Benjamin Wiaceks’est fait agresser près de l’ambassade américaine à Sanaa alors qu’il couvrait la manifestation organisée en réaction à la vidéo anti-islam "L’innocence des musulmans", après avoir pourtant mentionné sa qualité de journaliste et montré sa carte de presse.
(RSF/IFEX) – Le 19 septembre 2012 – Reporters sans frontières est fortement préoccupée par la dégradation de la situation de la liberté de la presse au Yémen. Les cas de violence à l’encontre des journalistes se multiplient, à l’image du reporter français agressé par les Forces centrales de sécurité yéménites, alors qu’il couvrait des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre devant l’ambassade américaine à Sanaa, le 13 septembre dernier.
“Nous sommes très préoccupés pour la sécurité des journalistes au Yémen. Depuis le début de l’année 2012, plusieurs professionnels de l’information et citoyens-journalistes ont été agressés et/ou arrêtés. Le respect et la protection des médias constituent une garantie nécessaire de la liberté de la presse dans un pays comme le Yémen, qui aspire à la démocratie”, rappelle l’organisation.
Le 13 septembre, Benjamin Wiacek, rédacteur en chef du site d’information La voix du Yémen, qui collabore régulièrement avec France 24 dans la capitale yéménite, s’est fait agresser près de l’ambassade américaine alors qu’il couvrait la manifestation organisée en réaction à la vidéo anti-islam « L’innocence des musulmans », après avoir pourtant mentionné sa qualité de journaliste et montré sa carte de presse. Il a été contraint de donner la carte mémoire de sa caméra pour échapper à ses agresseurs. L’attaque subie par le journaliste a été filmée par un citoyen. La vidéo montre le reporter pris à partie par des membres des Forces centrales de sécurité. L’extrait est toujours disponible sur les réseaux sociaux.
Le cas du reporter français n’est pas isolé. Le même jour, les Forces centrales de sécurité ont attaqué le cameraman de la chaîne Al-Sahat Al-Ahlyia, Mahmoud Al-Zileeyi, pendant qu’il couvrait la manifestation. Contacté par Reporters sans frontières, Marwan Al-Damadj, le secrétaire général du syndicat des journalistes yéménites, a précisé que le journaliste, actuellement hospitalisé, avait un bras cassé.
Par ailleurs, le journaliste Mohamed Aayeche a été convoqué, le 15 septembre, par la justice pour avoir diffusé les noms des soldats responsables de la tentative de meurtre du secrétaire général du Parti socialiste yéménite, Dr Yacine Saeed Naamane. Cette convocation a suscité les vives protestations d’activistes et journalistes yéménites, ils l’ont qualifié de signe sérieux de la dégradation de la situation de la liberté de la presse.
Le 11 septembre, les soldats de la garde républicaine ont arrêté deux cameramen de l’agence Média arabe, Ali Abdallah Khaled et Abdelrahmane Al-Khaled alors qu’ils effectuaient un reportage sur les dégâts du palais gouvernemental, résultant d’un attentat visant le ministre de la Défense. L’ensemble de leur équipement a été confisqué ainsi que leurs enregistrements. La garde républicaine, en charge de la protection des bâtiments officiels, a par la suite procédé à trois descentes dans les locaux. Le directeur exécutif, Marwan Al-Khaled, a été placé en état d’arrestation. Toutefois, les journalistes interpelés ont été relâchés le jour même et les caméras rendues.
La veille, à Lahadj (sud du pays), le responsable militaire de la région a ordonné la saisie de 20,000 exemplaires du quotidien Akhbar Al-Yaoum, publié à Sanaa, la détention du distributeur et la confiscation d’un bus appartenant au journal. Le matériel du journal a été rendu mais les copies ont été totalement détruites par les soldats. D’après le syndicat des journalistes, la destruction des exemplaires serait liée à des articles concernant les activités de la nébuleuse terroriste dans la région.
Les attaques répétées des soldats de la garde républicaine s’inscrivent dans un contexte préoccupant dans lequel les journalistes yéménites sont particulièrement visés. Le 16 septembre 2012, un cameraman de la chaîne Al-Synia, Abed-Rabou Al-Hachichi, a été agressé et sa voiture saccagée dans le nord de la capitale yéménite. Les raisons de l’excès de violence des soldats demeurent inconnues ; pour sa part le journaliste déclare que ces derniers l’ont violemment attaqué après avoir connu son identité médiatique.