(JED/IFEX) – Une semaine seulement après la reprise de leurs émissions après une coupure illégale et injuste de leur signal qui a duré 21 jours, les chaînes de télévision Canal Congo Télévision (CCTV) et Canal Kin Télévision (CKTV), toutes appartenant à M. Jean-Pierre Bemba Gombo (Vice-président de la République et candidat au second tour de […]
(JED/IFEX) – Une semaine seulement après la reprise de leurs émissions après une coupure illégale et injuste de leur signal qui a duré 21 jours, les chaînes de télévision Canal Congo Télévision (CCTV) et Canal Kin Télévision (CKTV), toutes appartenant à M. Jean-Pierre Bemba Gombo (Vice-président de la République et candidat au second tour de l’élection présidentielle), ont à nouveau cessé d’émettre depuis ce lundi 18 septembre 2006 en début de soirée, à la suite d’un mystérieux incendie qui a tout détruit sur son passage.
Selon tous les témoignages recueillis par JED sur le lieu du sinistre, des journalistes et autres techniciens travaillant pour ces deux chaînes ont été surpris par une « détonation » qui a aussitôt été suivie par une gigantesque flamme qui s’est vite répandue au 3ème niveau de l’immeuble qui abrite les bureaux et studios de ces chaînes. Les mêmes témoignages font état d’importants dégâts matériels et des blessés dont le Directeur général de CCTV, M. Stéphane Kitutu Oléontwa, sérieusement brûlé et admis aux urgences dans une formation médicale de la capitale congolaise.
Jusqu’au mardi 19 septembre 2006 en début d’après midi, une situation très confuse régnait devant le siège de ces deux chaînes de télévision où une foule de militants du MLC, le Parti de M. Jean Pierre Bemba et des badauds affrontaient à coups de pierre des éléments de la police qui tentaient de les disperser. Pour la plupart de ces manifestants interrogés par Journaliste en danger (JED), cet incendie qui intervient quelques jours seulement après la reprise des émissions est considéré comme « un acte de sabotage ».
Journaliste en danger (JED) exprime sa révolte à la suite de ce terrible sinistre dont la conséquence la plus immédiate est de réduire au silence des médias qui donnaient bien l’impression de « déranger ». JED rappelle, à cet effet la teneur de sa dernière lettre ouverte adressée au Représentant spéciale de Secrétaire général des l’ONU en RDC, M William Lacy Swing. Dans cette lettre, JED exprimait ses appréhensions face à la situation d’extrême tension créée et entretenue autour de ces chaînes de télévision accusées de tous les maux depuis la proclamation des résultats du premier tour des présidentielles du 30 juillet.
Pour le moins, JED constate que la destruction de ces deux télévisions par les flammes fait suite à une série noire d’incidents qui ont affectés des médias depuis le début de l’année et pour lesquelles aucune enquête sérieuse n’a jamais été menée par le gouvernement en dehors des simples déclarations d’intension.
A titre d’exemples:
1. La Radio Sankuru Liberté, propriété de M. Joseph Olenghankoy, émettant à Lodja, territoire situé dans la Province du Kasaï Oriental, a été incendiée, au mois de janvier 2006, par des inconnus.
2. Le siège de la RTMV (Radiotélévision Message de vie) à Binza/Pigeon, propriété de l’église Armée de Victoire, a été saccagé, lundi 22 mai 2006 vers 21h00 (heure locale), par une dizaine d’hommes en civil et fortement armés qui avaient débarqué à bord de trois jeeps de marque Prado. Ils ont saccagé l’émetteur télé, emporté la table de mixage vidéo/audio, un titreur, un ordinateur, le moniteur et des téléphones portables. Quatre techniciens trouvés sur place avaient été battus.
3. Le site abritant l’antenne relais de CCTV (Canal Congo Télévision) à Kisanga, bourgade située non loin de Lubumbashi, chef-lieu de la Province du Katanga, a été saboté, le 29 mars 2006, par des hommes armés, non autrement identifiés. Un technicien de maintenance de permanence cette nuit là a été retrouvé mort poignardé.
4. Des hommes en armes non autrement identifiés ont endommagé, dans la nuit du 15 au 16 avril 2006 à Butembo (2ème ville de la Province du Nord Kivu, située à 350 km de Goma, à l’Est de la RD Congo), les émetteurs de RTG@ (Radiotélévision Groupe l’Avenir, appartenant à un député proche du parti présidentiel), Digital Congo (propriété de la famille du Président Kabila) et la RTNC (Radiotélévision nationale Congolaise), chaîne publique.
5. Tujenge Kabambare, l’unique radio communautaire émettant à Kabambare, territoire situé à environ 450 km de Kindu, chef lieu de la Province du Maniema, a été saccagée et son directeur battu, mercredi 24 mai 2006, par des militaires agissant sur ordre d’un commandant bien connu de la place et qui s’était même vanté de « cette punition » contre un média qui le dérangeait.
Au regard de tous ces incidents et attaques contre les médias qui sont restés non seulement impunis mais aussi non élucidés, JED demande qu’enfin une enquête sérieuse, conjointe au gouvernement et à la MONUC (Mission des Nations Unies au Congo), soit diligentée, toutes affaires cessantes, afin de déterminer les causes ainsi que les responsabilités de ce coup dur porté contre des médias à quelques jours du début de la campagne électorale pour le deuxième tour des élections présidentielles.
JED demande que cessent toutes les menaces, les intimidations et la stigmatisation systématique des médias et journalistes, les mettant ainsi en situation de bouc émissaire des échecs politiques, et partant, des cibles privilégiées.
Enfin JED demande, conformément à la loi n° 96/002 du 22 juin 1996 portant modalités de l’exercice de la liberté de la presse en RDC, que soit libéré la radio et télévision nationale pour permettre l’accès équitable de tous à ces médias publics, surtout en cette période électorale.