(RSF/IFEX) – Amir Mir, directeur adjoint du mensuel « Herald », est l’objet d’une campagne d’intimidation depuis que le président Pervez Musharraf l’a accusé de « ternir l’image internationale » du Pakistan. Déjà en juin 2003, ce journaliste avait été renvoyé du « Weekly Independent » après des pressions du chef de l’État. À l’occasion de la visite officielle en France […]
(RSF/IFEX) – Amir Mir, directeur adjoint du mensuel « Herald », est l’objet d’une campagne d’intimidation depuis que le président Pervez Musharraf l’a accusé de « ternir l’image internationale » du Pakistan. Déjà en juin 2003, ce journaliste avait été renvoyé du « Weekly Independent » après des pressions du chef de l’État.
À l’occasion de la visite officielle en France du Premier ministre pakistanais Zafarullah Khan Jamali, les 8 et 9 décembre, RSF attire l’attention du gouvernement français sur le sort de Mir, victime, depuis mars, de harcèlement des autorités lié à ses articles. L’organisation a adressé une lettre au Premier ministre Jean-Pierre Raffarin afin qu’il intervienne auprès du chef du gouvernement pakistanais en faveur du journaliste. « La France se doit de rappeler au Premier ministre son attachement à la liberté de la presse. Les campagnes d’intimidation contre les journalistes d’investigation sont malheureusement courantes au Pakistan », a affirmé l’organisation.
Le 22 novembre, des inconnus ont incendié la voiture de Mir, directeur adjoint du mensuel anglophone « Herald ». Des coups de feu ont également été tirés devant le domicile du journaliste à Lahore (province du Pendjab, est du pays). Le gouvernement a nié toute implication dans ces incidents, qui font néanmoins suite à une longue série de menaces et de pressions à l’encontre de ce journaliste d’investigation réputé, de la part de hauts responsables militaires et civils, notamment le ministre de l’Information, Rasheed Ahmed, et le chef des services secrets militaires du Pendjab, Arslan Ali Khan. Le général Rashid Qureshi a également accusé le journaliste d’être un « agent indien » pour avoir écrit un article dans le magazine indien « Outlook ».
Mir a déclaré à RSF craindre pour sa vie. « Je reçois des messages indirects des autorités qui me demandent de quitter le Pakistan (. . .) J’ai déjà averti mes proches que, s’il m’arrive quelque chose de plus grave, le général Musharraf devra en porter directement la responsabilité (. . .) Dans ce contexte, j’ai très peur pour la sécurité de ma famille ». Le 7 novembre, des dizaines de journalistes ont manifesté leur solidarité à Mir, à Islamabad.
Ces intimidations font suite à des propos tenus par Musharraf, le 20 novembre, lors d’une réception à laquelle assistaient les principaux directeurs de publication pakistanais. Le chef de l’État avait expliqué que les responsables du « Herald » et du mensuel « Newsline » n’avaient pas été invités car ils avaient publié des articles qui « ternissaient l’image internationale du Pakistan ». « Certains journaux pakistanais publient des articles néfastes qui soutiennent les allégations indiennes et donc mettent à mal nos intérêts nationaux », a déclaré Musharraf en réponse à une question sur la présence au Pakistan de Dawood Ibrahim, un chef mafieux indien. En août et en novembre, le mensuel « Herald » avait publié des enquêtes de Mir sur ce sujet.
Le 18 mars, Mir, alors rédacteur en chef du « Weekly Independent », avait publiquement dénoncé les menaces dont il était l’objet de la part du ministre de la Sécurité de l’État du Pendjab, un ancien responsable des services secrets ISI. Le 13 juin, Mir avait été contraint à la démission après plusieurs mois de pressions des autorités le sommant de modifier sa ligne éditoriale. D’après le magazine, le président Musharraf aurait lui-même présidé une réunion organisée à Lahore, à l’issue de laquelle des mesures concrètes à l’encontre du « Weekly Independent » avaient été décidées, notamment la suppression de la publicité publique. Dans un éditorial daté du 12 juin, Mir avait écrit : « Dans un pays où l’armée domine la vie politique, et où les forces de l’ordre appellent les éditeurs et les propriétaires de journaux pour leur dire ce que les publications doivent contenir et ne pas contenir, faire vivre un journal n’est pas chose facile ».