Reporters sans frontières (RSF) regrette cette décision, et appelle les autorités marocaines à saisir l'opportunité de la fête du trône pour mettre fin au calvaire judiciaire vécu par les deux journalistes et leurs familles depuis le début de l'année 2022.
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 19 juillet 2023.
Un an et demi après leur condamnation en appel à cinq ans et six ans de prison ferme, les journalistes Soulaimane Raissouni et Omar Radi ont vu leurs pourvois en cassation rejetés par la Cour de cassation à Rabat. Reporters sans frontières (RSF) regrette cette décision, et appelle les autorités marocaines à saisir l’opportunité de la fête du trône du 30 juillet prochain pour mettre fin au calvaire judiciaire vécu par les deux journalistes et leurs familles depuis le début de l’année 2022.
La Cour de cassation a décidé le 18 juillet à Rabat de rejeter les pourvois en cassation introduits par les journalistes Soulaimane Raissouni et Omar Radi. Une décision qui avait été reportée le 21 juin dernier, puis le 13 juillet, et que les journalistes et leurs familles attendaient avec beaucoup d’appréhension. Selon la plus haute instance judiciaire du pays, les procès des deux journalistes ont été “justes et équitables”.
La Cour de cassation a également rejeté le pourvoi en cassation du journaliste Imad Stitou, aujourd’hui en exil, et confirmé sa condamnation à un an de prison, dont six mois ferme, dans la même affaire que son confrère
Omar Radi.
“Il y avait un espoir ténu que la Cour de cassation marocaine, en se basant sur les nombreux vices de forme dûment constatés, redemande de nouveaux procès pour Omar Radi et Soulaimane Raissouni. Elle aurait envoyé un signal fort à la justice marocaine en matière de liberté de la presse et de droit des journalistes. Cet espoir a été malheureusement déçu et le signal envoyé est désastreux. RSF appelle désormais les autorités politiques marocaines à mettre un terme à ce calvaire judiciaire inhumain et à libérer Omar Radi et Soulaimane Raissouni.”
Khaled Drareni, Représentant de RSF en Afrique du Nord
Cette décision ouvre désormais la porte à deux scénarios. Tout d’abord une grâce royale qui pourrait être prise par le roi Mohamed VI en faveur des deux journalistes. Cette mesure est généralement prise après que les concernés ont formulé eux-mêmes cette demande de grâce auprès du monarque. Or, à ce jour, Omar Radi et Soulaimane Raissouni n’ont pas laissé entendre qu’ils le feraient. Le second scénario est une décision qui serait prise au sommet de l’Etat afin de décider d’une libération des détenus d’opinion et des journalistes dans le cadre d’une ouverture politique que le pays attend depuis trop longtemps.
Le soutien international contre l’arbitraire subi par les deux journalistes marocains, qui sont par ailleurs victimes d’un acharnement pénitentiaire depuis leur condamnation en appel, en février 2022 pour Soulaimane Raissouni et en mars 2022 pour Omar Radi, a pris de l’ampleur ces derniers mois. En janvier dernier, sous l’impulsion de nombreuses organisations, dont RSF, le Parlement européen a adopté une résolution historique appelant à la libération d’Omar Radi. Les parlementaires européens n’ont pas manqué de dénoncer “l’utilisation abusive des allégations d’agression sexuelle pour dissuader les journalistes d’exercer leurs fonctions” qui “met en danger les droits des femmes”. Les cas de Taoufik Bouachrine et de Soulaimane Raissouni, qui sont deux autres victimes de l’instrumentalisation d’affaires de mœurs sont également mentionnés.