(RSF/IFEX) – Reporters sans frontières adresse une protestation ferme aux autorités kenyanes après la descente de police opérée, le 20 février 2006, contre l’hebdomadaire privé « The Weekly Citizen », suite à la publication d’un article sur les luttes de pouvoir à l’oeuvre au sein de la présidence. D’autre part, l’organisation exprime sa désapprobation face à la […]
(RSF/IFEX) – Reporters sans frontières adresse une protestation ferme aux autorités kenyanes après la descente de police opérée, le 20 février 2006, contre l’hebdomadaire privé « The Weekly Citizen », suite à la publication d’un article sur les luttes de pouvoir à l’oeuvre au sein de la présidence.
D’autre part, l’organisation exprime sa désapprobation face à la condamnation en appel à une peine de prison, assortie d’une « option d’amende », d’un journaliste du « People Daily », un quotidien privé du nord du Kenya, pour un article paru en 1999.
« Une descente de police massive, des arrestations indiscriminées, une condamnation absurde, des journalistes qui se cachent : le bilan est triste. Ces deux affaires montrent combien le mélange d’une législation liberticide et d’un gouvernement qui n’hésite pas à en faire usage est affligeant. Si le président Mwai Kibaki souhaite démentir ou corriger un journal, il existe des voies démocratiques pour le faire. Et si elles n’existent pas au Kenya, il ne tient qu’à lui de travailler avec la presse indépendante pour les créer », a déclaré Reporters sans frontières.
Une unité de la police kenyane, conduite par le chef des opérations de Nairobi, Julius Ndegwa, et le chef adjoint de la brigade criminelle provinciale, Isaiah Osugo, a conduit une importante perquisition au siège du tabloïd « The Weekly Citizen » et dans plusieurs imprimeries de la capitale, le 20 février à la mi-journée. A la recherche de la rédaction en chef, la police a investi les bureaux du journal sur l’avenue Moi et plusieurs imprimeries de Kirinyaga Road.
Lors de cette rafle, Johnstone Mativo, journaliste, Ken Teyie, maquettiste, Catherine Oyando, réceptionniste, Paul Kimani, imprimeur, et Austin Alwaka, assistant de distribution, ont été arrêtés. On ignore quelles charges sont portées contre eux. Selon plusieurs témoins, un nombre indéterminé de vendeurs de rue auraient également été appréhendés. Selon Tom Alwaka, le directeur de publication du « Weekly Citizen » qui se cache depuis deux jours, un ordinateur aurait été emporté.
L’hebdomadaire, connu pour ses publications sur des affaires de moeurs, avait publié en une plusieurs articles critiquant la présidence de Mwai Kibaki. Il affirmait notamment que le Président, dans l’incapacité de diriger le pays, avait délégué ses pouvoirs à son conseiller spécial, Stanley Murage, et qu’une lutte de pouvoir opposait une femme présentée comme sa seconde épouse, Mary Wambui, à la « première dame » Lucy Kibaki.
Dans une affaire séparée, Johann Wandetto, journaliste du quotidien privé « People Daily », a été condamné en appel, le 16 février 2006, à une peine de six mois de prison ou une amende de 50 000 shillings (environ 600 euros), pour « publication d’informations alarmistes ». Sous sa signature, le journal avait publié, le 6 mars 1999, un article intitulé : « Militiamen rob elite guards (. . .) shock as Moi men surrender meekly » (« Des miliciens volent des gardes d’élite (. . .) Le choc, alors que les hommes de Moi se rendent humblement »). Il racontait comment les gardes du corps de l’ancien président Daniel arap Moi étaient tombés dans une embuscade destinée à voler leurs armes, tendue par des miliciens de l’ethnie pokot, près de la ville de Kapenguria (Ouest).
Quatre juges s’étant succédé sans avoir pris de décision sur l’affaire, le jugement en cour d’appel était attendu depuis six ans. Dans son arrêt, la juge Wanjiru Karanja a expliqué : « Le problème n’est pas de savoir si l’histoire a provoqué de l’alarme ou de la peur au sein de la population. Ce qui est important, c’est qu’elle en avait la capacité. » (« The issue is not whether the article caused alarm or fear among the people, what is important is that it had the capacity to do so. »). Le journaliste a payé l’amende le lendemain de son jugement. Le 16 février 2000, Johann Wandetto avait été condamné en première instance à une peine de 18 mois de prison pour la même affaire et avait effectué une semaine de détention.