(RSF/IFEX) – Reporters sans frontières est choquée par la perquisition, le 2 mars 2009, des locaux de la société de production Tac Presse, en lien avec la diffusion le 30 janvier dans l’émission « Spécial investigation » de la chaîne Canal +, d’un documentaire consacré à la Martinique, dans lequel l’un des témoins tenait des propos […]
(RSF/IFEX) – Reporters sans frontières est choquée par la perquisition, le 2 mars 2009, des locaux de la société de production Tac Presse, en lien avec la diffusion le 30 janvier dans l’émission « Spécial investigation » de la chaîne Canal +, d’un documentaire consacré à la Martinique, dans lequel l’un des témoins tenait des propos racistes. À la suite de l’ouverture le 9 février d’une information judiciaire pour « apologie de crime contre l’humanité et incitation à la haine raciale » contre l’auteur de ces propos, sept personnes dont cinq officiers de police judiciaire, un greffier et un juge d’instruction ont fouillé les bureaux de Tac Presse et visionné l’original du documentaire.
« Une fois de plus, des journalistes sont assimilés à des auxiliaires de police ou à des délinquants. La méthode est d’autant plus déplacée que, dans le cas présent, les propos tenus par le témoin apparaissant dans le documentaire peuvent être exploités. Les journalistes ont choisi de ne pas les couper et ne possèdent pas d’autres images. Quelle utilité y a-t-il à procéder à cette perquisition? L’enquête ne peut-elle se poursuivre en Martinique sans ces rushs? On a peine à le croire », a déclaré Reporters sans frontières.
« Il est choquant que, malgré l’émoi soulevé à juste titre par l’affaire De Filipis, il apparaisse encore normal et adéquat de perquisitionner une entreprise de presse en France. L’Hexagone détient déjà le triste record européen du nombre de convocations judiciaires, de mises en examen et de placements en garde à vue de journalistes « , a poursuivi l’organisation.
« Les autorités se sont engagées, il y a plusieurs mois, à protéger le secret des sources des journalistes. Mais le projet de loi n’a toujours pas été examiné en deuxième lecture par l’Assemblée nationale. Cet épisode est la preuve qu’une loi protégeant les sources des journalistes et encadrant les perquisitions est nécessaire et attendue », a conclu Reporters sans frontières.
La société Tac Presse a réalisé un documentaire intitulé « Les derniers maîtres de la Martinique ». Réalisé par Romain Bolzinger, ce reportage était consacré aux békés martiniquais. Dans celui-ci, les propos de l’un des témoins, Alain Huyghues-Despointes, ont suscité la polémique par leur caractère raciste. Les journalistes ont décidé de ne pas les couper au montage. Suite à la diffusion du documentaire, le parquet de la Martinique a ouvert une information judiciaire.
Dans ce cadre, la justice a demandé à Tac Presse de fournir les rushs du documentaire. L’entreprise a fait savoir qu’elle ne les avait pas conservés mais a remis, le master (original) du documentaire, qui a été placé sous scellés, le 3 mars. Le 2 mars à 14h30 (heure locale), les locaux de l’entreprise ont été perquisitionnés. Les policiers et magistrats présents ont visionné le master conservé par Tac Presse. Prévenus par leurs collègues, de nombreux journalistes sont venus assister à cette perquisition lors de laquelle aucun document ou matériel n’a été saisi.
En novembre 2008, Vittorio de Filipis, ancien directeur de la publication de « Libération », avait été interpellé au petit matin, à son domicile, conduit dans un centre de détention, soumis à des fouilles au corps, avant d’être présenté à un juge du tribunal de grande instance de Paris qui lui a signifié sa mise en examen.
Pour des informations complémentaires sur le cas De Filippis, cliquer ici: http://ifex.org/fr/content/view/full/99021