spécial pour juger les affaires de sécurité d’État. Ce journaliste de l’agence Sabaa, spécialiste du réseau Al-Qaïda, est accusé par le procureur général d' »inciter à l’assassinat du président de la République et de son fils », d' »appartenir à un groupe rebelle cherchant à porter atteinte à la sécurité du pays » ; et de « le soutenir médiatiquement, pour inciter la jeunesse à s’enrôler ». Ses avocats n’ont pas reçu, jusqu’à présent, le droit de lui rendre visite en prison. Estimant que ce procès est illégal et inéquitable, ils ont annoncé leur intention de refuser de plaider lors du procès.
Reporters sans frontières condamne fermement les accusations abracadabrantes portées contre Abdul Ilah Haydar Shae et exige sa libération immédiate. Incarcéré au terme d’une procédure inique et contraire aux principes du droit en vigueur au Yémen, le journaliste comparaît affaibli physiquement par les mauvais traitements, l’isolement et les actes de torture qu’il a subis. En tant qu’État partie au Pacte international des droits civils et politiques depuis 1987, le Yémen se doit de respecter les droits du journaliste à un procès équitable.
Arrêté une première fois par les forces de police, le 11 juillet 2010, dans une rue de Sanaa, Abdul Ilah Haydar Shae avait été libéré après plusieurs heures d’interrogatoire. De nouveau appréhendé le 16 août 2010, il a été incarcéré dans une prison de la capitale, avant d’être transféré dans un centre de détention des services secrets. Selon le témoignage de ses avocats, Abdul Ilah Haydar Shae, lors de sa comparution devant le tribunal le 22 septembre 2010, portait des traces de coups sur le torse et d’autres parties du corps. Une de ses dents serait également cassée. Le tribunal avait alors prolongé sa détention de trente jours, officiellement pour les besoins de l’enquête, délai qui a expiré le 22 octobre 2010.
Reporters sans frontières fait part de son inquiétude face à la multiplication de cas d’agressions de journalistes dans le pays, notamment de la part des forces de l’ordre, alors même qu’elles devraient être les principaux garants de leur sécurité.
Le 24 octobre 2010, le caméraman de la chaîne satellitaire Al-Jazeera, Mohammed Al-Said, ainsi que Hamdy Al-Bakary, correspondant de la même chaîne, ont été agressés et interpellés par la police, alors qu’ils couvraient le procès des suspects de l’attentat contre le club Al-Wahda à Aden. Aucune justification n’a été avancée par les autorités.
Le 14 octobre 2010, le journaliste Ghazi Al-Alawi, secrétaire de rédaction du journal « Al-Oumana Al-Ahliya », diffusé dans la région d’Aden, et correspondant pour le site d’information en ligne Al-Masdar Online dans la région de Lahij, a été battu par des hommes armés alors qu’il couvrait le festival du mouvement sudiste, organisé à Al-Habilin lors des commémorations du souvenir du « 14 octobre », jour de l’indépendance du pays. Le secrétaire du parti socialiste à Aden, Ali Mounassar Mohammed, a participé au passage à tabac du journaliste. Sa caméra a été cassée. Blessé, ce dernier a été transporté aussitôt à l’hôpital de Radfan.
Cette agression fait suite à la publication, le jour même, d’un article relatif à une rencontre secrète entre le président de la République, Ali Abdallah Saleh, et le leader du mouvement sudiste, Ali Mounassar Mohammed.
La journaliste et militante des droits de l’homme Tawakol Karman, présidente de l’organisation Women Journalists Without Chains, a été interpellée pendant trois heures le 12 octobre 2010, pour avoir organisé et participé à Sanaa à une manifestation en solidarité avec les habitants de Jaachen, expulsés par le Cheikh Nafedh.
Le 9 octobre 2010, le tribunal spécial pour les affaires de presse et de publication a condamné le directeur de rédaction d' »Al-Nass », Oussama Ghalib, et le journaliste Fawzy Al-Kahily à payer une amende de 50 000 rials (environ 165 euros), pour insulte et diffamation envers le directeur général de la fondation pour la diffusion et les publications « Al-Mithaq », Adil Mohamed Qaid. Cette condamnation fait suite à la publication de documents, dans le numéro 20 du quotidien pour l’année 2008, faisant état de l’implication de membres de la fondation dans un réseau de corruption.