"En laissant violations et agressions devenir monnaie courante, le gouvernement contribue directement à la détérioration de la situation de la liberté de la presse", souligne RSF.
(RSF/IFEX) – Le 4 octobre 2011 – Reporters sans frontières s’inquiète de la détérioration des conditions de travail pour les journalistes au Bangladesh. Du 18 au 26 septembre, plusieurs cas de menaces et d’attaques physiques par des gangs criminels, et de pressions par les autorités ont été recensés par l’organisation.
« Non seulement le climat d’insécurité persiste pour les journalistes, mais le nombre d’attaques contre des professionnels de la presse est aussi en nette augmentation. En laissant violations et agressions devenir monnaie courante, le gouvernement du Bangladesh contribue directement à la détérioration de la situation de la liberté de la presse dans le pays. Nous appelons à nouveau le gouvernement à réagir au plus vite, et à prendre des mesures pour faire cesser cette vague de violences », a déclaré Reporters sans frontières.
Le 26 septembre 2011, la police de Dacca a ouvert une enquête sur quinze étudiants, correspondants pour divers journaux locaux accusés de « complot, planification d’incendie criminel des propriétés du gouvernement et vandalisme ». Les journalistes couvraient des manifestations d’étudiants de l’université de Jagannath qui appelaient au maintien des subventions du gouvernement
L’Association des journalistes de l’université de Jagannath a demandé le retrait immédiat des plaintes déposées contre les quinze journalistes : il s’agit de Jamil Khan de The Independent, Solaiman Salman du Daily Sun, Jasim Reza du Dainik Kaler Kantho, Sadiqul Islam Niyougi Ponni du Dainik Jugantor, S.M. Mohsin de l’agence de presse BSS, Tanvir Raihan du Dainik Shokaler Khabor, Abdur Rahman Khan Lemon de New Age, Suzaul Islam du Dainik Naya Diganta, Moazzem Shakil du Bangladesh News Network (BNN), Jonayed Ahmed et Atiqul Islam du Focus Bangla News, S. A. Malek du Dainik Inqilab, Zaber du Dainik Sangram, Ibrahim Prince du Dainik Khabar Patra et Mohammad Yasin Hossain de Sheersha News.
Partis Politiques
Le 25 septembre 2011, un correspondant du Dainik Bhorer Kagoj à Narsingdi (centre), S.M. Zakaria, a été frappé à coups de barres de fer par le leader de la branche étudiante de l’Awami League, le parti au pouvoir. Cette attaque ferait suite à un article du journaliste dénonçant directement le dirigeant politique d’être impliqué dans plusieurs cas d’extorsion de fonds. Par le passé, S.M. Zakaria a été menacé à plusieurs reprises pour des articles similaires.
Le 20 septembre 2011, des agents du Rapid Action Batallion (RAB), unité spéciale de prévention de crimes, ont arrêté Aboul Assad, rédacteur en chef de Dainik Sangram, quotidien soutenant le parti islamique Jamaat-e-Islami, dans sa résidence située dans le quartier de Maghbazar, à Dacca. Son arrestation ferait suite à des affrontements, la veille, entre des policiers et des supporters du Jamaat-e-Islami, qui demandaient la libération immédiate de cinq de leurs leaders, arrêtés suite à des accusations de crimes de guerre, supposément commis pendant la guerre de l’indépendance du Bangladesh en 1971. D’après son avocat, Mohammad Abdur Razzak, Aboul Assad aurait été libéré sous caution, le 23 septembre 2011.
La présidente du Bangladesh Jatiotabadi Dôl (BNP), principal parti de l’opposition, et ancienne premier ministre, Madame Khaleda Zia, a fermement condamné l’arrestation du rédacteur en chef et a demandé le retrait des « fausses charges » retenues contre lui. Le jour de l’arrestation, des membres de l’Union Féderale des journalistes ont exprimé leur consternation à l’encontre de cette « arrestation sans fondement » en formant une chaîne humaine devant le National Press Club.
Par ailleurs, à la même période, la rédaction de Bangla News 24 ( http://www.banglanews24.com/English/ ), site d’information en ligne bilingue (anglais, bengali), a été menacé par des militants de la branche étudiante du parti islamique Jamaat-e-Islami, qui avaient participé à ces violentes confrontations avec la police. Le rédacteur en chef de Bangla News 24, Alamgir Hossain, a confirmé avoir reçu des menaces par e-mail.
Gangs criminels
Le 26 septembre, Mohsin Ali, correspondant du Dainik Bhorer Dak et du Dainik Mathabanga, a été grièvement blessé à coups de barres de fer par des membres d’un gang criminel. Les assaillants sont venus le chercher, tôt le matin, à l’école de Meherpur, où Mohsin Ali travaille également. L’attaque est survenue quelques heures après la publication d’un article en première page du quotidien local Dainik Mathabanga sur des trafiquants de drogue arrêtés en possession de lots de médicaments de contrebande. Le journaliste a été hospitalisé mais sa vie n’est pas en danger.
Le 18 septembre 2011 un journaliste et un caméraman de la chaîne de télévision privée Somoy Television, Ikramul Kabir et Dijen Singh, ont été attaqués à Sylhet (nord-est) par des membres d’un gang criminel. L’attaque ferait suite à un reportage diffusé par la chaîne de télévision sur l’implication de ce gang dans le trafic de drogue et de vente de billets de train au marché noir.
La police a confirmé que les journalistes avaient été attaqués alors qu’ils filmaient les dégâts causés au bâtiment de la gare de Sylhet par un tremblement de terre. Cette gare étant situé sur le « territoire » du gang, ses membres auraient tiré parti de la situation pour se venger du reportage diffusé par Somoy Television. Ikramul Kabir a été grièvement blessé à la tête après avoir reçu des coups de bâtons et de barres de fer. Il a été hospitalisé pendant 24 heures. Les journalistes ont porté plainte et identifié leurs agresseurs, dont l’un a été arrêté.
Le 15 septembre 2011, l’organisation a publié un rapport s’inquiétant du climat persistant d’insécurité pour les journalistes au Bangladesh.