(JED/IFEX) – Le tribunal de Paix de Kinshasa/Gombe a condamné, le 5 janvier 2004, neuf syndicalistes de la chaîne publique Radiotélévision nationale congolaise (RTNC) à 12 mois de prison ferme et au paiement de dommages et intérêts de 2 500 $US chacun pour diffamation et dénonciation calomnieuse à l’endroit de Kikaya bin Karubi, ancien ministre […]
(JED/IFEX) – Le tribunal de Paix de Kinshasa/Gombe a condamné, le 5 janvier 2004, neuf syndicalistes de la chaîne publique Radiotélévision nationale congolaise (RTNC) à 12 mois de prison ferme et au paiement de dommages et intérêts de 2 500 $US chacun pour diffamation et dénonciation calomnieuse à l’endroit de Kikaya bin Karubi, ancien ministre de la communication et presse.
L’affaire commence fin février 2003, lorsqu’une assemblée générale des journalistes et agents de la RTNC réunie régulièrement au sein même de la RTNC demande la démission de Kikaya, à l’époque ministre de la communication et presse, et la réhabilitation du directeur général suspendu de la RTNC, Luboya Mvidie. Un cameraman, John Ngomba, est suspendu de ses fonctions pour avoir filmé et diffusé la fronde des journalistes et agents de la chaîne publique. A l’issue de l’assemblée générale, neuf délégués syndicaux de la chaîne publique adressent un mémo au président Joseph Kabila avec copies à toutes les autorités de la République démocratique du Congo (RDC) dénonçant, entre autre, dans le chef du ministre Kikaya, « le détournement de deux émetteurs radio télévision du lot des équipements achetés par la RDC (et) le détournement des recettes du loyer du patrimoine de la RTNC », et demandant son limogeage.
Le 20 mars, l’avocat du ministre, Gustave Booloko, dépose, au nom de son client, une plainte pour diffamation à l’encontre des neuf journalistes et agents de la RTNC. Dans sa plainte, l’avocat dit que son « client qui est loin d’être leur employeur et qui réfute les faits lui imputés avec légèreté et intention de nuire, estime que le contenu du mémo dont question dépasse les limites d’une démarche syndicale et réalise l’infraction de droit commun d’imputations dommageable (diffamation) prévue et punie par l’article 74 du Code pénal livre II ». Dès le dépôt de cette plainte auprès de l’office du procureur de la République près le tribunal de Grande Instance de Kinshasa/Gombe, une chasse à l’homme va être organisée contre les journalistes et agents de la RTNC signataires du mémo.
Entre menaces et intimidations, le procès va connaître un déroulement normal qui sera troublé par le déclenchement, au mois d’octobre, de la grève des magistrats qui réclamaient de meilleures conditions de travail et une rémunération à même de garantir leur indépendance. Un communiqué de presse diffusé par les journaux, paru le 7 janvier 2004, annonce que le syndicat autonome des magistrats a décidé, le 5 janvier, de mettre fin à la grève afin de permettre « au gouvernement et au parlement de négocier dans la sérénité avec la magistrature ».
JED constate que c’est justement le 5 janvier que le tribunal de Paix de Kinshasa/Gombe a rendu son verdict dans l’affaire opposant l’ancien ministre Kikaya au groupe des neuf journalistes et agents de la RTNC signataires du mémo incriminé. C’est par la presse que les journalistes et agents condamnés ont appris la sentence du tribunal. Contactés par JED, deux des personnes condamnées ont affirmé n’avoir pas encore été notifiées de la décision du tribunal. « Nous avons appris, comme vous, par la presse de ce matin notre condamnation à une peine de 12 mois de prison et 2 500 $US chacun d’amende », a déclaré à JED Richard Kalala Tshitenge, l’un des concernés.
Les personnes condamnées sont les suivantes : Mvidie, Tshitenge, Shango Onokoko, Soki Muanda, Gusonega, Batudianga, Nkanza, Mantuala et Basilua. Les concernés n’étaient pas présents au tribunal lors du prononcé de la sentence et sont encore en liberté.