Le "président à vie" de la Chine n'a cessé de resserrer son emprise dictatoriale sur le pays, étouffant toujours plus la dissidence par une répression implacable doublée d'une surveillance généralisée.
Cet article a été initialement publié sur hrw.org le 14 avril 2023.
S’abstenir de critiquer son bilan épouvantable en matière de droits humains ne fera qu’enhardir Pékin
Le président français Emmanuel Macron semble avoir succombé à l’offensive de charme du président chinois Xi Jinping lors de sa visite de trois jours en Chine la semaine dernière.
Comme lors de son dernier déplacement en 2019, Emmanuel Macron a publiquement ignoré la détérioration de la situation des droits humains en Chine sous Xi. Pourtant, le « président à vie » de la Chine n’a cessé de resserrer son emprise dictatoriale sur le pays, étouffant toujours plus la dissidence par une répression implacable doublée d’une surveillance généralisée. Le gouvernement chinois a systématiquement démantelé les libertés fondamentales à Hong Kong, poursuivi l’oppression généralisée des Tibétains et commis des crimes contre l’humanité contre les Ouïghours et d’autres musulmans turciques au Xinjiang.
Sous Xi, le gouvernement chinois a également étendu sa surveillance et son intimidation pour faire taire les critiques au-delà de ses frontières, y compris en France. Il a également usé de son pouvoir pour affaiblir le système international de protection des droits humains et se protéger, ainsi que d’autres gouvernements gravement répressifs, de toute surveillance internationale.
Le président Macron n’a soulevé aucun de ces sujets publiquement au cours de sa visite, ni n’a laissé entendre les avoir abordés en privé. La guerre en Ukraine était la principale priorité du président français déclarant vouloir compter sur Xi pour « ramener la Russie à la raison« , malgré la réaffirmation récente par Xi et le président russe Vladimir Poutine de leur « amitié sans limites ». L’autre priorité apparente d’Emmanuel Macron était la reprise des affaires entre la France et la Chine après la crise du Covid-19. Un certain nombre de contrats ont manifestement été conclus, montrant que les abus flagrants de Pékin – y compris les rapports crédibles selon lesquels les Ouïghours sont assujettis au travail forcé – n’affectent pas la volonté de la France de faire des affaires avec la Chine.
Le retour au « business as usual » montre que le président Macron n’a pas tiré de la situation en Ukraine l’enseignement selon lequel ignorer des violations croissantes des droits humains pour des gains économiques et géopolitiques sur le court terme peut avoir des conséquences dramatiques.
Quelques jours avant de rejoindre Emmanuel Macron à Pékin, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a souligné que le gouvernement chinois est « devenu plus répressif en interne et plus agressif à l’extérieur ». Le président Macron aurait dû prendre en compte cette réalité dans son engagement avec Xi Jinping.
Pékin est le grand gagnant dans tout cela, et il ne pourra qu’être enhardi par l’approche dénuée de critique du président français. A peine deux jours après son départ de Chine, deux éminents avocats spécialisés dans la défense des droits humains ont été condamnés à de lourdes peines de prison sur la base d’accusations fabriquées de toutes pièces. Business as usual pour Pékin.
Le gouvernement français répète avec la Chine la même erreur commise avec la Russie, dont les atrocités en Ukraine provoquent des souffrances à grande échelle. Soutenir les droits humains n’est pas seulement une approche respectueuse des principes fondamentaux, c’est aussi dans l’intérêt de la France, et de tous.