L'avocate de la journaliste Jessikka Aro a pour sa part déclaré à RSF espérer que les peines requises par le procureur seront prononcées "de manière à dissuader ceux qui seraient tentés de mener ce type de campagne de haine en ligne".
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 18 octobre 2018.
Reporters sans frontières (RSF) salue la tenue du procès de deux cyber-harceleurs à l’origine de violentes campagnes en ligne menées à l’encontre de la journaliste d’investigation Jessikka Aro, qui enquête sur les trolls du Kremlin depuis 2014.
Elle a été insultée et diffamée de manière massive sur les réseaux sociaux, parodiée dans des vidéos. Depuis 2014, Jessikka Aro est la cible de campagnes de haine et de diffamation sur internet, dont la visée est claire : réduire au silence cette journaliste d’investigation finlandaise, connue pour ses enquêtes sur les trolls du Kremlin et la manière dont ils tentent de manipuler l’opinion publique en Finlande.
Pour la première fois cette semaine, deux auteurs de ces campagnes en ligne sont jugés devant la Cour d’Helsinki pour « harcèlement », « diffamation aggravée » et « encouragement à la diffamation aggravée ». Le premier, Ilja Janitskin, est fondateur de la plateforme MV Lehti, réputée entre autres pour ses attaques à l’encontre des voix critiques de Vladimir Poutine. Il encourt un an et deux mois de prison pour avoir posté de très nombreuses images détournées, des « memes », de fausses histoires et des contenus haineux destinés à décrédibiliser la journaliste, notamment en la faisant passer pour une trafiquante de drogue.
Également appelé à la barre, Johan Bäckman, un autre fervent soutien de Vladimir Poutine, lié à des organisations pro-Kremlin et qui a dénigré de manière répétée et diffamatoire Jessikka Aro sur ses comptes Twitter ou Facebook. L’homme qui prétend agir « en tant que défenseur des droits humains » a notamment accusé la journaliste d’être « Russie-phobique », à la solde des « services spéciaux américains et baltes » et d’écrire ses enquêtes sous l’influence de la drogue. Le procureur a requis huit mois de prison à son encontre.
« RSF salue la tenue d’un procès d’autant plus emblématique que de nombreux journalistes continuent aujourd’hui d’être pris pour cible par des armées de trolls qui cherchent à décourager, voire à réduire au silence les journalistes qui enquêtent sur eux. Ce sont deux suspects qui sont ici clairement identifiés; nous comptons sur la justice finlandaise pour que cette procédure soit exemplaire et délivre un message clair aux harceleurs de journalistes en ligne. »
L’avocate de Jessikka Aro, Martina Kronström, a pour sa part déclaré à RSF espérer que les peines requises par le procureur seront prononcées « de manière à dissuader ceux qui seraient tentés de mener ce type de campagne de haine en ligne ».
La Finlande est 4e au Classement mondial de la liberté de la presse 2018. Les journalistes y sont néanmoins régulièrement harcelés en ligne, et le réseau des trolls pro-Poutine est très actif dans ce pays membre de l’Union Européenne qui partage 1 340 kilomètres de frontière avec la Russie.