(RSF/IFEX) – Dans une lettre adressée au ministre de l’Intérieur espagnol, Jaime Mayor Oreja, RSF s’est indignée des tentatives d’attentat perpétrées dans la nuit du 17 janvier 2002 contre Enrique Ibarra, vice-président du groupe de presse Correo, Santiago Silván, directeur de Radio Nacional de España (RNE) au Pays basque espagnol, et Marisa Guerrero, responsable de […]
(RSF/IFEX) – Dans une lettre adressée au ministre de l’Intérieur espagnol, Jaime Mayor Oreja, RSF s’est indignée des tentatives d’attentat perpétrées dans la nuit du 17 janvier 2002 contre Enrique Ibarra, vice-président du groupe de presse Correo, Santiago Silván, directeur de Radio Nacional de España (RNE) au Pays basque espagnol, et Marisa Guerrero, responsable de la chaîne de télévision Antena 3 au Pays basque espagnol. « La campagne de terreur reprend à l’encontre des médias au Pays basque espagnol. Nous vous demandons une nouvelle fois de mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour lutter contre la banalisation de la violence envers la presse en Espagne », a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de l’organisation.
D’après les informations recueillies par RSF, la police autonome basque a désactivé, dans la nuit du 17 janvier, trois colis piégés, envoyés vraisemblablement par l’organisation indépendantiste armée Euskadi ta Askatasuna (ETA) au domicile des responsables de médias résidant au Pays basque espagnol. Le premier paquet, adressé à Ibarra, vice-président du groupe de presse Correo, a été localisé à Getxo vers 19h00 (heure locale), après que son destinataire a appelé la police pour signaler qu’il avait reçu un colis suspect. Après avoir découvert le premier paquet, la police a interrogé le transporteur, qui a révélé que deux autres paquets similaires avaient été envoyés par le même expéditeur, chacun portant comme signe distinctif des autocollants du syndicat patronal basque, Confebask. Le second paquet piégé était destiné au directeur de Radio Nacional de España (RNE) au pays basque, Silván, résidant à Algorta, et le troisième à Guerrero, responsable de la chaîne de télévision Antena 3 au Pays basque espagnol et résidant à Leioa. Les paquets contenaient une quantité de dynamite comparable à celle qui avait gravement blessé le journaliste Gorka Landaburu, le 15 mai 2001 (consulter des alertes de l’IFEX des 17 et 16 mai 2001). Les bombes étaient programmées pour exploser à l’ouverture du paquet.
Le groupe de presse Correo et ses journalistes font l’objet de nombreuses menaces depuis plusieurs années et a déjà subi plusieurs attaques de la part de groupes indépendantistes radicaux proches de l’ETA. Dans la soirée du 3 mars 2001, une vingtaine de cocktails Molotov avaient été jetés contre le siège du quotidien régional basque « El Correo » à Bilbao (nord du pays). Cette attaque non revendiquée, qui s’était produite alors qu’une quarantaine de personnes travaillaient à l’intérieur du bâtiment, n’avait pas fait de victime. Des débuts d’incendies avaient pu être maîtrisés rapidement (consulter l’alerte de l’IFEX du 5 mars 2001). Le 7 juillet 2000, une bombe avait explosé sans faire de victime devant les locaux du journal à Vitoria, provoquant des dégâts matériels (consulter l’alerte de l’IFEX du 12 juillet 2000). Le directeur du journal est aujourd’hui exilé à Madrid, ainsi qu’une dizaine d’autres journalistes. La Radio Nacional de España (RNE) avait déjà, elle aussi, été victime d’un attentat en 2000, lorsqu’une bombe avait été envoyée au journaliste Carlos Herrera à la rédaction de Séville (consulter des alertes de l’IFEX du 26 avril, 29 et 28 mars 2000).
RSF rappelle que les journalistes sont une cible privilégiée de la campagne de violence engagée par l’ETA dans sa lutte contre l’État espagnol. Au Pays basque espagnol, comme dans le reste du pays, à Madrid ou à Barcelone, les médias et les journalistes basques qui ne partagent pas l’idéologie nationaliste radicale sont qualifiés de « traîtres » ou « d’envahisseurs espagnols » et menacés de mort. Plusieurs ont échappé de justesse à la mort, en 2000 et en 2001, dans des attentats à l’explosif qui les visaient personnellement. José Luis Lopez de Lacalle, journaliste au quotidien « El Mundo » au Pays basque espagnol, a été assassiné au mois de mai 2000 (consulter des alertes de l’IFEX des 10 et 8 mai 2000). Dans les mois qui ont suivi cet assassinat, les menaces et les attentats à l’explosif contre les journalistes et les rédactions se sont multipliés. Le 15 mai 2001, le journaliste basque Landaburu, correspondant du magazine madrilène « Cambio 16 » et de Radio France, avait été grièvement blessé aux mains et au visage par l’explosion d’un colis piégé à son domicile, à Zarauz (nord du Pays basque espagnol) (consulter des alertes de l’IFEX des 17 et 16 mai 2001). Le 24 mai 2001, dans la matinée, Santiago Oleaga Elejabarrieta, directeur financier du quotidien basque « El Diario Vasco », a été assassiné à bout portant à Saint-Sébastien. Atteint par deux ou trois balles sur le parking de l’hôpital Maria, dans le quartier de El Antiguo de Saint-Sébastien, il est décédé sur le coup. La police régionale a attribué l’attentat à l’ETA (consulter des alertes de l’IFEX du 25 mai 2001).
Au total, près d’une centaine de journalistes bénéficient d’une protection officielle ou privée. Une dizaine de professionnels de l’information se sont « exilés » du Pays basque espagnol vers Madrid et certains médias multiplient les mesures de sécurité, notamment en s’équipant de vitres blindées et de scanners.