(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF : COUVERTURE DE LA GUERRE EN AFGHANISTAN Deux journalistes français et un journaliste allemand tués dans une embuscade des taliban Les grands reporters Johanne Sutton, Pierre Billaud et Volker Handloik ont été tués, le 11 novembre 2001, dans une embuscade tendue par des taliban contre une […]
(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF :
COUVERTURE DE LA GUERRE EN AFGHANISTAN
Deux journalistes français et un journaliste allemand tués dans une embuscade des taliban
Les grands reporters Johanne Sutton, Pierre Billaud et Volker Handloik ont été tués, le 11 novembre 2001, dans une embuscade tendue par des taliban contre une colonne de l’armée de l’Alliance du Nord, près de Shataraï (nord-est de l’Afghanistan). RSF a exprimé sa grande émotion aux rédactions et familles des trois reporters disparus. « Nous ne pouvons que saluer le courage de ces journalistes qui souhaitaient, malgré les risques, couvrir les affrontements, au plus près, entre les taliban et les forces de l’opposition », a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de RSF. « S’il existe des preuves que les journalistes ont été achevés par les taliban, il s’agit d’un précédent d’une extrême gravité, a-t-il précisé. Une telle sauvagerie laisse malheureusement présager de nouvelles victimes dans les rangs de la presse. »
RSF a rappelé que l’article 79 du protocole additif à la Convention de Genève du 12 août 1949, relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux, considère que « les journalistes qui accomplissent des missions professionnelles périlleuses dans des zones de conflit armé seront considérés comme des personnes civiles » et « jouissent d’une protection générale contre les dangers résultant d’opérations militaires ».
Plus de 770 journalistes ont été tués depuis 15 ans, dont vingt depuis le 1er janvier 2001.
Selon les informations recueillies par RSF, Johanne Sutton, trente-quatre ans, grand reporter de Radio France Internationale (RFI), Pierre Billaud, trente et un ans, journaliste de la radio française RTL, et Volker Handloik, reporter pigiste de l’hebdomadaire allemand Stern, ont été tués, le 11 novembre 2001, sur le front de Shataraï (dans la province de Takhar, nord-est de l’Afghanistan). Les journalistes se trouvaient sur un char des forces de l’Alliance du Nord (opposition aux taliban) quand la colonne est tombée dans une embuscade tendue par des taliban. Les trois reporters sont tombés du véhicule blindé, touchés par des éclats d’obus et des tirs de mitrailleuses. Les troupes de l’opposition ont accéléré pour échapper à l’embuscade. Quand elles ont fait demi-tour pour revenir sur les lieux de l’attaque, elles ont retrouvé le corps de Johanne Sutton. Ceux de Pierre Billaud et de Volker Handloik n’ont été retrouvés que le lendemain par des soldats de l’Alliance. Selon le témoignage de plusieurs journalistes, les corps des trois reporters étaient criblés de balles.
Un commandant de l’Alliance est également porté disparu et un soldat a été blessé. Au moins quatre autres journalistes qui se trouvaient sur le char ont survécu à l’attaque. Véronique Ribeyrotte, journaliste de la radio France Culture, faisait équipe avec ses deux confrères français.
Johanne Sutton travaillait à RFI depuis le début des années 1990. Diplômée de l’Ecole supérieure de Journalisme de Lille, elle avait travaillé au service économique, en Angleterre, puis était devenue grand reporter. Elle avait couvert de nombreux conflits, notamment au Moyen-Orient.
Pierre Billaud, envoyé spécial de la radio française RTL, était âgé de trente et un ans. Ancien journaliste de Radio France, il s’était intégré à la rédaction de RTL en 1999. Il avait couvert les conflits de Bosnie, d’Algérie et du Kosovo.
Volker Handloik, âge de quarante ans, travaillait comme reporter pigiste pour l’hebdomadaire allemand Stern mais également pour les magazines Geo, Spiegel-Reporter et Focus. Journaliste expérimenté, il avait réalisé de nombreux reportages en Russie et en Amérique latine. Trois journalistes de Stern ont été tués depuis 1995 sur des zones de conflit.
Dans un incident séparé, Gary Scurka, un cameraman du National Geographic, a été blessé, le 11 novembre 2001, par un tir de position taliban, également dans la province de Takhar. Il est actuellement soigné à l’hôpital de Khoja Bahawuddin (zone de l’Alliance du Nord).
RSF a rappelé que ce n’est malheureusement pas la première fois que des journalistes sont tués ou assassinés en Afghanistan.
En août 1998, Mahmoud Saremi, correspondant de l’agence de presse officielle iranienne IRNA, avait été tué par les taliban à Mazar-i-Charif. Les forces du mollah Omar venaient de reconquérir la ville. Le journaliste avait été assassiné avec dix diplomates iraniens.
En juillet 1994, Mirwais Jalil, journaliste afghan travaillant pour la section en pachtou de la radio BBC, avait été exécuté près de Kaboul par des troupes du leader fondamentaliste Gulbuddin Hekmatyar.