(MFWA/IFEX) – Les médias nigériens ont tiré la sonnette d’alarme sur l’existence de la famine au Niger depuis de nombreux mois. C’est l’hebdomadaire gouvernemental « Sahel Dimanche » qui a alerté l’opinion sur l’existence de la famine à travers un reportage dans son édition n° 1130 du 29 avril 2005. Mais à l’époque, les autorités nigériennes, particulièrement […]
(MFWA/IFEX) – Les médias nigériens ont tiré la sonnette d’alarme sur l’existence de la famine au Niger depuis de nombreux mois. C’est l’hebdomadaire gouvernemental « Sahel Dimanche » qui a alerté l’opinion sur l’existence de la famine à travers un reportage dans son édition n° 1130 du 29 avril 2005. Mais à l’époque, les autorités nigériennes, particulièrement le Président de la République, Tandja Mamadou, n’ont pas apprécié la publication de ce dossier par l’organe gouvernemental. La rédactrice en chef du journal, Tchirgni Maïmouna, qui a réalisé le reportage, a été relevée de ses fonctions et mise en congé de trois mois.
A la même période, une envoyée spéciale de Radio France Internationale (RFI), Donaig Le Du, a effectué de nombreux reportages dans les régions de Maradi et Tahoua, localités les plus touchées par la famine et dans lesquelles l’ONG Médecins sans frontières (MSF) a installé des camps de récupération des enfants mal nourris.
Suite à la diffusion de ses reportages sur les antennes de RFI, la journaliste a subi des attaques de la part de la télévision publique, Télé Sahel. Dans un éditorial lu à la grande édition du journal du soir, le journaliste Ismaël Iboun Guèye a indiqué que l’envoyée spéciale de RFI n’avait d’autre objectif que celui de ternir l’image du Niger. Il a ajouté qu’elle n’était pas allée sur le terrain et qu’elle avait imaginé son reportage à partir de sa chambre d’hôtel de la ville de Maradi.
En dépit de la détermination des autorités nigériennes à nier l’existence de la famine, la presse indépendante a publié plusieurs articles sur le thème, avec des photos des personnes affamées. Les radios privées ont également fait des magazines sur le sujet, en donnant la parole aux populations sinistrées. La télévision indépendante TENERE a notamment fait un reportage remarquable sur le site de récupération de MSF à Maradi et dans d’autres régions.
Il faut retenir que la presse indépendante dans son ensemble a unanimement couvert le phénomène de la famine et interpellé les autorités. Les journalistes ont, à plusieurs reprises, dénoncé l’inertie et l’indifférence des pouvoirs publics.
La presse a par ailleurs joué son rôle de chien de garde en surveillant la régularité de la distribution des vivres aux populations sinistrées. Ainsi, les journaux ont rapporté plusieurs cas de détournement de vivres par les responsables du régime en place, particulièrement les députés, qui s’arrogeaient une bonne partie des vivres pour entretenir leur clientèle politique.
Cette dénonciation a donné lieu à une plainte du gouverneur de la région d’Agadez (environ 1000 kilomètres au nord de Niamey, capitale du Niger), Yahaya Yandaka, contre le journaliste Hamed Assaleh Raliou, directeur de la radio indépendante SAHARA FM et correspondant régional de RFI. Dans une dépêche publiée sur les antennes de RFI, Raliou a indiqué que le gouverneur avait distribué les vivres aux responsables administratifs et coutumiers, au lieu de les donner aux populations nécessiteuses.
Suite à cette plainte pour diffamation, le journaliste a été inculpé, le 15 juillet, par le Tribunal régional d’Agadez. Le juge l’a pourtant laissé en liberté provisoire en attendant le jugement. Pour l’instant, l’affaire est en instruction. L’avocat du journaliste a séjourné à Agadez du 25 au 27 juillet pour assister à l’interrogatoire de son client par le juge.