(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF, daté du 12 avril 2002 : VENEZUELA Evénéments du 11 avril 2002 La presse dans l’oeil du cyclone : un journaliste tué, trois autres blessés et plusieurs chaînes de télévision brièvement suspendues. Après les événements du 11 avril 2002 au cours desquels un journaliste a été […]
(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF, daté du 12 avril 2002 :
VENEZUELA
Evénéments du 11 avril 2002
La presse dans l’oeil du cyclone : un journaliste tué, trois autres blessés et plusieurs chaînes de télévision brièvement suspendues.
Après les événements du 11 avril 2002 au cours desquels un journaliste a été tué et trois autres blessés, Reporters sans frontières demande aux autorités de mener une enquête approfondie sur
les tirs dont ont été les victimes les quatre journalistes et de prendre des sanctions contre leurs auteurs. Après la brève suspension des chaînes de télévision privées le 11 avril, il semble que les médias publics, la chaîne Venezolona de Television et l’agence Venpres, ont à leur tour dû cesser le travail ce 12 avril. RSF demande aux autorités que ces médias puissent reprendre leurs activités dans les meilleurs délais et de garantir la sécurité des journalistes considérés comme proches de l’ancien Président afin de prévenir tout esprit de revanche.
Selon des informations recueillies par RSF, le photographe Jorge Tortoza, du quotidien Diario 2001, a été tué le 11 avril 2002 alors qu’il couvrait de violents affrontements entre opposants et partisans du président Hugo Chávez dans le centre de Caracas. Selon le chauffeur du journaliste, ce dernier a reçu une balle dans la tête tirée par un individu habillé en civil. Grièvement blessé, Jorge Tortoza, qui travaillait depuis dix-sept ans pour le quotidien, a été conduit à l’hôpital Vargas où il est mort peu après avoir subi une opération chirurgicale. La plus grande confusion régnait alors à
Caracas où était déployée la Garde nationale, encore fidèle au chef de l’Etat, et la police municipale, ralliée à l’opposition. Selon l’armée, des partisans en armes du chef de l’Etat avaient également ouvert le feu sur les manifestants.
Trois autres photographes de presse ont été blessés dans les mêmes circonstances. Jonathan Freitas, du quotidien Tal Cual, a été légèrement blessé au bras par un tir. Enrique Hernández, de l’agence publique Venpres, a été touché à la tête par un jet de pierre puis au ventre par une balle ayant préalablement ricoché sur un mur. Le frère de ce dernier, Luis Enrique Hernández, du quotidien Avance, a également été blessé et était toujours hospitalisé ce vendredi.
Par ailleurs, le 11 avril vers 16 heures, les chaînes privées ont vu leurs programmes suspendus. Le Président a justififié cette décision par la « campagne de diffamation » propagée par ces stations qu’il a accusées d' »inciter à la violence » et d' »irresponsabilité ». L’ordre de couper le signal hertzien de ces canaux a été donné peu après que ces chaînes, refusant de diffuser exclusivement un discours du Président, procédaient à la retransmission simultanée, en partageant l’écran en deux, d’images de la répression dont faisait l’objet la manifestation de l’opposition. Le président Chávez avait exigé la
diffusion de son discours au moment où débutait la répression. Il s’appuyait sur l »article 192 de la Loi organique sur les télécommunications établit le principe de la « cadena », un système qui permet aux autorités de réquisitionner le temps d’antenne de l’ensemble des radios et télévision qui disposent d’une concession de l’Etat. Le gouvernement avait déjà recouru aux « cadenas » à une trentaine de reprises entre lundi et mercredi.
Seule la station publique Venezolana de Television a été épargnée par la coupure du signal hertzien. La chaîne d’information continue Globovision, ainsi que les stations CMT et Televen ont disparu des écrans quelques minutes avant de pouvoir reprendre leur retransmission en utilisant le signal satellite ou le câble. Il semble que les chaînes Venevision et Radio Caracas TV, disposant dès le départ d’un système de retransmission alternatif, n’ont pas connu d’interruption de leurs programmes. Dans la soirée, les locaux de CMT ont été encerclés quelques heures par des éléments des services de renseignements militaires (Direccion de Inteligencia Militar, DIM).
Le signal hertzien a finalement été rétabli vers 22 heures, après que l’armée se fut ralliée à l’opposition au chef de l’Etat. Au même moment, les locaux de la chaîne publique étaient occupés par des éléments de la Garde nationale, qui protégeaient jusqu’alors ses installations, et ses programmes ont été à leur tour suspendus. L’agence publique Venpres a également cessé son travail d’information et son personnel était réuni dans ses locaux ce vendredi.
Une grève nationale avait débuté le 9 avril 2002 à l’appel la Confédération des travailleurs du Venezuela (CTV) et de l’organisation patronale Fedecámaras pour soutenir des cadres de PDVSA, l’entreprise pétrolière publique, renvoyés deux jours plus tôt par le président Chávez. Reconduite pour 24 heures, la grève avait finalement été déclarée illimitée par la CTV et Fedecamaras le 10 avril au soir. Le 11 avril dans la soirée, après les violents affrontements ayant provoqué une dizaine de morts et près d’une centaine de blessés, les membres de l’état-major militaire se sont déclarés en rébellion contre l’autorité du Président. Reclus dans le palais présidentiel, Hugo Chávez a signé sa démission dans la nuit, sous la pression de l’armée. Il a ensuite été conduit au fort de Tiuna, la principale base militaire de Caracas, où il est détenu. Immédiatement après, Pedro Carmona, le président de Fedecámaras, a annoncé qu’il dirigerait un nouveau gouvernement de transition. Il a affirmé que son nom faisait l’objet d’un « consensus » de la société civile vénézuélienne et du commandement des forces armées.