(JED/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de JED, daté du 4 août 2006: Elections en RDC: JED en appelle au respect strict par tous de la liberté de la presse Kinshasa, le 4 aout 2006 Journaliste en Danger (JED), organisation indépendante et non partisane de défense et de promotion de la liberté de la […]
(JED/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de JED, daté du 4 août 2006:
Elections en RDC: JED en appelle au respect strict par tous de la liberté de la presse
Kinshasa, le 4 aout 2006
Journaliste en Danger (JED), organisation indépendante et non partisane de défense et de promotion de la liberté de la presse et Réseau d’alerte de l’Organisation des médias d’Afrique centrale (OMAC), suit avec une attention particulière la couverture, par les médias, du processus électoral en cours et plus particulièrement celle des scrutins intervenus le 30 juillet 2006 ainsi que du travail de compilation des résultats en cours.
JED est particulièrement impressionnée par la multiplication des réactions, des mises en gardes et parfois des injures et menaces qui sont faites contre les médias accusés, parfois à raison, de manipuler des chiffres ou de vouloir anticiper sur la publication des résultats en lieu et place de la Commission Electorale Indépendante (CEI) et in fine par la Cours Suprême de Justice.
En effet, dans un communiqué conjoint publié, le mercredi 2 août 2006, la CEI et la Haute Autorité des Médias (HAM) ont dénoncé des médias (sans les citer) qui se livrent à une « violation flagrante de la loi électorale en matière de publication des résultats . . . (par) une proclamation prématurée des résultats de nature à perturber le processus électoral et à créer un climat de tension inutile et dangereux . . . . » Pour finir, les deux institutions d’appui à la démocratie ont promis, en cas de récidive, des sanctions allant jusqu’à « la fermeture pure et simple » des chaînes de télévision et de radios concernés.
Dans le même ordre d’idées, et dans un communiqué publié le 3 août 2006, le Comité International d’Accompagnement de la Transition (CIAT) se dit « consterné d’assister à un exercice de politisation à outrance par les acteurs politiques congolais du processus de compilation des résultats du vote . . . (et par) les médias qui relaient et amplifient ce phénomène en bombardant la population avec des chiffres tous azimuts ». « Le CIAT rappelle aux médias qu’ils portent une lourde responsabilité devant le peuple, la loi et l’histoire (et que) toute incitation à la haine et à la violence est répréhensible par la loi », lit-on dans le même communiqué.
Face à ces tirs croisés contre les médias, dont certains sont fondés, JED s’élève contre la tentative apparente qui voudrait présenter les médias comme les responsables des dérapages éventuels qui résulteraient du travail de la CEI. Tout en reconnaissant le rôle important que toutes les instances de la transition ont joué dans la tenue des élections en RDC, et afin que nul ne l’ignore, JED fait à l’attention de tous les observations suivantes:
1. Il ne peut y avoir de transparence véritable dans les opérations électorales en cours, sans la possibilité pour les médias de pouvoir informer le public, en toute liberté, honnêteté et responsabilité, de toutes les péripéties qui entourent ces opérations. C’est d’ailleurs ce souci de transparence, pensons-nous, qui justifie les accréditations accordées aux journalistes tant de la presse nationale qu’internationale pour accéder aux bureaux de vote et même assister aux opérations de dépouillement;
2. Ce même souci a inspiré le législateur lorsqu’il a prévu, dans la loi électorale, l’obligation pour tous les bureaux de vote d’afficher devant les bureaux, juste après dépouillement des résultats des votes exprimés, dans le but de les rendre ainsi accessibles au grand public, notamment au travers des médias;
3. La collecte de ces données, leur diffusion et même l’analyse, selon les règles de l’art, des tendances qui s’en dégagent sont des exercices normaux de toute presse libre dans toutes les démocraties du monde. Elles ne peuvent en rien être considérées comme une incitation de la population à la révolte;
4. Autant toute la communauté internationale, ainsi que tous les observateurs internationaux se sont félicités de « la maturité politique du peuple congolais » qui a fait preuve de responsabilité en se rendant massivement aux urnes, autant ils ne devraient pas s’inquiéter de la capacité du même peuple à faire la part des choses entre « l’information et l’intoxication » diffusée dans certains médias;
5. JED souligne à l’intention des professionnels des médias et des instances de régulation et d’autorégulation de la presse qu’aucun professionnel digne de ce nom ne peut se permettre, quel que soit la ligne éditoriale de son organe presse, de fausser intentionnellement les données récoltées aux différents bureaux de vote ou de donner des fausses informations pour servir une cause partisane;
6. JED a aussi observé des cas d’exploitation abusive et parfois malhonnête, dans le chef de certains journalistes, des résultats partiels récoltés auprès de divers bureaux de vote. JED condamne ces pratiques qui sont la négation même du journalisme et demande aux instances compétentes de les dénoncer nommément et de les sanctionner afin d’éviter de jeter l’opprobre sur l’ensemble de la presse et mettre ainsi en péril la sécurité des journalistes.
Au regard de tout ce qui précède, JED s’insurge contre la tendance à vouloir faire des journalistes congolais des boucs émissaires faciles des échecs et de l’imposture des hommes politiques. JED en appelle au respect strict par tous de la liberté de la presse entendue comme le droit pour les journalistes de chercher des informations, toutes les informations, et de pouvoir les traiter et les diffuser sans entraves, mais aussi le droit pour le public à être largement informé, selon les règles professionnelles, sur tous les sujets d’intérêt national. JED rappelle, enfin, qu’aucune disposition particulière ne peut empiéter sur la liberté de la presse garantie par la Constitution de la République et par les instruments juridiques internationaux auxquels la RDC est partie.
Tshivis T. Tshivuadi
Secrétaire général
D. M’Baya Tshimanga
Président