Une campagne de répressions contre les médias représente un véritable recul pour la liberté de la presse et d'expression.
(RSF/IFEX) – Quatre journalistes de l’émission « Massaa Al-Kheir Benghazi » (Bonsoir Benghazi), de la radio Benghazi, arrêtés le 16 février 2010 au soir, ont été libérés le lendemain en début d’après-midi. Ces arrestations s’inscrivent dans une campagne plus générale menée par les autorités libyennes, depuis le début de l’année 2010, contre les médias, notamment les sites d’informations indépendants.
Reporters sans frontières condamne fermement ces arrestations et la campagne de répression qui s’abat depuis quelques mois sur les médias libyens qui osent critiquer les dérives du système. « Alors qu’en 2007, les autorités avaient amorcé une ouverture dans le domaine des libertés fondamentales, notamment de la liberté de presse et d’expression, nous assistons à un véritable recul. Nous exhortons les autorités libyennes à mettre un terme au harcèlement des journalistes et à débloquer les sites Internet indépendants inaccessibles depuis plus d’un mois », a déclaré l’organisation.
Sur ordre du ministère de l’Intérieur, les forces de sécurité ont arrêté, le 16 février au soir devant les bureaux de la radio à Benghazi (650 km à l’est de Tripoli), quatre membres de l’équipe du programme « Massaa Al-Kheir Benghazi »: le réalisateur Miftah Al-Qabaili, le producteur Sliman Al-Kabaili, ainsi que les journalistes Khaled Ali et Ahmad Al-Muqsabi. Ils ont été libérés le 17 février en début d’après-midi.
Le programme « Massaa Al-Kheir Benghazi » est spécialisé dans la dénonciation de la corruption administrative et financière dans la ville de Benghazi. Les journalistes abordent également des questions politiquement sensibles, telles que le massacre de la prison d’Abu Salim en juin 1996.
Le directeur de la radio, qui a suspendu l’émission, a licencié les quatre journalistes et leur a interdit l’accès aux locaux de la radio.
Ces arrestations s’inscrivent dans une campagne plus large lancée par les autorités libyennes contre les sites d’informations indépendants basés à l’étranger. Ainsi des sites tels que Libya Al-Youm, Al-Manara, Jeel Libya, Akhbar Libya, Libya Al-Mustakbal, Libya Watanna ne sont plus accessibles en Libye depuis le 24 janvier 2010. YouTube est également bloqué depuis cette date, suite à la publication en ligne de vidéos relatives aux manifestations de familles de prisonniers dans la ville de Benghazi, et d’images de membres de la famille de Muammar Kadhafi au cours de soirées.
En janvier 2010, « Oea » et « Quryana », premiers journaux privés lancés par la société Al-Ghad de Seif Al-Islam Kadhafi en août 2007, ont dû cesser de paraître, suite au refus de l’Autorité générale de la presse de continuer à les imprimer, prétextant le défaut de paiement de certaines factures. Depuis, les titres continuent à publier des articles en ligne.
Enfin, les autorités ont récemment mis en place un nouvel organe, « la députation des journalistes » (Niyaba As-Sihafa), chargé de contrôler les journalistes et les professionnels des médias qui publient des rapports et des enquêtes sur les affaires de corruption en Libye.