Mohammed Arku a été arrêté par les forces de sécurité sud-soudanaises pour avoir pris des clichés sans autorisation du gouvernement, dans une zone pourtant non militarisée.
(RSF/IFEX) – Consternée par les récents développements concernant la liberté de la presse au Sud-Soudan et alors que le pays s’apprête à devenir officiellement indépendant en juillet 2011, Reporters sans frontières lance un appel au président du Sud-Soudan, Salva Kiir Mayardit, afin de demander la libération immédiate du journaliste darfouri Mohammed Arku. Employé par le Sudan Radio Service, celui-ci a été arrêté par les forces de sécurité sud-soudanaises, (SPLA – Armée de Libération du Peuple du Soudan), le 11 mai 2011, à Wau (Sud-Soudan) pour avoir pris des clichés sans autorisation du gouvernement, dans une zone pourtant non militarisée. Il a été transféré le 24 mai à Juba, la capitale du Sud-Soudan. Selon certaines sources contactées par Reporters sans frontières, il aurait pu être sujet à des tortures physiques et psychologiques.
« Inquiets pour la santé de Mohammed Arku, nous demandons sa libération immédiate et sans conditions. Ses conditions de détention – arrestation arbitraire, aucune nouvelle transmise à son entourage, et maintenant, de possibles mauvais traitements – reflètent le sentiment d’impunité générale qui prévaut dans le pays, où les forces de sécurité semblent pouvoir arrêter les journalistes selon leur bon vouloir » a déclaré Reporters sans frontières. « Les exactions commises par les forces de sécurité sud-soudanaises contre les journalistes et les médias doivent cesser. Nous exhortons à ce titre les autorités à combler le vide juridique sur le statut des médias, en adoptant rapidement une loi claire et explicite assurant l’existence d’une presse libre et indépendante, et garantissant la sécurité des journalistes », a-t-elle ajouté. « À un peu plus d’un mois de la création officielle de l’État du Sud-Soudan, tous les regards sont tournés vers ce pays. Les attentes de la population en termes de liberté sont énormes et légitimes », rappelle l’organisation à Salva Kiir, le président actuel du Sud-Soudan, et vice président du Soudan.
Détentions, harcèlements et interrogations sont courants au Sud-Soudan. Le journaliste du Sudan Radio Service, Mohammed Arku, est détenu dans des conditions extrêmement difficiles. Du fait des mauvais traitements qu’il aurait pu subir, son arrestation dépasse la simple pression routinière. Aucun chef d’accusation valable n’a été fourni par les autorités, selon lesquelles le journaliste était en possession de plusieurs versions différentes de ses papiers d’identité.
Avant lui, Isaac Vuni, journaliste indépendant, et anciennement collaborateur du ministère de l’Information du gouvernement du Sud-Soudan, avait été détenu entre le 28 mars et le 2 mai. Le journaliste avait été arrêté dans le plus grand secret par la police, à Juba, et on était longtemps restés sans nouvelles de lui. Alors journaliste pour le « Sudan Tribune », Isaac Vuni avait déjà été détenu et malmené par les forces de sécurité au commissariat de police de Juba, le 29 juillet 2009, après avoir écrit un article impliquant des membres officiels de l’Armée de Libération du Peuple du Soudan (SPLA) et du gouvernement du Sud-Soudan (GOSS) dans un scandale éclaboussant la Nile Commercial Bank.
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Situation inchangée au Nord
Pendant ce temps, la liberté des médias se porte toujours aussi mal dans le nord du pays, où le régime de Khartoum procède à des arrestations arbitraires, et commet des exactions et des actes de censure directe. Les forces de sécurité (NISS – National Intelligence and Security Services) exercent toujours un contrôle sur les médias et utilisent la confiscation de matériel comme mode d’intimidation et moyen de pression financière.
Le 17 mai, Abulgasim Ibrahim, journaliste pour « Al-Sudani Daily », un quotidien proche du parti dominant National Congress Party, a été détenu quelques heures à Khartoum, sur ordre du ministre des Finances et de l’Economie nationale, Ali Mahmoud El Rasoud. Le journaliste a provoqué la colère du ministre après lui avoir soumis des documents financiers compromettants lors d’une interview. Le ministre l’a accusé d’avoir eu accès à certains documents de son bureau à son insu, sans autorisation préalable.
Le 14 mai, deux journalistes ont été arbitrairement détenus et interrogés pendant sept heures par les services de renseignements militaires, puis remis aux forces de sécurité soudanaises. Mohamed Alfatih Himma, du journal d’opposition « Al-Midan », publié par le Parti Communiste Soudanais, et Rashan Owshi, du quotidien « Al-Tayar Arabic Daily », ont été arrêtés au check point de Jabal Awlia sur leur trajet de retour de Kadugli (sud de l’Etat de Kordofan, région disputée entre le Nord et le Sud) vers Khartoum. Les deux journalistes venaient de couvrir la réélection du gouverneur de l’Etat de Kordofan, Ahmed Haroun, tenue entre le 2 et le 4 mai. Le motif de ces détentions n’a pas été officiellement communiqué. Deux semaines plus tôt, le 1er mai, les forces de sécurité soudanaises avaient confisqué tous les exemplaires de l’édition du dimanche de « Al-Tayar Arabic Daily ». Selon Osman Murghni, rédacteur en chef du journal, ces saisies auraient eu pour but de montrer aux journalistes le mécontentement des forces de sécurité quant à la couverture des élections dans cette région sensible.
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