David Romero a reçu des menaces de mort après que son média a dévoilé des informations sur un scandale de détournement de fonds impliquant le président hondurien.
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 16 mai 2015.
Le directeur de Radio Globo au Honduras, David Romero, a annoncé jeudi 14 mai avoir reçu des menaces de mort après que son média a dévoilé des informations sur un scandale de détournement de fonds impliquant le président hondurien. Reporters sans frontières (RSF) demande à la Commission nationale des droits de l’homme (Conadeh) d’assurer la sécurité des journalistes.
Le 14 mai, le directeur de Radio Globo et Globo TV, David Romero, affirmait lors de l’émission Interpretando la Noticia détenir une vidéo montrant une réunion entre les gestionnaires de 30 fausses entreprises créées pour détourner les fonds de l’Institut de sécurité sociale du pays (IHSS) et Juan Orlando Hernandez, alors président du Congrès, aujourd’hui président du pays. Radio Globo avait déjà dénoncé un scandale à l’IHSS. Le directeur de Radio Globo assure révéler ces informations par devoir journalistique. Il refuse toute accusation de complot contre le chef de l’Etat.
Au cours de l’émission, David Romero a déclaré avoir reçu des menaces de mort. Selon les informations de RSF, il a appris l’existence de ces menaces par la voix d’un agent des services de renseignement, qui lui aurait révélé l’existence d’un contrat sur sa tête. Deux tueurs à gages auraient même été recrutés. Ces confidences ne sont pas à prendre à la légère. Radio Globo y TV a payé le prix fort son statut de média d’opposition depuis le coup d’Etat de 2009. Depuis 2011, cinq de ses collaborateurs ont été assassinés. Le 23 février dernier, le journaliste Erick Arriaga était abattu, sans que les autorités diligentent une enquête approfondie.
“Reporters sans frontières salue le courage du directeur de Radio Globo qui continue sa mission d’information d’intérêt général en dépit des menaces sérieuses qui pèsent contre lui, déclare Christophe Deloire, secrétaire général de RSF. Si une protection policière vient d’être mise en place, il est essentiel que la Commission nationale des droits de l’homme du Honduras (Conadeh) s’assure du caractère effectif de la protection et de l’existence d’une enquête indépendante, impartiale et approfondie pour identifier les auteurs des menaces.”
Ces révélations et ces menaces surviennent alors qu’un témoin clef de l’enquête sur le scandale de l’IHSS a été abattu dans l’après-midi du 14 mai à San Pedro Sula. Le détournement de fonds révélé par Radio Globo remonterait à 2012 et 2013 et représenterait au moins 300 millions de dollars. L’ancien directeur de l’IHSS, Mario Roberto Zelaya Rojas, avait été destitué de ses fonctions en novembre 2013 puis arrêté en septembre 2014 après les révélations sur ces détournements. L’affaire est d’autant plus sensible que le gouvernement a fait passer une loi début mai pour privatiser l’IHSS, avec pour conséquences la diminution des fonds publics attribués à l’Institut et une réduction des pensions accordées aux Honduriens bénéficiant de l’IHSS.
Le Honduras est parmi les pays les plus dangereux d’Amérique latine pour les journalistes. Depuis le coup d’Etat de 2009, les assassinats de journalistes sont en hausse et les lois passées par Juan Orlando Hernandez pour renforcer la militarisation de la société et les mécanismes de contrôle ont directement affecté l’accès à l’information dans le pays. Le Honduras est situé à la 132e position sur 180 pays selon le Classement mondial de la liberté de la presse de Reporters sans frontières publié en février 2015.