(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF: Daw San San Nweh (Birmanie) lauréate du prix Reporters sans frontières – Fondation de France 1999 Le prix Reporters sans frontières – Fondation de France 1999 est décerné à la journaliste et romancière birmane San San Nweh. Actuellement détenue à la prison de Tharrawady (à 150 […]
(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF:
Daw San San Nweh (Birmanie) lauréate du prix Reporters sans frontières – Fondation de France 1999
Le prix Reporters sans frontières – Fondation de France 1999 est décerné à la journaliste et romancière birmane San San Nweh. Actuellement détenue à la prison de Tharrawady (à 150 km au nord de la capitale), elle a été arrêtée à Rangoon le 5 août 1994 et condamnée, deux mois plus tard, à une peine de 10 ans de prison pour « diffusion d’informations préjudiciables à l’Etat ».
Ce prix sera remis le :
Vendredi 10 décembre 1999, à 11 heures 30
à l’Espace Electra – 6, rue Récamier – 75007 Paris
(M° Sèvres-Babylone)
Dès l’âge de quinze ans, San San Nweh devient la correspondante de trois journaux nationaux. Deux ans plus tard, elle est la première femme birmane à suivre une formation de journaliste. Avant d’être incarcérée, elle dirige plusieurs magazines féminins, notamment Gita Pade-tha et Ein-met-hpu. Elle s’engage en politique au sein de la LND (Ligue Nationale pour la Démocratie), dirigée par Aung San Suu Kyi, Prix Nobel de la paix. Sa réputation d’écrivain dépasse les frontières birmanes. Depuis 1974, elle a publié douze romans, plus de cinq cents nouvelles et quelque cent poèmes. Le 6 octobre 1994, Daw San San Nweh est reconnue coupable de « diffusion d’informations préjudiciables à l’Etat » dans le but « d’instaurer le trouble ». Elle est condamnée à sept ans de prison, la peine maximale prévue par la loi d’urgence, puis à trois ans de prison supplémentaires pour « avoir donné des points de vue partisans » à des journalistes français en avril 1993. Il lui est également reproché d’avoir « fourni des informations sur la situation des droits de l’homme au rapporteur spécial des Nations unies pour la Birmanie ».
Aujourd’hui âgée de 55 ans, San San Newh lutte contre la maladie et l’isolement. En raison des conditions de détention très dures à la prison Insein à Rangoon et des tortures qui lui ont été infligées, elle a contracté une maladie du foie et des yeux. Elle a récemment été transférée dans la prison de Tharrawaddy, à 150 kilomètres au nord de Rangoon, pour purger sa peine. Ceux qui tentent de lui procurer de la nourriture ou de l’argent sont menacés par le MIS (services secrets birmans). Sa mère est son unique soutien puisque son mari est décédé et sa fille aînée, écrivain et militante, également incarcérée.
Treize journalistes sont actuellement emprisonnés en Birmanie et vivent un véritable enfer. Condamnés pour la majorité d’entre eux à des peines de prison très lourdes, ils sont soumis aux sévices de leurs geôliers et aux mauvaises conditions de détention communes aux deux mille prisonniers d’opinion. Un journaliste est mort en détention en 1998. Un photographe aurait succombé sous la torture en septembre dernier. U Win Tin, journaliste réputé et brillant intellectuel, est en train d’agoniser dans sa cellule. Depuis 1962, la junte, mise au ban de la communauté internationale, n’a cessé d’écraser, avec une violence rare, les moindres velléités d’émancipation d’une presse libre.
U Aung Ko, dissident birman, recevra le prix au nom de San San Nweh. Connu pour avoir incarné, dans le film « Rangoon » de John Boorman, un professeur dissident qui fait découvrir les réalités birmanes et la sagesse boudhiste à une touriste américaine, U Aung Ko est engagé depuis plus de vingt ans en faveur de la démocratie en Birmanie. Il a quitté son pays où il exerçait la profession d’interprète en 1975 et vit en France depuis cette date.
Le prix Reporters sans frontières – Fondation de France, doté de 50 000 francs, récompense, depuis 1992, un journaliste qui, par son activité professionnelle, ses prises de position ou son attitude, a su témoigner de son attachement à la liberté de la presse. Il a été décerné :
– en 1992, au journaliste Zlatko Dizdarevic, du quotidien de Sarajevo Oslobodenje,
– en 1993, au journaliste chinois Wang Juntao de L’Hebdomadaire Economique,
– en 1994, au journaliste rwandais André Sibomana, directeur du magazine Kinyamateka,
– en 1995, à Chris Anyanwu, rédactrice en chef du journal nigérian Sunday Magazine,
– en 1996, au journaliste turc Isik Yurtçu, ancien directeur de la rédaction du quotidien
prokurde Ozgür Gündem,
– en 1997, au journaliste Raúl Rivero, fondateur de l’agence de presse Cuba Press,
– et en 1998 au journaliste syrien Nizar Nayyouf, rédacteur en chef du mensuel La Voix de la Démocratie.
Cette année, six autres journalistes avaient été retenus par le jury : Veton Surroï, directeur du quotidien de langue albanaise Koha Ditore (Kosovo) ; Jesús Barraza, directeur de l’hebdomadaire Pulso (Mexique) ; Najam Sethi, rédacteur en chef de l’hebdomadaire anglophone Friday Times (Pakistan) ; Grigory Pasko, qui travaillait pour le journal de la Marine Boyevaya Vakhta (Russie) ; Amal Abbas, rédactrice en chef du quotidien indépendant Al-Raï Al-Akhar (Soudan) ; Taoufik Ben Brick, correspondant de l’agence de presse française SYFIA et du quotidien français La Croix (Tunisie).
Daw San San Nweh (Birmanie)
Libération prévue en 2004
Profession
Journaliste écrivain et militante politique.
Date d’arrestation
5 août 1994
Condamnation
Le 6 octobre 1994, Daw San San Nweh est condamnée à sept ans de prison par un tribunal civil, siégeant à l’intérieur de la prison Insein. Un second chef d’inculpation lui vaut trois ans de prison supplémentaires. Elle purge donc une peine de dix ans de prison.
Motifs
Daw San San Nweh est accusée d’avoir « fabriqué et envoyé des rapports anti-gouvernementaux pour des diplomates dans les ambassades étrangères, des stations de radio étrangères et des journalistes étrangers de passage » et d’avoir « reçu, collecté et redistribué des publications venant d’organisations exilées dans la jungle ». Daw San San Nweh est également reconnue coupable d’avoir rencontré d’anciens membres du Parti démocratique pour une nouvelle société, une formation politique interdite par le SLORC (la junte au pouvoir à l’époque) afin « d’instaurer le trouble » et d’avoir témoigné, filmée de dos, dans un reportage vidéo réalisé par deux journalistes français en avril 1993.
Sa fille Ma Myat Mo Mo Tun aurait, quant à elle, enregistré des « documents et des lettres diffamatoires » sur une disquette informatique à l’intention de Khin Zaw Win, autre opposant au régime militaire (probablement une disquette qui a été trouvée sur ce dernier au moment de son arrestation).
Les autorités lui reprochent d’avoir aussi fourni des informations concernant la situation des droits de l’homme à Yozo Yokota, Rapporteur spécial des Nations unies pour la Birmanie.
Lieu de détention
Elle est actuellement détenue à la prison de Tharrawady, sa ville natale. Elle y a été transférée après plusieurs années de détention à la prison Insein (Rangoon).
Conditions de détention
Les conditions de détention à la prison de Tharrawady sont similaires à celles que San San Nweh a connu à Insein. Un journaliste, U Saw Win, y est décèdé en août 1998, faute d’avoir été soigné convenablement par les autorités pénitentiaires.
A Insein, prison de Rangoon, où sont détenus la majorité des prisonniers d’opinion et politiques birmans, les mauvais traitements et la torture sont courants. Plusieurs prisonniers politiques y sont morts par le passé. Durant sa détention à Insein, San San Nweh a connu de nombreux problèmes de santé. Mais son transfert en province aurait permis une certaine amélioration de son état.
A de nombreuses reprises, les autorités de la prison ont refusé qu’elle reçoive des visites, normalement prévues tous les quinze jours. Sa famille, notamment sa mère, ou ses amis qui ont essayé de l’aider financièrement, ont été menacés par ses geôliers. L’éditeur d’un de ses livres a même été incarcéré pendant un mois après avoir tenté de l’aider.
Circonstances de l’arrestation
San San Nweh a été arrêtée à Rangoon en même temps que trois autres personnes : sa fille, l’écrivain Ma Myat Mo Mo Tun, le journaliste Sein Hla Oo, et Khin Maung Swe, membre des instances dirigeantes de la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND) et élu du Parlement. Leurs arrestations seraient liées à celle d’un autre dirigeant de l’opposition Khin Zaw Win, intervenue quelques jours auparavant.
Inculpation
San San Nweh est inculpée en vertu de l’article 5 de la loi d’urgence pour « diffusion d’informations préjudiciables à l’Etat » dans le but d' »instaurer le trouble ».
Elle est également inculpée, au titre de l’article 14 de la loi sur les associations illégales, pour avoir « donné des points de vue partisans » à deux journalistes français de passage en Birmanie en avril 1993.
Procès
Elle a été jugée par un tribunal civil. Sa défense pouvait être assurée par un avocat, mais Daw San San Nwe a préféré décliner la proposition par peur d’éventuelles représailles contre cet avocat.
Situation de famille
Quatre enfants.
Son mari décède alors qu’elle est en prison. Actuellement, ses enfants ne disposent d’aucun revenu fixe du fait de l’incarcération de San San Nweh.
Date et lieu de naissance
Le 28 août 1945, à Tharrawady (province de Pegu), ville à 100 kilomètres de Rangoon. Ses parents sont U Tin Maung et Daw Sein Pu.
Biographie
Elle écrit depuis l’âge de treize ans. Lycéenne, elle est la correspondante locale de plusieurs journaux (The Nation, Botahtaung, Pyithuowe) jusqu’en 1966. Elle se marie alors avec Tun Nyunt Oo, éditorialiste du Kyeimon et du Hanthawadi avec qui elle aura quatre enfants, et quitte sa région natale pour Rangoon. En 1962, elle avait été la première femme birmane à recevoir la formation complète de journaliste.
Elle publie un premier roman en 1974 mais c’est le troisième (« Prison of darkness »), très critique à l’égard de la société birmane et de la dictature du Burma Socialist Program Party (BSPP) qui la rend célèbre. Au total, San San Nweh a écrit douze romans, plus de cinq cent nouvelles et une centaine de poèmes dont un certain nombre sont interdits par la censure birmane.
En 1988, au moment des manifestations prodémocratiques, elle publiait deux magazines, Gita Pade-tha et Ein-met-hpu. Connue dans les milieux intellectuels et journalistiques pour son caractère affirmé et ses qualités d’écriture, elle s’engage au sein de la Ligue nationale pour la démocratie (LND). Elle fait également partie d’un groupe d’intellectuels – avec notamment les journalistes Win Tin et Tin Moe (ce dernier a été libéré en février 1995, alors que Win Tin est toujours en prison) – qui lancent le slogan : « Notre devoir est de nous opposer aux décrets illégaux. »
Le 21 juillet 1989, alors qu’elle parcourt le pays comme membre de la LND, San San Nweh est arrêtée et placée en isolement dans une cellule de la prison Insein. Elle est libérée en avril 1990, puis à nouveau arrêtée en août 1994.
Statut Amnesty International
Prisonnière d’opinion
Parrains
France 2, France Culture, Le Figaro, Elle, Les Clés de l’Actualité, L’Indépendant, Internazionale (Italie) , El Pais (Espagne), Le Soir (Belgique), Journalisten (Suède).
Rapport sur la situation de la liberté de la presse en Birmanie
Treize journalistes dans les mouroirs birmans
Win Tin et Myo Myint Nyein, deux journalistes réputés, ont été contraints de dormir à même le sol en béton, sans matelas ni couverture, dans de minuscules cellules qui servent habituellement de chenil pour les chiens des militaires. Leurs geôliers les accusaient d’avoir transmis des informations sur leurs conditions de détention au Rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Birmanie. Ces mauvais traitements témoignent de l’enfer que vivent les treize journalistes actuellement emprisonnés en Birmanie. Condamnés pour la majorité d’entre eux, à des peines de prison très lourdes, ils sont soumis aux sévices de leurs geôliers et aux mauvaises conditions de détention communes aux deux mille prisonniers d’opinion. Un journaliste, U Saw Win, est mort en détention en août 1998. Un autre, le photographe U Thar Win, aurait succombé à la torture en septembre 1999. Ces journalistes ont en commun de s’être engagés en faveur de la démocratie. Ils refusent la chape de plomb imposée par les militaires sur la presse. Depuis 1962, la junte, mise au ban de la communauté internationale, n’a cessé d’écraser, avec une violence rare, les moindres velléités d’émancipation.
Treize journalistes en prison
La grande majorité des treize journalistes emprisonnés en Birmanie sont des cadres, militants ou sympathisants de la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND, opposition), parti de Aung San Suu Kyi, Prix Nobel de la Paix.
La situation en Birmanie rend difficile la collecte d’informations sur le sort des journalistes emprisonnés. Les autorités n’ont jamais communiqué de renseignements sur le nombre de journalistes détenus et sur leur état de santé. Certains ont été transférés en province sans que leurs familles n’en soient informées.
U Win Tin, directeur du journal Hanthawathi, est l’un des journalistes et intellectuels birmans les plus respectés. Il a été arrêté le 4 juillet 1989 et condamné à trois ans de travaux forcés pour avoir « donné asile à un délinquant faisant l’objet d’un mandat d’arrêt », en vertu de l’article 216 du Code pénal. Le délinquant en question serait une jeune femme ayant subi un avortement, pratique interdite en Birmanie. La sentence aurait été portée à dix ans en janvier 1993. U Win Tin ne sera libéré qu’en 2008. Son état de santé s’est considérablement dégradé depuis quelques mois. Il serait toujours détenu dans la prison Insein, à Rangoon, où ses conditions de détention sont très difficiles. Agé de 69 ans, il a été régulièrement interrogé par le MIS (services secrets). Il a toujours refusé de dénoncer le Comité Représentatif du Parlement du Peuple (CRPP, Assemblée de l’opposition en exil), condition posée par la junte à sa libération.
San San Nweh est journaliste depuis trente ans et codirectrice de plusieurs magazines féminins. Elle a été arrêtée en 1994, en même temps que sa fille aînée, et condamnée à dix ans de prison. Les autorités l’accusent notamment d’avoir eu, en avril 1993, une conversation avec deux journalistes français. Selon des informations récentes, elle serait détenue dans la prison de Tharrawaddy, à 150 km au nord de Rangoon, après plusieurs années passées à Insein. Agée de 55 ans, elle souffrirait d’une maladie du foie et de problèmes aux yeux. Sa mère est son unique soutien puisque son mari est décédé alors qu’elle était emprisonnée. Ceux qui tentent de l’aider en lui faisant parvenir de la nourriture ou de l’argent sont menacés par le MIS. L’éditeur de l’un de ses livres a été récemment détenu pendant un mois pour l’avoir soutenue financièrement.
U Sein Hla Oo, journaliste au quotidien Botahtaung et nouvelliste reconnu, a été arrêté en 1994. Il purge actuellement une peine de quatorze ans de prison pour avoir traduit en birman le livre de Aung San Suu Kyi, « Freedom from Fear ». Il est détenu dans la prison de Myitkyina, au nord du pays. Sa femme lui rendait visite tous les trois mois mais, depuis août 1999, elle n’a plus le droit de le voir. Agé de 61 ans, U Sein Hla Oo souffre d’une maladie de coeur. Il serait depuis peu soigné à l’hôpital de la prison.
Myo Myint Nyein et Sein Hlaing, journalistes indépendants, ont surtout travaillé pour des magazines culturels. Ils ont été arrêtés ensemble en septembre 1990 et condamnés à sept ans d’emprisonnement pour avoir publié un tract de « propagande antigouvernementale » intitulé « Que nous est-il arrivé ? » En novembre 1995, ils ont été condamnés à une peine supplémentaire de sept ans de prison après que des livres ont été découverts dans leur cellule de la prison Insein. Myo Myint Nyein a été transféré à la prison de Tharrawaddy et serait en bonne santé. Sein Hlaing serait toujours détenu à Insein, où sa famille n’est plus autorisée à lui rendre visite depuis le mois d’août 1999.
U Moe Thu est reporter pour le magazine économique Dana. Il est un écrivain reconnu. Il a été arrêté en mai 1996 en vertu de l’article 10 (a) de la State Protection Law de 1975, ce qui signifie qu’il peut être maintenu indéfiniment en prison sans procès. Agé de 69 ans, il est actuellement détenu à la prison Insein Il souffre de maux d’estomac et de problèmes cardiaques.
Sonny (Khin Maung Win), 40 ans, photographe et caméraman pour la LND, a été arrêté en juin 1997 pour avoir filmé une interview de Aung San Suu Kyi. Il a été condamné à sept ans de détention en août 1997 pour « publication de fausses nouvelles en connaissance de cause ». Il serait détenu à la prison de Myitkyina, dans le nord du pays. Les autorités de cet établissement pénitentiaire ont récemment déclaré à sa famille qu’il ne figurait plus sur la liste des prisonniers. Personne n’a vu le journaliste depuis plusieurs mois.
U Tha Ban, journaliste au quotidien Kyemon (The Mirror), a été arrêté en mars 1997 et condamné à sept ans de prison pour avoir aidé un leader étudiant à rédiger un livre intitulé « Histoire des étudiants birmans ». Agé de 65 ans, U Tha Ban est détenu à la prison Insein. Il aurait des difficultés à marcher et souffrirait de problèmes oculaires. Sa famille a demandé qu’il puisse être examiné par un ophtalmologiste, mais cette requête a été rejetée par les autorités.
U Soe Thein (Maung Wontha), journaliste au quotidien Botahtaung, a été arrêté en mai 1996 en vertu de l’article 10 (a) de la State Protection Law de 1975. Il est incarcéré à la prison Insein. Il souffrirait d’hypertension.
Ohn Kyaing, journaliste aux quotidiens Kyemon et Hantawaddy, a été emprisonné en 1990 et condamné à un total de dix-sept ans de prison. Il est actuellement détenu à la prison de Taungoo, à 200 km au nord de Rangoon. Sa famille a dû vendre sa maison et ses terres pour lui venir en aide.
Aung Zin Min, 50 ans, journaliste au magazine New Style, a été condamné à sept ans de prison en 1996 pour avoir publié des articles prodémocratiques. Il est actuellement à la prison de Tharrawaddy.
U Thein Tan, journaliste à Kyemon et Hantawaddy, a été arrêté en 1990 et condamné à un total de dix ans de détention. Selon certaines sources, son état de santé se serait récemment dégradé. Il est âgé de 60 ans.
Cho Seint, journaliste indépendant, a été arrêté en 1996 et condamné à sept ans de prison, pour son engagement en faveur de la démocratie. Il est détenu à la prison de Tharrawaddy.
Des conditions de détention extrêmement difficiles
Les tortures physiques et morales s’ajoutent aux conditions de détention extrêmement difficiles. Aussi, la majorité des journalistes emprisonnés souffrent actuellement de maladies graves. Les autorités tardent à soigner correctement les détenus, ou refusent de le faire. Un journaliste est même récemment décédé en prison. U Saw Win, rédacteur en chef-adjoint du quotidien Botahtaung, est mort le 7 août 1998 des suites d’une attaque cardiaque. Agé de 59 ans, il aurait été victime d’une mauvaise prise en charge médicale de la part des autorités de la prison de Tharrawaddy. Elu député de la LND en 1990, il avait été arrêté un an plus tard et condamné à dix ans de prison.
Il est probable que le 26 septembre dernier, U Thar Win, photographe pour le journal gouvernemental Kyemon, soit mort durant un interrogatoire mené par les services de l’intelligence militaire (MIS). U Thar Win, âgé de 43 ans, a été arrêté en compagnie de sept autres journalistes après que le quotidien avait publié une photo du général Khin Nyunt illustrant un reportage intitulé « L’escroc le plus célèbre du monde ». Ils ont tous été relâchés mais ont perdu leur emploi. Selon certaines sources, le photographe était un démocrate « infiltré » au sein de la rédaction.
Tous les journalistes emprisonnés ont été battus, voire torturés, pendant leur interrogatoire. Les informations sur les tortures subies par les prisonniers d’opinion sont connues depuis quelques années grâce aux témoignages de ceux qui ont pu s’exiler. Passages à tabac, brûlures de cigarettes, notamment sur les parties génitales, décharges électriques, isolement dans des cellules de moins de quatre mètres carrés, menaces de mort et de viol. Les dernières informations laissent craindre que ces pratiques n’aient pas disparu.
U Win Tin, Myo Myint Nyein, Sein Hlaing et U Sein Hla Oo doivent porter des chaînes et sont isolés durant des périodes d’au moins trois mois. San San Nweh n’a toujours pas été autorisée à voir sa fille de 24 ans, arrêtée en même temps qu’elle, en 1994.
Les autorités pénitentiaires peuvent suspendre les visites des familles et des proches sans motif, supprimer les soins médicaux ou restreindre l’accès aux douches. Les prisonniers d’opinion doivent se contenter de rations alimentaires très pauvres en calories. Beaucoup d’entre eux ont développé des maladies oculaires et des problèmes cardiaques. Depuis le mois de septembre 1999, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) visite les prisons birmanes. Les rations de nourriture ont été réduites après ces visites, des détenus ont été transférés dans des prisons de province et les conditions de détention ont empiré pour les prisonniers d’opinion.
Des informations clandestines contre la presse de propagande
En Birmanie, depuis le coup d’Etat de 1988, il n’existe plus aucun média indépendant. Les organes de presse, notamment les trois quotidiens (deux en langue birmane et un en anglais), sont directement contrôlés par la junte. Une cinquantaine d’hebdomadaires et une quarantaine de mensuels privés sont publiés. Mais de nombreux sujets sont tabous : la situation des droits de l’homme, les événements de 1988, les activités de l’opposition, la prostitution, etc. Pour faire paraître une publication, les propriétaires des titres doivent obtenir une licence auprès des conseillers des généraux. Ces publications, très médiocres, se limitent le plus souvent à des articles et des photographies sur les stars de cinéma, les chanteurs et les danseurs. Tous les magazines doivent par ailleurs publier, dans chacune de leurs éditions, un article écrit par le MIS.
La junte tente, depuis plusieurs années, de mieux contrôler les milieux journalistiques et intellectuels, le plus souvent acquis à l’opposition. Les militaires ont ainsi fait bénéficier les journalistes ayant intégré des médias officiels, de terres et d’avantages sociaux. L’adhésion à l’Association des journalistes permet de recevoir une prime d’environ 1 000 euros. Un journaliste est reconnu comme tel après avoir écrit vingt poèmes ou douze articles en langue birmane. Selon les autorités, la Birmanie compte actuellement 12 000 écrivains et journalistes, 1000 selon des sources indépendantes.
Seules les émissions diffusées sur ondes courtes par la British Broadcasting Corporation (BBC), Voice of America, Radio Free Asia et la radio Democratic Voice of Burma (DVB, basée à Oslo) permettent aux Birmans de disposer d’informations autres que celles de la propagande. Ces radios sont très prisées par la population qui les écoute en secret. Un Birman risque la prison pour un tel « délit ». Des lettres d’informations et des magazines sont également publiés par la communauté exilée en Thaïlande et distribués sous le manteau dans le pays. Paraissent ainsi régulièrement trois « journaux indépendants » en birman : Khit Pying (New Era Journal), Moe Joe et The New Light of Myanmar (ce dernier porte volontairement le même nom que le quotidien en anglais publié par la junte). Ils diffusent essentiellement des informations politiques issues des différents groupes d’opposition. Une personne détenant l’un de ces journaux est passible d’une lourde peine de prison. Ainsi, en 1994, le célèbre écrivain Ma Thida et onze autres personnes ont été arrêtés et condamnés à vingt ans de prison pour avoir lu et distribué le journal Khit Pying à Rangoon. Seul Ma Thida a été relâché depuis. Aussi, les Birmans craignent maintenant de lire un journal ou un magazine édité par des exilés. Récemment, un groupe de journalistes exilés a diffusé des reportages sur les droits de l’homme et la société civile, enregistrés sur des cassettes qui peuvent être facilement distribuées, cachées ou effacées.
Avant 1995, la police des frontières et le service de renseignement militaire ne contrôlaient pas les hommes d’affaires en provenance de Bangkok. Mais, depuis, le MIS surveille avec attention la frontière entre la Thaïlande et la Birmanie. Toute personne en possession d’un magazine de l’opposition est susceptible d’être torturée et condamnée à une lourde peine de prison. Ainsi, ceux qui osent faire entrer clandestinement des publications sont dorénavant peu nombreux.
Des dizaines de journalistes birmans ont fui leur pays après avoir été incarcrérés ou menacés par les militaires. C’est notamment le cas de Maung Tha Ya, éditeur du magazine Thaya et écrivain. Tous ses écrits ont été interdits par le régime militaire. Il a réussi à fuir son pays en 1999, en se faisant passer pour un commerçant. Tim Moe, célébre journaliste, poète et fondateur avec U Win Tin de différents magazines, a également été condamné à l’exil après quatre années en prison. Tout comme Win Khet, éditorialiste réputé, qui a passé plusieurs années dans les prisons birmanes.
Quant aux journalistes étrangers, ils sont jugés suspects aux yeux de la junte. Les visas sont difficiles à obtenir. Depuis janvier 1998, cinq journalistes étrangers ont été expulsés. Plusieurs autres ont été interpellés et interrogés par la police birmane. Les autorités leur reprochaient de s’être intéressés aux droits de l’homme ou d’avoir pris contact avec des membres de l’opposition.
Recommandations :
Reporters sans frontières demande instamment à la junte militaire birmane de :
1. libérer immédiatement et sans conditions les treize journalistes emprisonnés pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression, garanti par l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme,
2. interdire l’usage de la torture et des mauvais traitements dans les prisons, centres d’interrogatoires et commissariats,
3. cesser d’utiliser les aveux extorqués sous la torture comme des « preuves » lors des procès,
4. respecter les normes internationales en matière de procès justes et équitables (présence d’un avocat, possibilité d’interjeter appel, notification à l’accusé des chefs d’inculpation, etc.),
5. abroger des lois contraires à la liberté de la presse : The Printers and Publishers Registration Law de 1962, instrument caractérisé de censure, The Television and Video Law et The Computer Science Development Law de 1996, permettant une censure drastique de l’audiovisuel et des médias électroniques, The Emergency Provisions Act de 1950, utilisé pour condamner des journalistes à de lourdes peines de prison, The Official Secrets Act de 1923 et The State Protection Law de 1975, loi d’exception donnant aux militaires les pleins pouvoirs,
6. signer et ratifier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dont l’article 19 garantit la liberté d’expression,
7. permettre à une délégation de Reporters sans frontières de se rendre en Birmanie.
Reporters sans frontières demande à l’Union européenne de :
1. élargir le champ des sanctions définies en 1996 et prorogées par la Déclaration du 30 octobre 1999, contre le régime birman.
2. tout mettre en oeuvre pour que le Rapporteur spécial des Nations unies pour les droits de l’homme en Birmanie dispose des moyens nécessaires pour enquêter sur les violations de la liberté d’expression.