L’Internet mobile et fixe a été coupé dès le matin du premier tour et l’accès aux réseaux sociaux et l’utilisation de SMS sont toujours impossibles. Ce sont autant de freins à la libre information des citoyens tchadiens.
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 13 avril 2016.
Reporters sans frontières déplore (RSF) les mesures prises par les autorités tchadiennes à l’occasion du premier tour de l’élection présidentielle au Tchad. La coupure d’Internet et le blocage des SMS, ainsi que la suspension temporaire des accréditations de trois journalistes français, a accru la pression d’un scrutin qui se déroule sous haute surveillance policière et militaire.
L’Internet mobile et fixe a été coupé dès le matin du premier tour et n’était pas pleinement rétabli ce mardi 12 avril. L’accès aux réseaux sociaux et l’utilisation de SMS sont toujours impossibles. Ce sont autant de freins à la libre information des citoyens tchadiens, alors que se tenait un scrutin qui pourrait voir le président sortant Idriss Déby Itno, au pouvoir depuis 1990, remporter un cinquième mandat.
Outre les atteintes aux télécommunications, RSF dénonce l’impossibilité pour une équipe de tournage de TV5 Monde de couvrir sereinement le dépouillement des suffrages. Un journaliste, un cameraman et un monteur de la chaîne de télévision francophone se sont vus empêchés de travailler pendant 24 heures. Alors qu’ils filmaient une altercation entre des policiers et des électeurs mécontents de ne pas avoir pu voter, dans la banlieue de Ndjamena dimanche 10 avril, leur caméra a été saisie par les forces de l’ordre. Le matériel leur a été restituée au commissariat central de la capitale, mais la scène des violences a été soigneusement effacée.
Le ministère de la Communication a annoncé dans la foulée que les accréditations délivrées à la presse internationale n’étaient plus valables. Pourtant dûment accrédités jusqu’au 20 avril pour la couverture de l’élection, les trois salariés de TV5 ont attendu 24 heures avant de pouvoir reprendre normalement leur travail. “Le Haut Conseil de la Communication a parlé de “dysfonctionnement” et nous a présenté des excuses, explique le journaliste de TV5 Guillaume Valladier. On nous a même ensuite proposé de couvrir certains événements. On sent qu’il y a des ordres contradictoires.”
“Les conditions d’une couverture pluraliste de ce premier tour n’ont pas été garanties aux citoyens tchadiens par les autorités, qui en sont pourtant les garantes, déclare Constance Desloire du bureau Afrique de RSF. Des journalistes tchadiens de médias indépendants ont également eu des difficultés, dès la veille du scrutin, pour couvrir le vote anticipé des militaires et des nomades.”
Depuis un an, le harcèlement de journalistes et de médias nationaux, ainsi que l’expulsion violente d’un reporter français, ont entretenu un climat de pression sur la presse. Et ce n’est pas la première fois que le régime bloque la Toile lorsque circulent des informations qui lui sont défavorables. En février dernier, déjà, Facebook avait subi des tentatives de blocage. La révélation d’une affaire de viol collectif d’une adolescente avait entraîné des manifestations populaires.
Le Tchad occupe la 135è place dans l’édition 2015 du Classement établi par RSF.