Ces harcèlements se produisent dans un contexte de dégradation significative des libertés et d'une offensive contre les médias indépendants et d'opposition engagée par les autorités tunisiennes depuis le début de l'année.
(OLPEC/IFEX) – L’Observatoire National pour la Liberté de Presse, d’édition et de Création (OLPEC) est très préoccupé par les harcèlements qui ciblent les journalistes indépendants. Ces harcèlements se produisent dans un contexte de dégradation significative des libertés et d’une offensive contre les médias indépendants et d’opposition engagée par les autorités tunisiennes depuis le début de l’année.
Le 13 juillet 2009, Mouldi Zwabi, grand reporter à Radio Kalima, a été harcelé par des agents en civil de la police politique alors qu’il couvrait un événement syndical dans la ville de Béjà (Nord-ouest du pays). Sept agents en civil ont soumis le journaliste à une surveillance collante allant jusqu’à écouter de façon ostentatoire les interviews que lui accordaient certains syndicalistes afin de les dissuader de s’exprimer sur son micro. Ils l’ont également arrêté longuement et sans raison apparente à l’entrée de la ville dès le matin, par la suite ils l’ont suivi dans tous ses déplacements jusqu’à l’intérieur d’un café où il s’était attablé. Ses amis et toutes les personnes à qui il s’adresse sont eux-mêmes harcelés et interrogés sur l’objet et le contenu des échanges qu’il a eu avec elles.
Ce n’est pas la première fois que ces agents exercent ces pressions sur le journaliste. A plusieurs reprises il a été soumis à cette surveillance collante qui s’est poursuivie à l’intérieur d’un cabinet médical où sa femme se soignait ainsi que devant les domiciles de ses proches à qui il rendait visite.
En raison des reportages qu’il a effectués pour Radio Kalima, Mouldi Zwabi a subi une répression constante depuis février 2009. Son domicile est sous une surveillance permanente de policiers en civil qui harcèlent sa famille.
Le 18 février 2009, Mouldi Zwabi a fait face à une procédure d’expulsion d’un bureau qu’il loue à Bousalem, où il réside, et qu’utilise sa femme comme copy shop, suite aux pressions exercées par la police sur le propriétaire visant à l’expulser de ce bureau. Un jugement d’expulsion en référé a été rendu et il a été exécuté en son absence le 18 mars 2009 par la force publique. Ses documents personnels ont été fouillés par la police qui a apposé les scellés sans lui laisser l’opportunité de prendre ses affaires. Pour s’assurer de son absence, Mouldi Zwabi avait été convoqué au même instant par le procureur de la république de Jendouba pour être entendu dans une affaire de plainte pour violences aggravées qu’il avait déposée deux ans auparavant contre la police de Jendouba et qui est toujours sans suites.
Le 5 mai 2009, alors qu’il tentait de déposer une plainte pour entraves à la libre circulation au parquet de Béjà, les agents de police l’ont empêché d’accéder au palais de justice.
RAPPEL DES FAITS:
Suite au raid opéré par la police politique le 30 janvier 2009 dans les locaux de radio Kalima après un siège de plusieurs jours autour de l’immeuble, les journalistes qui ont continué à travailler pour Radio Kalima ont subi une persécution constante (interpellations et fouille au corps, filature collante, confiscation de matériel, etc.). Rappelons que les scellés sont toujours apposés sur les bureaux de Radio Kalima et une équipe de police permanente interdit l’accès de l’immeuble à toute personne, y compris aux membres du Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT) et de l’OLPEC dont les locaux se trouvent dans le même immeuble à l’étage en dessous. Le juge d’instruction en charge de l’affaire lancée contre l’une des rédactrices en chef de Kalima, Sihem Bensedrine, pour « transmission radiophonique sans l’obtention d’une autorisation légale », a informé dernièrement les avocats de Kalima qu’il poursuit son investigation et attend les conclusions de l’expert chargé d’expertiser les équipements confisqués lors du raid.
Par ailleurs, les autorités tunisiennes refusent toujours de renouveler le passeport de Sihem Bensedrine depuis un an (demande déposée le 10 juillet 2008), par mesure de représailles. Elles refusent également de délivrer un passeport à son fils, étudiant en France, qui a déposé lui aussi une demande de renouvellement le 15 juillet 2008, suite au vol de son passeport à Paris. Il se trouve actuellement sans aucun document d’identité et dans l’impossibilité de se déplacer.
L’OLPEC:
– il dénonce les harcèlements contre les journalistes des médias indépendants et notamment contre Mouldi Zwabi et exige que cesse ces harcèlements et qu’il puisse travailler en toute sécurité loin de toute persécution policière ainsi que sa famille.
-il exige que soient levés les scellés contre le studio de Radio Kalima et suspendues les poursuites contre Sihem Bensedrine et qu’elle puisse bénéficier ainsi que son fils d’un passeport.
Pour l’Observatoire
Le Président
Mohamed Talbi