En décidant de déclencher l'article 7 du traité sur l'Union européenne contre Varsovie, la Commission frappe fort. RSF se félicite de ce passage mais regrette que Bruxelles n'apporte pas de réponses aux attaques répétées du gouvernement polonais contre les médias.
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 20 décembre 2017.
En décidant mercredi 20 décembre 2017 de déclencher l’article 7 du traité sur l’Union européenne contre Varsovie, la Commission frappe fort. Reporters sans frontières (RSF) se félicite de ce passage à l’acte préconisé par l’organisation depuis de nombreux mois mais regrette que Bruxelles n’apporte pas de réponses aux attaques répétées du gouvernement polonais contre les médias.
Pour la première fois dans l’histoire de l’Union européenne, la Commission a décidé mercredi 20 décembre de déclencher la procédure de l’article 7 du traité sur l’Union européenne contre la Pologne pour « sauvegarder l’Etat de droit ». Jamais encore utilisé, cet article du traité de l’Union européenne permet au terme d’une procédure complexe de déboucher sur une suspension des droits de vote d’un pays au sein du Conseil de l’Union, qui regroupe les 28 Etats membres.
« Nous nous félicitons de cette décision qui marque une volonté de défendre le modèle démocratique européen. Après deux ans de dialogue de sourds entre Bruxelles et Varsovie, il était indispensable d’enclencher la procédure de l’article 7. Le gouvernement polonais doit comprendre qu’il ne peut pas impunément piétiner les valeurs européennes et menacer la démocratie », déclare Julie Majerczak, représentante de Reporters sans frontières à Bruxelles. RSF regrette cependant que la Commission ne retienne que le volet judiciaire et laisse de côté les attaques du gouvernement ultraconservateur PiS contre les médias.
La situation en Pologne est alarmante. Au delà de la réforme de la justice qui risque de réduire à néant l’indépendance du système judiciaire, tous les contre-pouvoirs, la liberté de la presse en particulier, sont menacés et de nombreuses libertés fondamentales sont mises à mal.
Après avoir pris le contrôle des médias publics, le gouvernement polonais multiplie désormais les actions d’intimidation contre les journalistes indépendants qui critiquent la politique gouvernementale et cherche à étrangler les médias critiques en leur imposant des amendes astronomiques.
« Ces attaques ne peuvent rester sans réponses. Il est indispensable que l’action de l’Union européenne ne se limite pas à la réforme de la justice, mais englobe toutes les violations des valeurs européennes visées à l’article 2. C’est l’agenda anti-démocratique du gouvernement polonais qui doit être refusé par l’UE, » déclare Pauline Adès-Mével, responsable de la zone UE-Balkans de RSF.
Le pays, qui occupe le 54ème rang (sur 180) au Classement mondial de la liberté de la presse RSF 2017, a encore perdu sept places cette année après un recul spectaculaire de 29 places l’année précédente.