"Les censeurs chinois se dotent d'un niveau supplémentaire de contrôle", déclare RSF.
(RSF/IFEX) – Les rangs des censeurs chinois grossissent à vue d’œil, parallèlement à la multiplication des procédures destinées à mieux contrôler les communications et les données personnelles de la population. Les autorités chinoises ont ordonné aux sites de microblogging de se doter d’un « commissaire d’autodiscipline » chargé d’assurer la censure. Par ailleurs, les personnes désireuses de se procurer des téléphones portables avec cartes SIM prépayées doivent désormais révéler leur identité.
« Les censeurs chinois se dotent d’un niveau supplémentaire de contrôle. La Grande Muraille Électronique acquiert des renforts humains pour mieux renforcer son efficacité. En raison de l’ampleur des informations qui circulent en ligne et dont ils seront responsables auprès des autorités chinoises, ces commissaires semblent investis d’une mission impossible s’ils sont tenus à des critères stricts de réussite. En revanche, leur simple existence est dangereuse car ils disposent d’une capacité de nuisance. Ce développement pourrait inciter davantage de microblogueurs à l’autocensure. Parallèlement, sous couvert de lutter contre les spams, un nouveau coup est porté aux données personnelles des citoyens chinois qui utilisent des téléphones portable », a déclaré Reporters sans frontières.
La création de ces « commissaires d’autodiscipline » a été annoncée lors d’une réunion sur le management d’Internet le 27 août 2010. D’après la presse officielle, le premier test d’autocenseurs pour les microblogueurs en Chine a été effectué en janvier 2010 dans la province du Hebei, et ses résultats jugés satisfaisants ont incité les autorités à élargir son application à Pékin, à huit plateformes de microblogging : Sina, Sohu, NetEase, Iphonixe, Hexun, Soufang, 139Mobile et Juyou9911. Ces dernières vont recruter ces commissaires, chargés de surveiller et de censurer tout ce qui pourrait mettre en danger la sécurité du pays et la stabilité de la société. Sont concernées les informations liées à des activités illégales, à la pornographie ou à la violence, ainsi que les rumeurs infondées et les questions politiques sensibles. Chaque commissaire sera rattaché à un site, dont il sera responsable du contenu, tout en conservant son indépendance opérationnelle. Il jouira d’une position indépendante par rapport à l’Association des journalistes de Chine, une organisation officielle. Cette annonce fait suite à une vague de censure lancée à la mi-juillet contre les médias participatifs et en particulier les microblogs, très en vogue chez les internautes chinois.
Ce n’est pas la première fois que les autorités obligent des médias en ligne à se policer. En août 2007, la Société Internet de Chine (SIC), affiliée au ministère chinois de l’Industrie de l’Information, avait élaboré un « Pacte d’autodiscipline », signé par par plus d’une vingtaine d’entreprises qui hébergent des blogs en Chine, dont Msn.cn, Renmin Wang, Xinlang, Sohu, Wangyi, Tom, Qianlong Wang, Hexun Wang, Boke Tianxia, Tianji Wang, Yahoo.cn, Huasheng Zaixian, Bolianshe, Tengxun. En vertu de ce texte, le gouvernement peut désormais contraindre les entreprises à censurer le contenu des blogs et à identifier les blogueurs jugés « subversifs ».
En 2002, près de trois cents sites et fournisseurs d’accès à Internet avaient signé le « Pacte d’autodiscipline » promu par l’Association chinoise de l’Internet, s’engageant ainsi à « ne pas produire ni diffuser des documents nuisibles ou des informations susceptibles de mettre la sécurité nationale et la stabilité sociale en péril ; d’enfreindre les lois et les réglementations, de répandre de fausses nouvelles, des superstitions et des obscénités ». Le texte prévoyait également la coopération des sites dans la lutte contre la cybercriminalité ou le non-respect des droits de propriété intellectuelle.
Ce contrôle accru sur les sites de microblogging s’est accompagné d’une nouvelle offensive des autorités contre les serveurs proxies utilisés par les internautes chinois pour contourner la Grande Muraille Électronique. L’accès aux proxies Freegate et Ultrareach, parmi les plus populaires, a été rendu très difficile pendant plusieurs jours à compter du 27 août. Leurs développeurs ont réagi en mettant à la disposition des internautes une version actualisée de leurs logiciels, pour répondre à cette nouvelle vague de blocage. Le jeu du chat et de la souris entre censeurs et promoteurs de techniques de contournement continue.
( . . . )