"Malgré les condamnations de l'ONU, le pouvoir iranien continue à infliger aux journalistes des actes de torture, et à les faire condamner, et ce dans le plus grand manque de transparence", a déclaré RSF.
(RSF/IFEX) – Une commission de l’Onu a condamné, dans une résolution adoptée le 20 novembre 2009, les « violations graves et répétées » des droits de l’homme en Iran, notamment lors de la répression des manifestations ayant suivi la réélection controversée de Mahmoud Ahmadinejad. La commission onusienne a dénoncé « le recours à la torture et aux peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, y compris la flagellation et l’amputation ».
« Malgré ces condamnations onusiennes claires, le pouvoir iranien continue à infliger aux journalistes des actes de torture, et à les faire condamner, et ce dans le plus grand manque de transparence, en imposant le huis clos. L’Assemblée générale des Nations unies doit poursuivre le travail de cette commission, en votant une résolution dénonçant l’opacité des procès politiques en cours, et les condamnations illégales et arbitraires à l’encontre de militants de l’opposition, et des journalistes », a déclaré Reporters sans frontières.
Sasan Aghaei, journaliste au quotidien « Farhikhteghan », a été arrêté, le 22 novembre 2009, à son domicile de Téhéran par des agents du ministère du Renseignement après une perquisition. Il a par la suite été transféré dans un lieu inconnu. Le journaliste, directeur du blog Azad Tribun, est le troisième collaborateur du quotidien « Farhikhteghan » à être emprisonné, après Reza Norbakhsh, rédacteur en chef et Masoud Bastani, journaliste. Ces deux derniers ont été condamnés chacun à six ans de prison ferme.
Quant au journaliste freelance Reza Rafiee Foroshani collaborateur de médias locaux et internationaux, il a été condamné à sept ans prison ferme et à cinq ans de prison avec sursis pour « espionnage ».
Mohammad Ali Abtahi, surnommé le « Mollah blogueur » condamné à six ans de prison ferme, a été libéré le 22 novembre, en échange du versement d’une caution historique de 700 millions de tomans (environ 520 000 euros). Arrêté dans la matinée du 16 juin à son domicile de Téhéran, cet ancien vice-ministre de Mohammad Khatami était également le conseiller de Mehdi Karoubi, candidat d’opposition. Il a passé 161 jours en détention.
Ahmad Zeydabahi a été condamné, le 23 novembre, à cinq ans de prison et à l’exil dans la ville de Gonabad, dans le nord-est du pays. Par ailleurs, le montant de sa caution en vue d’une libération provisoire a augmenté, passant à 350 millions de tomans (260 000 euros).
Les cinq condamnés susmentionnés ont été jugés dans le cadre des procès « staliniens » organisés à Téhéran depuis août 2009. Leurs avocats n’ont pu ni rencontrer leurs clients, ni consulter leur dossier. Des avocats commis d’office, proches des services du renseignement, ont été nommés par le procureur de Téhéran. Lors de cette parodie de procès, les journalistes étaient contraints de lire des aveux obtenus sous la pression.
Reporters sans frontières rappelle que, depuis le 12 juin, les autorités de la prison d’Evin n’informent pas les familles et les avocats des prisonniers de la situation de ces derniers.
La pression sur les journalistes emprisonnés continue. Ils peuvent être interrogés à tout moment, et tomber sous le coup de nouvelles accusations ; ils peuvent se voir interdire, sans motif précis, leur droit de visite, et peuvent être mis en isolement pour un oui ou pour un non, et être privés de soins médicaux.
Reporters sans frontières a été récemment informée de la situation particulièrement difficile dans laquelle se trouvait Mehdi Hossinzadeh. Ce journaliste, arrêté le 31 juillet dernier, a été victime de tortures, d’après des proches. Les autorités judiciaires ont gardé le silence sur son dossier depuis son interpellation.
La journaliste Jila Baniyaghoob, arrêtée le 20 juin dernier et libérée le 19 août 2009, se dit très inquiète pour son mari Bahaman Ahamadi Amoee, arrêté le même jour. Malade, il a passé plus de soixante-cinq jours à l’isolement, avant d’être transféré dans un dortoir collectif. Après une semaine dans la cellule 350, les autorités ont transféré à nouveau Bahaman Ahamadi Amoee en cellule d’isolement dans la section 209. « Je l’ai vu lundi dernier », a déclaré Jila Baniyaghoob à Reporters sans frontières. « Il était très malade, avec de la fièvre. Nous sommes très inquiets de cette absence de suivi médical. Cela fait plus de cinq mois que Bahaman a été arrêté, et son avocat n’a toujours pas pu le voir, ni même avoir accès à son dossier. »
Voir le récit de Maziar Bahari sur ses conditions de détention, le 22 novembre 2009 :