(RSF/IFEX) – Dans une lettre adressée au ministre de l’Information russe, Mickaïl Lessine, RSF a protesté contre les pressions exercées par la société d’Etat Gazprom, principal créancier du groupe Media Most, sur le quotidien « Segodnia » et l’hebdomadaire « Itogui ». « Les deux publications les plus influentes et les plus critiques envers le pouvoir sont sommées de quitter […]
(RSF/IFEX) – Dans une lettre adressée au ministre de l’Information russe, Mickaïl Lessine, RSF a protesté contre les pressions exercées par la société d’Etat Gazprom, principal créancier du groupe Media Most, sur le quotidien « Segodnia » et l’hebdomadaire « Itogui ». « Les deux publications les plus influentes et les plus critiques envers le pouvoir sont sommées de quitter le groupe, ou de changer leur ligne éditoriale. Qui peut encore douter du caractère politique de cette affaire, prétendument juridico-financière ? » a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de l’organisation. « Nous demandons à l’Etat russe de renoncer à prendre le contrôle du groupe Media Most, et de garantir le pluralisme de l’information en Russie », a ajouté Ménard.
Selon les informations recueillies par RSF, les dirigeants de Sem Dnei, la maison d’édition de Media Most, groupe de presse qui devrait être repris par la compagnie d’État Gazprom dans le cadre du remboursement de ses dettes, auraient décidé de cesser de publier « Segodnia » à compter du 1er mai 2001. Quotidien politique influent, diffusé à 55 000 exemplaires dans les grandes villes de Russie, « Segodnia » s’est montré particulièrement critique envers le gouvernement russe, sous la présidence de Boris Eltsine puis de Vladimir Poutine. Le magazine d’informations « Itogui » pourrait, de la même façon, être contraint de quitter le groupe pour préserver sa liberté éditoriale. La compagnie Gazprom, principal créancier du groupe Media Most, est sur le point de prendre le contrôle du groupe de presse et possède déjà 46% des actions de la chaîne de télévision NTV – seule télévision privée captée sur tout le territoire de la Fédération de Russie – et la majorité des droits de vote, après la mise sous séquestre par la justice russe, en janvier, de 19% des actions du groupe.
Le patron de Media Most, Vladimir Goussinski, est maintenu en détention en Espagne, en attendant la décision de la quatrième section de la chambre pénale du tribunal de Madrid sur la demande d’extradition déposée à son encontre par le parquet de Russie. Cette décision devrait être rendue dans la semaine. La procédure d’appel, puis l’examen de l’affaire en conseil des ministres, devraient vraisemblablement repousser la décision définitive de plus d’un mois. RSF rappelle que Goussinski a été l’objet d’un chantage auxquels sont mêlés le ministre russe de l’Information lui-même et le groupe Gazprom. Incarcéré en juin 2000 pour « privatisation frauduleuse », Goussinski avait été libéré, et les charges retenues contre lui immédiatement levées, suite à la signature d’un accord secret avec Gazprom, paraphé par le ministre de l’Information, Lessine, garantissant l’abandon des poursuites judiciaires contre la cession du groupe de presse à la compagnie d’État. La dénonciation de cet accord lui vaut aujourd’hui le chef d’inculpation d' »escroquerie à grande échelle ».
Dés le 14 décembre, RSF est intervenue auprès du ministre espagnol de la Justice au sujet de l’éventuelle extradition vers la Russie de Goussinski, propriétaire du groupe Media Most, pour lui demander de « bien considérer les implications d’une décision qui pourrait être lourde de conséquences pour le pluralisme de l’information en Russie ».