Dans son communiqué, le Conseil supérieur de la communication précise que les programmes de santé, ceux à caractère ludique, sentimental ou encore culturel ne seront pas affectés "à condition (qu’ils) demeurent dans leur objet."
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 12 mai 2015.
Reporters sans frontières (RSF) appelle le Conseil supérieur de la communication burkinabè à revenir sur sa décision de suspendre pour trois mois les émissions en direct aussi bien à la télévision qu’à la radio. A l’approche de la période électorale, l’organisation dénonce un grave cas de censure.
Le Conseil supérieur de la communication (CSC) au Burkina Faso a annoncé la semaine dernière sa décision de suspendre “les émissions d’expression directe sur les radiodiffusions sonores et télévisuelles” à compter du 7 mai 2015, pour cause de “nombreux manquements”, sans pour autant les préciser. Dans son communiqué, il précise que les programmes de santé, ceux à caractère ludique, sentimental ou encore culturel ne seront pas affectés “à condition (qu’ils) demeurent dans leur objet”. Par cette mesure, l’instance de régulation entend surtout contrôler les émissions et propos à caractère politique qui seront désormais enregistrés et filtrés au préalable, de peur qu’ils ne puissent nuire à la “cohésion sociale et à la réussite des élections à venir” en octobre prochain.
“Reporters sans frontières appelle le CSC à revenir sur sa décision de suspendre des émissions interactives populaires diffusées en direct qui permettent à la population burkinabè de faire entendre sa voix et de s’informer, déclare Lucie Morillon, directrice des programmes de RSF. Alors que le climat social demeure fragile en cette période de transition, l’accès à l’information à chaud est primordial et les débats et échanges en direct à l’approche de la période électorale sont essentiels et doivent pouvoir avoir lieu sans bride”.
Cette mesure de suspension est largement contestée par les organisations professionnelles des médias, la société civile ou encore par certains officiels. Par un communiqué du 11 mai dernier, les organisations professionnelles des médias ont dénoncé l’injustice de cette mesure qui “frappe indistinctement les médias respectueux des règles des émissions interactives (…) et ceux qui ne les respectent pas du tout”. Ce matin, le président de Conseil national de la transition, Assemblée intérimaire du Burkina, Sheriff Sy a condamné la décision du CSC et l’a invité à revoir sa copie.
Le 31 octobre 2014, le peuple burkinabè chassait du pouvoir son président Blaise Compaoré après 27 années à la tête du pays. Il se prépare à présent à élire un nouveau président et une nouvelle assemblée au sortir d’une “transition démocratique” d’un an en octobre 2015. Le pays occupe la 46e place sur 180 pays dans le Classement 2015 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières.