De manière récurrente au cours des derniers mois, des professionnels de l’information ont été attaqués, menacés et enlevés par certaines de ces milices.
Reporters sans frontières s’inquiète profondément de la dégradation de la situation sécuritaire dans le pays et de la conduite de certaines des milices envers les journalistes. De manière récurrente au cours des derniers mois, des professionnels de l’information ont été attaqués, menacés et enlevés par certaines de ces milices.
L’organisation demande expressément au gouvernement libyen de s’assurer de la sécurité des journalistes et de contrôler la conduite de certaines milices travaillant sous le commandement des ministères de la Défense et de l’Intérieur, ou intégrées ne serait-ce que de manière ad hoc aux structures de l’Etat, et de sanctionner les auteurs de ces exactions.
Le 20 mai 2013, un journaliste d’une agence de presse internationale a été arrêté à Benghazi en pleine journée par plusieurs membres d’une milice pour un “interrogatoire”. Ce journaliste a finalement été relâché en fin de soirée après avoir été frappé, insulté et menacé.
Le 28 mai, un photographe d’une agence de presse internationale et un citoyen-journaliste de Benghazi, Mohamed Abu Janah, ont été détenus arbitrairement pendant plusieurs heures au sein du QG du “Bouclier de la Libye” n°7, une entité armée formée de milices révolutionnaires opérant plus ou moins sous le ministère de la Défense. Le photographe avait été initialement appelé par l’un des commandants du Bouclier pour venir prendre des photos de leur enceinte militaire.
A leur sortie, quatre membres sont venus les chercher, ont confisqué temporairement l’appareil photo du photographe, et les ont emmenés dans une pièce pour les interroger pendant plus de quatre heures, tout en les menaçant et les insultant. Ils ont été relâchés après une manifestation de jeunes activistes organisée devant l’enceinte du Bouclier. Les milices ont expliqué la détention en arguant que les deux journalistes seraient entrés dans les locaux par effraction – accusation absolument réfutée par le photographe et Mohamed Abu Janah.
Le 29 mai à Tripoli, un journaliste américain et son fixer libyen, Mohamed Essul, ont été arrêtés par un homme armé, en civil, devant le ministère de l’Intérieur alors qu’ils essayaient de couvrir un rassemblement de milices demandant une revalorisation de leur solde et critiquant la désignation de Mohamed Sheikh comme ministre de l’Intérieur. Les deux journalistes ont ensuite été conduits au sein de la katiba (brigade) Al-Sad, qui se dit responsable de la sécurité des délégations diplomatiques, où, après un long interrogatoire sur leurs activités, un entretien avec le ministre de l’Intérieur leur a été promis. Après quelques heures, ils ont été emmenés dans une autre katiba dans le quartier de Fernaj, où, là encore, de nombreuses questions leur ont été posées concernant leur travail. Les deux hommes ont finalement été relâchés quelques six heures après, sans explication ni rencontre avec le ministre.
D’autre cas d’arrestations et de détention arbitraires, d’attaques et de menaces graves de la part de milices à l’encontre de journalistes ont également été rapportées, largement à Benghazi, mais aussi à Tripoli et dans d’autres villes du pays.
Tout en étant consciente de la difficile période transitionnelle dans laquelle se trouve le nouvel Etat libyen, Reporters sans frontières tient toutefois à rappeler les obligations internationales et nationales de la Libye en termes de libertés d’information, d’expression et d’opinion.
L’organisation incite donc urgemment les autorités à protéger les professionnels des médias travaillant en Libye et souligne que le développement d’un système de médias libres, indépendants, pluralistes et transparents se pose comme une condition nécessaire à l’établissement d’un Etat démocratique en Libye.