Le Syndicat turc des journalistes a demandé l'ouverture d'une enquête afin de déterminer les circonstances de la mort du journaliste.
(RSF/IFEX) – Le 9 juin 2010 – Le chargé de presse de la Fondation d’aide humanitaire IHH, Cevdet Kiliçlar, tué d’une balle dans la tête le 31 mai dernier, au début de l’assaut du Mavi Marmara, a été enterré le 4 juin, à Istanbul. Diplômé du département de communication de l’université Marmara d’Istanbul, il avait collaboré avec des périodiques islamistes tels que ‘Selam’ (Salut), ‘Vakit’ (Temps) et ‘Milli Gazete’ (Journal National). Travaillant pour ce dernier journal, il avait fait la demande d’une carte de presse officielle, dite ‘la carte de presse jaune’. Dernièrement, il avait travaillé en tant qu’éditeur du site de la fondation IHH, en charge d’établir les relations avec les médias. Il a été tué à bout portant par des soldats israéliens, le 31 mai 2010.
Le Syndicat turc des Journalistes (TGS) a protesté contre ce qui peut être qualifié de meurtre et a demandé l’ouverture d’une enquête afin de déterminer les circonstances de la mort du journaliste.
Alors que tous les journalistes détenus par les autorités israéliennes ont été expulsés, les témoignages se multiplient.
Mediha Olgun (journaliste turque du quotidien Sabah) :
« J’ai été libérée 72 heures après le début de l’opération militaire. Forcée de rentrer dans des cabines, ils m’ont intégralement fouillée. Ils ont coupé les talons de mes chaussures pour voir si je ne cachais rien. Ils ont ainsi retrouvé les doubles des images que nous avions ainsi conservés. Ils ont saisi mon ordinateur portable, mon appareil photo, mon portable. Tout ce que j’ai pu sauver, c’est mon passeport. Ils ont aussi pris nos photos. »
Ayse Sarioglu (journaliste turque du quotidien Taraf) :
« J’ai été terrifiée lorsque j’ai vu Kiliçlar à terre. C’est là que j’ai pleuré. . . Ils ont vraiment tout fouillé ! Du bateau, on nous a dirigés vers un hangar du port d’Ashdod, où nous avons été interrogés. J’ai été humiliée par un agent homme, alors que la fonctionnaire femme était, elle, très polie. Lors de l’interrogatoire, il m’a craché dessus, me traitant d’idiote. On m’a même tiré la langue. Je n’en croyais pas mes yeux, c’était tellement inhumain !
On nous a accusés d’avoir approché de 10 miles le territoire israélien. J’ai répondu qu’on était à 70 miles et dans les eaux internationales. ‘Vous saviez que Gaza était interdite.’ Alors j’ai dit ‘Oui, mais ce n’est pas moi qui ai choisi de venir ici. Je suis journaliste et c’est mon travail.’ ‘Peu importe que vous soyez journaliste, vous avez enfreint une règle.’ Ils m’ont demandé de signer un procès-verbal mais j’ai refusé, demandant un traducteur de l’ambassade turque. ‘Que vous signiez ou pas, vous serez extradée.’ Nous avons été fouillés très minutieusement, entre les orteils, dans les cheveux, aux gencives, sous la langue, etc. On nous a emmenés à la prison de Beer Sheva. Encore questionnée, on m’a demandé si je faisais partie du Hamas ou d’Al-Qaida. On m’a également demandé s’il y avait des Palestiniens dans ma famille.
J’ai pu appeler et parler avec ma famille pendant une minute seulement et en anglais. Le lendemain après-midi, on a été mis en contact avec des responsables de l’ambassade turque. On a passé une deuxième nuit dans une cellule de la prison. Et le matin, à 6h00, on nous a réveillés, distribué nos passeports et transférés en bus à l’aéroport Ben Gourion. . . »
Erhan Sevenler (journaliste turc de l’agence semi-officielle Anatolie-AA) :
« Lorsque nous avons appris la présence des bateaux militaires et d’un sous-marin aux alentours, on a commencé à prendre des mesures. Tous les journalistes se sont rassemblés à l’arrière du bateau pour filmer ce qui allait se passer. Vers 4h00 du matin, 15 à 20 zodiacs ont encerclé le bateau. Très rapidement, un hélicoptère a fait descendre des commandos au haut de la cabine de contrôle. Lorsque je me suis précipité dans cette direction, les personnes dans le bateau ont attrapé un soldat. Jusque-là, je croyais que les balles utilisées étaient en plastique. Mais à partir de ce moment-là, j’ai compris qu’il s’agissait de balles réelles. Les vitres de la cabine de contrôle ont explosé sous l’impact des balles. Alors, les journalistes se sont réfugiés dans le bureau réservé à la presse. »
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