La Loupe et L’Aube, deux hebdomadaires d’opposition, ont été piratés : de fausses éditions, au contenu tronqué, ont été distribuées. Les deux journaux y voient une manœuvre du gouvernement.
La Loupe et L’Aube, deux hebdomadaires d’opposition, ont été piratés : de fausses éditions, au contenu tronqué, ont été distribuées. Les deux journaux y voient une manœuvre du gouvernement.
Le 8 septembre, La Loupe et L’Aube ont annoncé, par voie de communiqué de presse, l’arrêt temporaire de leur publication. Cette suspension fait suite aux lourdes pressions subies par les deux titres : les dernières éditions ont été piratées pour présenter un contenu favorable au régime. Pour la rédaction des deux journaux, le coupable ne fait aucun doute : il s’agit du gouvernement, excédé par leur voix dissidente.
Le porte-parole de la présidence Alain-Claude Bilie-By-Nze, interrogé par Reporters sans frontières, réfute ces accusations : « La présidence et le gouvernement de la République gabonaise n’ont jamais piraté un journal, quelle que soit la virulence de ses écrits ».
« Si le gouvernement était derrières ces manœuvres, il s’agirait d’une atteinte à la liberté d’information et d’un acte de censure inacceptables, déclare Virginie Dangles, adjointe à la directrice de la Recherche de Reporters sans frontières. Nous exhortons les autorités à identifier les responsables du piratage, afin que la publication de La Loupe et de L’Aube puisse reprendre dans les plus brefs délais. »
Le 2 septembre, alors que le numéro 193 de La Loupe sort tout juste dans les kiosques, la supercherie éclate au grand jour : il s’agit non pas de l’exemplaire rédigé par la rédaction de l’hebdomadaire, mais d’un faux numéro, au contenu modifié. La ligne éditoriale, qui porte le gouvernement aux nues, est aux antipodes de celle du journal, connu pour son opposition au régime. L’hebdomadaire avait en fait été piraté par un nouveau membre de l’équipe de montage ayant infiltré la rédaction.
L’hebdomadaire L’Aube, qui appartient au même groupe de presse, tente alors de régler ses comptes avec les pirates. Dans son édition du 8 Septembre, le journal titre : « La présidence de la République pirate La Loupe. Que la malédiction vous accompagne à vie !!!! ». L’Aube accuse Maixent Accrombessi, directeur de cabinet du président Ali Bongo, d’être à l’origine de la manœuvre.
Mais les lecteurs de L’Aube ne liront jamais ce numéro : un individu, que la direction des hebdomadaires dit envoyé par la présidence, rachète auprès du distributeur l’intégralité des exemplaires en stock à Libreville, empêchant la distribution du journal dans la capitale. Il se serait ensuite rendu chez l’imprimeur Multipress, et l’aurait contraint manu militari de procéder à l’impression d’un faux numéro de L’Aube.
Le jour même, la suspension de la publication des deux journaux est annoncée. En dépit de cette décision, au matin du 9 septembre, un faux numéro de La Loupe sort à nouveau en kiosque. Multipress aurait à nouveau été forcé d’imprimer l’édition piratée.
Le Gabon occupe la 98è place dans le Classement 2014 de la liberté de la presse, établi par Reporters sans frontières.