Les cinq journalistes du journal "Bao Sach" ont été condamnés au motif de l’article 331 du code pénal, qui punit les citoyens vietnamiens qui auraient “abusé de leurs libertés démocratiques".
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 28 octobre 2021.
Après trois jours d’audience, cinq journalistes du journal Bao Sach viennent d’être condamnés à des peines allant de deux à quatre ans et demi de prison par une cour de la ville de Can Tho, dans le sud du pays. Reporters sans frontières (RSF) dénonce l’acharnement des autorités de Hanoi contre la presse indépendante.
Le verdict, confirmé par la presse officielle, est tombé aujourd’hui. Le tribunal populaire du district de Thoi Lai, dans le sud du pays, a condamné, jeudi 28 octobre, à de lourdes peines de prison cinq journalistes appartenant à la rédaction de Bao Sach (“Le journal propre”), une publication en ligne spécialisée, notamment, sur les questions de corruption.
Le fondateur du média, Truong Chau Huu Danh, écope de quatre ans et six mois de réclusion criminelle. Ses confrères Doan Kien Giang et Le The Thang ont pour leur part été condamnés à trois ans de prison chacun. Les deux autres coaccusés, Nguyen Thanh Nhe et Nguyen Phuoc Trung Bao, doivent passer deux ans derrière les barreaux. En tout, la condamnation couvre une peine cumulée de quatorze ans et six mois.
Les cinq journalistes ont été condamnés au motif de l’article 331 du code pénal, qui punit les citoyens vietnamiens qui auraient “abusé de leurs libertés démocratiques ». Décision inhabituelle dans ce type de procès, le tribunal a assorti son verdict d’une interdiction, imposée aux cinq prévenus, de pratiquer toute activité journalistique pendant trois ans à compter de la fin de leur peine de prison.
Acharnement
“La condamnation des cinq journalistes de Bao Sach à d’aussi lourdes peines de prison est une nouvelle preuve de l’acharnement des autorités vietnamiennes contre toute velléité de transmettre une information libre dans le pays, déplore le responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF, Daniel Bastard. Pire, en prononçant une interdiction pure et simple de pratiquer leur métier, les juges du tribunal de Thoi Lai montrent à quel point le journalisme est exclu des préoccupations des dirigeants vietnamiens. Ces cinq journalistes n’ont rien à faire en prison.”
RSF avait révélé l’arrestation, le 17 décembre 2020, de Truong Chau Huu Danh. Ses trois confrères, Nguyen Thanh Nha, Doan Kien Giang et Nguyen Phuoc Trung Bao, ont été arrêtés dans le cadre d’un coup de filet de la police le 20 avril dernier. Le cinquième prévenu, Le The Thang, était pour sa part détenu sous le régime de la résidence surveillée.
Les condamnations des membres de Bao Sach interviennent dans un contexte de durcissement du régime de Hanoi à l’égard du journalisme indépendant, à la suite de la victoire, début 2021, de la ligne conservatrice du secrétaire général Nguyen Phu Trong à la tête du Parti communiste vietnamien.
Le Vietnam se situe à la 175e position sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2021.