(RSF/IFEX) – Ci-dessous un communiqué de presse de RSF, daté du 23 juin 2000: Visite d’une mission de l’OEA les 26 et 27 juin 2000 Reporters sans frontières demande à la mission de l’OEA d’exiger des autorités péruviennes qu’elles garantissent l’indépendance de la justice Dans une lettre adressée aux deux responsables de la mission de […]
(RSF/IFEX) – Ci-dessous un communiqué de presse de RSF, daté du 23 juin 2000:
Visite d’une mission de l’OEA les 26 et 27 juin 2000
Reporters sans frontières demande à la mission de l’OEA d’exiger des autorités péruviennes qu’elles garantissent l’indépendance de la justice
Dans une lettre adressée aux deux responsables de la mission de l’Organisation des Etats américains (OEA) qui se rendra à Lima les 26 et 27 juin, Lloyd Axworthy, ministre canadien des Affaires étrangères, et Cesar Gaviria, secrétaire général de l’OEA, Reporters sans frontières (RSF) a exprimé sa « vive préoccupation » devant les atteintes répétées à la liberté de la presse au Pérou. Le « renforcement de la liberté de la presse » fait partie des objectifs de cette mission. Aussi, l’organisation a demandé à Lloyd Axworthy et Cesar Gaviria d’exiger des autorités péruviennes qu’elles « [ouvrent] une enquête sur la responsabilité du SIN [Servicio de Inteligencia Nacional – services de renseignements péruviens] dans les agressions et menaces dont ont été victimes une quinzaine de journalistes d’investigation depuis trois ans et qu’elles publient le résultat de cette enquête ». RSF a également demandé à la mission de l’OEA de faire en sorte que l’Etat péruvien garantisse
« l’indépendance de la justice vis-à-vis du pouvoir exécutif, notamment par l’abandon du système des juges provisoires qui permet au gouvernement de faire pression sur les médias critiques à son égard ».
Reporters sans frontières a rappelé qu’au cours des trois dernières années, de nombreuses atteintes à la liberté de la presse ont été imputées au SIN : écoutes téléphoniques, menaces de mort, agressions, tortures, etc. En juin 1998, Alberto Fujimori s’était publiquement engagé à ouvrir des enquêtes sur ces différents cas mais leurs conclusions n’ont jamais été rendues publiques. Aujourd’hui, les pressions continuent. Le 8 juin 2000, Monica Vecco, du quotidien La República, a reçu des menaces après la publication d’un article accusant Perú 2000, la coalition qui soutenait la candidature d’Alberto Fujimori à l’élection présidentielle, d’avoir utilisé les locaux du SIN pour produire des documents de propagande électorale.
RSF a également dénoncé l’utilisation du pouvoir judiciaire, contrôlé par le gouvernement depuis l’instauration, en 1992, d’un système de juges « provisoires » qui permet à l’exécutif de révoquer les juges, pour faire pression sur les propriétaires de médias critiques à l’égard du gouvernement. En septembre 1997, une décision de la Cour supérieure de Lima a privé définitivement Baruch Ivcher, actionnaire majoritaire de la chaîne de télévision Frecuencia Latina, de ses prérogatives sur la station après que celle-ci avait mis en cause le SIN dans ses reportages. Depuis, Frecuencia Latina a adopté une ligne progouvernementale. Aujourd’hui, sur les sept chaînes hertziennes existantes, trois sont administrées par des personnes désignées par le pouvoir judiciaire et une quatrième est actuellement en procès. L’engagement des poursuites contre un média, même par une personne privée, permet à l’exécutif, grâce au système des juges « provisoires », d’influencer le verdict. La presse audiovisuelle n’est pas la seule touchée. En mars 2000, c’est au tour du quotidien El Comercio d’être poursuivi en justice après que le journal a révélé que, sur les deux millions de signatures de soutien à la candidature d’Alberto Fujimori, plus d’un million seraient fausses. Dans cette affaire, bien qu’un juge ait ordonné le classement du dossier, celui-ci continue d’être traité.
La situation est d’autant plus préoccupante que les citoyens péruviens sont privés de tout recours devant la justice internationale depuis que, le 9 juillet 1999, le gouvernement d’Alberto Fujimori a décidé de ne plus reconnaître la compétence de la Cour interaméricaine des droits de l’homme. Cette décision, qualifiée d' »inadmissible » par la Cour elle-même, est survenue au moment où celle-ci s’apprêtait à examiner la plainte déposée par Baruch Ivcher contre l’Etat péruvien.